Brothers

Brothers
Titre original:Brothers
Réalisateur:Jim Sheridan
Sortie:Cinéma
Durée:105 minutes
Date:03 février 2010
Note:
En octobre 2007, le capitaine des marines Sam Cahill se prépare à retourner en mission en Afghanistan. Quelques jours avant son départ, son frère cadet Tommy sort de prison en liberté conditionnelle. Lorsque Sam est porté disparu et déclaré pour mort suite à la chute de son hélicoptère, Tommy s'investit de plus en plus dans la vie de sa belle-soeur Grace et de ses deux nièces.

Critique de Tootpadu

Ce remake du film danois du même nom de Susanne Bier fait tout son possible pour affubler l'histoire d'un soldat disparu en Afghanistan de caractéristiques typiquement américains. En explorant de près le foyer préservé auquel le prisonnier de guerre rêve de retourner à tout prix, le réalisateur irlandais Jim Sheridan continue en quelque sorte son vaste portrait des Etats-Unis, entamé avec In America et poursuivi dans Réussir ou mourir. Après les immigrés clandestins et les gangsters de la cité, Sheridan se penche cette fois-ci sur une autre facette indissociable de la culture américaine et de son cinéma : les familles des soldats et les activités guerrières douteuses de l'Oncle Sam à travers le monde. Sa mise en scène émotionnellement impliquée et esthétiquement assurée permet alors de conférer une forme d'ensemble convenable, à cette histoire qui souffre d'une façon aiguë de la dichotomie de son intrigue.
En effet, la première heure de Brothers est comme suspendue dans l'expectative. Dès que le spectateur en sait plus sur le sort du mari porté disparu que la famille précipitée dans un deuil prématuré, un suspense mou s'installe qui n'est à aucun moment démenti ou ravivé par le déroulement prévisible de l'histoire. Pendant que Grace cherche à recoller les morceaux de sa vie avec l'aide de Tommy et qu'en parallèle, Sam dans sa captivité infernale s'accroche comme un forcené à l'espoir de revoir éventuellement les siens, les enjeux du récit ne bougent pas d'un iota. Puisque la réunion de la famille, et par la suite la confrontation, paraissent d'emblée inévitables, toute la préparation du moment ironiquement fatidique se transforme en une tâche narrative passablement laborieuse.
Et quand Sam est enfin arrivé à s'affranchir de ses chaînes, le traumatisme de la guerre passe subitement à l'arrière-plan, au profit d'une affaire banale de cul et de jalousie conjugale. A une époque où les guerres américaines en Irak et en Afghanistan incitent de plus en plus de cinéastes à prendre position et à entamer une première relecture du bourbier guerrier à travers le prisme du cinéma - ce qui peut donner des films aussi divers que Redacted Revu et corrigé de Brian De Palma, Dans la vallée d'Elah de Paul Haggis, Démineurs de Kathryn Bigelow, ou encore The Messenger de Oren Moverman -, Jim Sheridan reste presque lâchement en dehors du conflit. Les séquelles de son protagoniste se manifestent d'une manière aussi obscurément psychologique, que le malheur de ce dernier d'avoir survécu à l'enfer de la captivité le distingue à peine des autres vétérans filmiques qui l'ont précédé. Rien de nouveau alors au constat final, qui nous ressort la mise en garde éprouvée qu'il n'y a pas de héros en temps de guerre.
En dépit de ces lacunes scénaristiques notables, Brothers reste un film engageant. Peut-être grâce aux interprétations exagérées de Tobey Maguire et de Natalie Portman, qui correspondent probablement malgré elles au ton mélodramatique du film. En comparaison, le frère prodigue joué par Jake Gyllenhaal est le calme et la retenue même. Tout comme les autres personnages secondaires, qui contribuent une chaleur morale et une épaisseur dramatique au film, qui ne se laissent guère dissiper par nos réserves évoquées plus haut.

Vu le 6 janvier 2010, au Club de l'Etoile, en VO

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

Les influences négatives de la guerre sont non seulement physiques, mais également psychologiques. Le nouveau film de Jim Sheridan est le remake du film éponyme danois, réalisé en 2006 par Susanne Bier. Ce film nous montre comment un bon père de famille, militaire de carrière, reviendra à jamais différent, suite à son enlèvement par une troupe de terroriste. La torture qu'il va subir l'affaiblira physiquement et psychologiquement. Le réalisateur nous livre donc un film fort, qui repose sur les liens entre deux frères, leur père et la femme de l'un d'entre eux.

Le réalisateur a su s'entourer pour ce film d'un casting fortement attirant. Tobey Maguire et Jake Gyllenhaal jouent ces deux frères. Le premier livre une prestation très forte et nous montre qu'il est un excellent acteur et que son rôle de Peter Parker ne sera pas le rôle de sa vie. Jake Gyllenhaal s'oppose à lui par un jeu tout en retenue et montre qu'il sait s'investir pleinement dans un film. Son jeu tout en finesse et sa ressemblance avec Tobey Maguire (ces deux acteurs avaient été en lice pour le rôle de Spiderman) font de lui l'acteur parfait pour incarner ce frère délinquant. Quant à Natalie Portman, elle se révèle une nouvelle fois parfaite dans son premier rôle de mère. Une grande part de la réussite de ce film lui incombe, car elle irradie de sa présence et de sa grande générosité l'écran. Son interprétation aurait dû être nominée aux Oscar et je suis certain qu'elle obtiendra prochainement la statuette tant convoitée.

Ce film nous touche par la sincérité de ses propos, par son plaidoyer contre la guerre. A de nombreuses reprises, les spectateurs seront affectés moralement. Rien que le fait de voir Grace (Natalie Portman) apprendre par deux militaires la présumée mort de son mari est une scène, qui restera longtemps dans mes souvenirs et qui me renvoie à mes craintes les plus intimes de perdre un proche. Ce film montre que pour construire un bon mélodrame, il ne faut pas chercher volontairement comment émouvoir, mais plutôt chercher la sincérité et s'appuyer sur un scénario solide, servi totalement par des acteurs engagés.

Le fait que ce film soit produit par un studio indépendant garantit surtout à son réalisateur une certaine indépendance et la possibilité de s'exprimer librement sur l'horreur de la guerre. Nous sommes ainsi très loin de ces films prônant la supériorité de l'armée américaine (Rambo). Les soldats apparaissent comme de simples pions prêts à être sacrifiés dans des conflits purement économique (guerre du pétrole). Ni les personnages principaux de ce film, ni les spectateurs ne sortiront indemne de ce film, qui arrive à nous convaincre des atrocités subies sur les champs de bataille.

Vu le 6 février 2010, au Gaumont Disney Village, Salle 14, en VF

Note de Mulder: