Démineurs

Démineurs
Titre original:Démineurs
Réalisateur:Kathryn Bigelow
Sortie:Cinéma
Durée:131 minutes
Date:23 septembre 2009
Note:
Six semaines avant la fin de leur mission en Irak, le bataillon Bravo de l'armée américaine perd le sergent Matt Thompson, le commandant des démineurs. Il est remplacé au pied levé par le sergent-chef William James, un casse-cou en quête d'adrénaline, dont les méthodes à risques déplaisent aux deux autres soldats de son commando, le sergent JT Sanborn et le démineur Owen Eldridge.

Critique de Tootpadu

L'examen de la guerre en Irak par le cinéma américain continue, avec ce film intense, dont la bravoure technique ne trouve pas toujours un écho satisfaisant du côté de l'interrogation d'un conflit à fort potentiel polémique. Absente des plateaux de cinéma depuis sept ans et K-19 Le Piège des profondeurs, la réalisatrice Kathryn Bigelow y démontre une fois de plus à quel point elle maîtrise son style filmique vigoureux et plein d'action, qui n'a strictement rien à envier à celui de ses confrères masculins. Au contraire, ce sont les séquences tendues de déminage, qui constituent indiscutablement le point fort de ce film.
Comme dans The Messenger d'Oren Moverman, qui avait lui aussi choisi une activité éprouvante en rapport avec la guerre pour procéder à une mise en abîme de ses ravages, les interventions des soldats fournissent des moments d'une intensité insoutenable. Dès la première séquence, qui démontre à quel point la mort peut frapper à tout moment en temps de guerre, la tension est à son maximum, une expérience vive qui sera répétée à plusieurs reprises par la suite, notamment lors de la mission devant le bâtiment des Nations Unies et du guet-apens en plein désert. Le travail minutieux du montage et de la bande son imposent alors autant un sentiment oppressant de précarité et de fragilité que la désinvolture salutaire du scénario, qui ose se débarrasser rapidement des personnages interprétés par des comédiens de renom, inversant par la même occasion l'ordre éculé de l'élimination des vedettes dans les films catastrophes.
La pureté de l'exécution formelle de Démineurs ne va malheureusement pas de pair avec l'intransigeance de son propos. Si l'antagonisme entre James et Sanborn nous réserve au début quelques confrontations prometteuses, il est bien trop vite supplanté par l'interventionnisme exacerbé du sergent-chef. Ses virées désespérées pour retrouver le jeune vendeur de DVDs ou les responsables présumés du pénultième attentat suicide peuvent au mieux être interprétées comme un symbole de l'ingérence inconsidérée de l'Amérique dans des affaires qui ne la concernent pas forcément. Toujours est-il qu'elles imposent un virage au récit, qui en dénature le propos. La guerre risque ainsi d'être dégradée en une sorte de jeu enivrant de policier, dont les poussées d'adrénaline deviennent pour le sergent-chef James les agents d'un élan suicidaire à peine larvé.

Vu le 14 septembre 2009, au Club de l'Etoile, en VO

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

La marque de fabrique de Kathryn Bigelow sont des thrillers, où les éléments naturels occupent une part importante. Dans l'excellent Point Break, le ciel et l’eau étaient des éléments principaux de l'intrigue (des surfers, une scène de parachutisme devenu culte). De même pour l'eau, dans le trop long K19 Le Piège des profondeurs. Dans le film futuriste Strange days, la terre occupait une place importante. Dans ses films, nous retiendrons aussi l'appartenance physique et spirituelle à un clan (les surfers, les hackers, l'armé rouge). L'échec important de K19 Le Piège des profondeurs faisait que Kathryn Bigelow resta longtemps, de 2002 à ‘09 sans tourner. Ce film marque donc son grand retour devant la caméra, grâce à deux sociétés indépendantes de production, First Light Production et Kingsgate Films.

Ce film suit, caméra à l'épaule, la vie quotidienne des démineurs à Bagdad. Les concepts fondateurs des films de Kathryn Bigelow sont donc présents : la terre, les clans et surtout des vies bourrées d'adrénaline. Reposant sur des comédiens guère connus, ce film vaut surtout pour ses scènes de désamorçage de bombes artisanales et sa façon de représenter à nu le courage de ces soldats, prêts à donner leur vie pour leur pays. Ce film s'inscrit donc aux côtés de Redacted Revu et corrigé de Brian De Palma comme un hommage aux militaires de carrière.

Ce film a retenu toute mon attention, car il ne repose par sur des éléments artificiels, aucun effet de style. Kathryn Bigelow montre que, malgré un budget étriqué, elle n'a rien perdu de son style et qu'une femme peut filmer la guerre avec la même précision chirurgicale qu'un homme. Son cinéma vérité témoigne que de grands réalisateurs et réalisatrices ont recours au cinéma indépendant pour pouvoir réaliser librement leurs films, sans rendre de compte.

Les nombreuses récompenses que ce film a déjà remportées, ses nombreuses nominations aux Oscars sont là pour prouver l'excellence de cette grande réalisatrice. Le fait qu'elle fut mariée à James Cameron et est restée en bons termes avec lui révèle que les Oscar 2010 et le choc Avatar contre Démineurs sera l'événement médiatique de ce début d’année.

Vu le 26 septembre 2009, au Gaumont Disney Village, Salle 1, en VF
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Note de Mulder: