Elle s'appelle Ruby

Elle s'appelle Ruby
Titre original:Elle s'appelle Ruby
Réalisateur:Jonathan Dayton, Valerie Faris
Sortie:Cinéma
Durée:104 minutes
Date:03 octobre 2012
Note:
Il y a dix ans, le jeune Calvin Weir-Fields avait écrit un livre magistral, qui était immédiatement devenu un classique de la littérature américaine. Depuis, il n’a jamais su égaler ce succès initial. Pire encore, désormais au début de la trentaine, il ne s’est toujours pas remis de sa dernière rupture et n’a plus aucune motivation pour écrire. Seuls des rêves qu’il fait d’une belle femme lui donnent envie de continuer à vivre. Son psy lui conseille alors d’écrire sur cette amie imaginaire, qui, à force d’être modelée sur la page blanche, devient réelle.

Critique de Tootpadu

Nous avons déjà vu ce film il y a cinq ans. A l’époque, il s’appelait L’Incroyable destin de Harold Crick ou comment aboutir à un résultat aussi peu convaincant que ce film-ci à partir d’un mélange farfelu entre la fiction et la réalité. Comme dans la comédie guère amusante de Marc Forster, l’écrit prend ici le dessus sur l’action, sans que ce pouvoir littéraire ne dépasse le stade d’un gadget pas toujours employé à bon escient. Il sert à rythmer les hauts et les bas d’une relation romantique, que son instigateur a tort d’idéaliser au point de faire de l’objet de son désir un simple outil à satisfaire ses besoins amoureux, libidineux et culinaires. Mais l’ascendant que Calvin exerce sur Ruby, contre son gré et à son insu, ne débouche à aucun moment sur quelque chose de plus lucide et pertinent qu’une farce passablement divertissante.
Le principal problème de Elle s’appelle Ruby, d’ailleurs le même qui avait déjà modéré notre enthousiasme à l’égard des débuts du couple de réalisateurs Jonathan Dayton et Valerie Faris au cinéma, Little Miss Sunshine, c’est qu’il s’agit d’un film qui cherche avant tout à être gentille, peu importe les aspects plus sombres de la nature humaine qu’il ne fait qu’effleurer dans le meilleur des cas. La ressemblance en termes de caractère entre Ruby et la mère de Calvin – avec tout ce que cela implique de complexes oedipiens – n’est ainsi pas traitée plus en profondeur que les abus de pouvoir, parfois enfantins, parfois plus préoccupants, dont l’auteur se rend coupable envers sa création. Les thèmes dans l’air du temps, comme la solitude et les univers parallèles qui sont censés la relativiser, ne subissent aucune cure de jouvence. Ils sont au contraire soumis à une logique scénaristique, qui cherche la blague facile, mais au moins pas vulgaire, au détriment du traitement plus ambigu d’une situation de départ, pourtant pas dépourvue d’attrait.
Le pauvre Paul Dano continue dans le registre des jeunes paumés, tandis que Zoe Kazan, petite-fille d’Elia Kazan et fille d’un couple de scénaristes, s’est écrite elle-même un rôle qui tend par intermittence à être aussi agaçant dans son exubérance et sa bonne humeur que la Polly de Be happy de Mike Leigh. A la différence près que la plume de la scénariste en herbe peine sérieusement à atteindre la même ironie savoureuse que celle du vieux maître du cinéma anglais !

Vu le 25 juillet 2012, au Club de l'Etoile, en VO

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

Calvin (Paul Dano) est un romancier à succès, qui a des doutes existentiels et est en manque d'inspiration. Il n'arrive pas à écrire son nouveau livre. Lors d'une consultation chez son psychiatre, ce dernier le met au défi d'écrire et dépeindre la femme de ses rêves. En relevant ce défi, Calvin va donner vie, au propre comme au figuré, à Ruby, totalement amoureuse de lui et tel qu'il l'avait écrite.

Ce postulat guère original renvoie à l'excellent épisode (36) "Un monde à soi" (scénario Richard Matheson, réalisateur Ralph Nelson) de la première saison de la série culte "La Quatrième dimension". Cet épisode d'une vingtaine de minutes ne présentait aucun défaut de construction. Malheureusement, on ne peut pas en dire autant du second film de Valerie Faris et Jonathan Dayton. Leur premier film Little Miss Sunshine avait été une vraie réussite et ils retrouvent ici le même jeune acteur Paul Dano. Malgré une réalisation de qualité et un casting intéressant (Annette Bening, Antonio Banderas, Eliott Gould), le film tourne en roue libre et ne tient pas ses promesses. La faute principale relève d'un scénario laborieux, élaboré par les soins de l'actrice principale Zoé Kazan. Malgré toute la bonne volonté que l'on ressent à la vision de ce film, tant par le casting concerné et une réalisation classique, les fondations du film ne lui permettent pas de capter notre attention complète.

Autant ce scénario aurait permis de donner vie à une pièce de théâtre réussie, autant le résultat final nous donne ici envie de zapper et de revoir l'intégrale de cette série culte de Rod Sterling. Reste que Paul Dano est un des jeunes acteurs les plus intéressants par sa filmographie très éclectique. Mais il ne suffit pas d'avoir un excellent acteur pour faire un bon film. Le plus important pour un film est de reposer sur un scénario réussi, enjoué, plein de vie et attractif. L'importance d'avoir un grand réalisateur compte beaucoup aussi dans la balance, car il peut arriver à faire des miracles d'acteurs de second plan. Reste que les acteurs les plus doués actuellement ont comme un dixième sens pour se voir proposer des scénarios de qualité et non des resucées à peine déguisées d'épisodes cultes de notre enfance.

Inspiré aussi de loin par un épisode de "La Quatrième dimension", James Wan avait su en garder avec Dead silence que l'idée du ventriloque commandé par sa poupée et en faire un excellent film d'horreur. Ici, le peu d'idées nouvelles n'arrivent pas à maintenir notre intérêt tout au long du film. Certes le cinéma indépendant ne jouit pas des mêmes moyens de production, mais la fadeur d'un tel scénario empêche de retenir notre intérêt.

Vu le 25 juillet 2012, au Club de l'Etoile, en VO

Note de Mulder: