Sécurité rapprochée

Sécurité rapprochée
Titre original:Sécurité rapprochée
Réalisateur:Daniel Espinosa
Sortie:Cinéma
Durée:115 minutes
Date:22 février 2012
Note:
Depuis douze mois, le jeune agent secret américain Matt Weston attend de prouver à ses supérieurs ce qu’il vaut, en effectuant la tâche ingrate de gardien d’une planque au Cap en Afrique du Sud. Sa chance paraît tourner, quand l’agent double Tobin Frost y est emmené pour un interrogatoire. Lorsque le lieu prétendument sûr est pris d’assaut par des mercenaires, Matt arrive à s’échapper de justesse avec son invité. Dès lors, il en est le seul responsable jusqu’à l’arrivée des renforts, qui ne seront sur place qu’un ou deux jours plus tard. Cela laisse amplement le temps à l’ancien agent revenu de tout de manipuler le débutant, qui s’efforce de ne pas se laisser dépasser par cette situation explosive.

Critique de Tootpadu

Contrairement aux apparences, ceci n’est pas un film de Tony Scott. Pour son passage aux productions hollywoodiennes, le réalisateur suédois Daniel Espinosa emprunte pourtant amplement chez son confrère, qui a dû paraître, il y a vingt ou trente ans, comme le gourou d’un cinéma d’action soi-disant moderne. L’esthétique léchée, la caméra tremblotante, le rythme narratif inconsistant et même la star attitrée du réalisateur, Denzel Washington avec une énième interprétation plus fatiguée que charismatique : tous les ingrédients qui ont rendu les derniers films de Tony Scott si ennuyeux sont au rendez-vous dans ce film d’espionnage, qui ressemble plus à une resucée peu inspirée de l’univers de Jason Bourne qu’à un opéra sophistiqué, ponctué par des trahisons et autres doubles jeux dans la lignée de La Taupe de Tomas Alfredson.
L’ambition de faire autrement que la légion de films semblables, bourrins mais répétitifs jusqu’à l’écœurement, ne va en effet pas bien loin dans Sécurité rapprochée. L’aspect exotique du décor choisi pour cette chasse à l’homme vaguement haletante – dans le cas présent une Afrique du Sud tiraillée entre deux motifs emblématiques de carte postale : le stade de foot en guise de vestige de la coupe du monde et les townships délabrés – ne dépasse à aucun moment le rôle frustrant d’un environnement neutre et passif, duquel le protagoniste ne peut s’attendre au moindre coup de pouce. La nature interchangeable de ces cités loin du bercail américain, peu importe qu’elles se trouvent en Amérique latine, en Afrique, en Asie, ou en Europe de l’Est, sert au mieux à souligner l’opportunisme économique de ces productions, qui ne s’exilent la plupart du temps qu’à cause des avantages fiscaux plus importants à l’étranger. Dans le même ordre d’idées, le message faussement engagé de ce film, qui nourrit la méfiance paranoïaque contre les niveaux supérieurs de la hiérarchie, corrompus jusqu’à l’os, est aussi peu crédible et sincère que les exploits de l’agent néophyte, qui arrive presque en toute autonomie à démasquer le complot machiavélique.
La mise en scène de Daniel Espinosa avait déjà manqué de personnalité lors de son film précédent, Easy money. Elle devient carrément une copie sans verve du style de Tony Scott, lui-même en perte de vitesse. Quitte à imiter les autres pour impressionner le marché américain, pourquoi ne pas emprunter chez des réalisateurs qui savent adroitement faire la symbiose d’une esthétique clinquante et d’un récit sans temps mort, une tâche que Paul Greengrass et Christopher Nolan peuvent par exemple accomplir s’ils s’en donnent les moyens ? Tributaire d’un scénario qui devient de plus en plus crétin et prévisible au fur et à mesure que l’intrigue progresse et parti manifestement sur des bases discutables d’un point de vue formel, Daniel Espinosa ne pourra remercier que l’engouement du public américain pour des divertissements peu exigeants, si les décideurs de Hollywood font une fois de plus appel à lui pour réaliser un autre film de genre passe-partout.

Vu le 22 février 2012, à l’UGC Ciné Cité Les Halles, Salle 3, en VO

Note de Tootpadu: