I love you Phillip Morris

Titre original: | I love you Phillip Morris |
Réalisateur: | Glenn Ficarra, John Requa |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 97 minutes |
Date: | 10 février 2010 |
Note: | |
Depuis qu'il a appris qu'il était adopté, Steven Russell a toujours voulu faire de son mieux : s'engager dans son église évangélique, devenir policier, et épouser son amie Debbie. Mais un grave accident de voiture lui donne le courage d'assumer enfin qui il est réellement : un homosexuel. Avec son copain, il vit dès lors en Floride, où son style de vie onéreux dépasse rapidement ses revenus modestes. Steven devient alors un arnaqueur d'assurances professionnel, une activité illégale qui ne tarde pas de l'envoyer derrière les barreaux. En prison, il rencontre le timide Phillip Morris, homo comme lui, avec lequel il entame une relation sérieuse.
Critique de Tootpadu
Depuis la première sortie fulgurante du placard par le mouvement de Stonewall à la fin des années 1960, le cinéma gay a cherché dans presque toutes ses déclinaisons, à dresser un portrait valorisant de la communauté homosexuelle. Bien que les premières tentatives de rendre compte de cette minorité aient été pour le moins maladroites, voire rétrospectivement insultantes, la volonté de lui conférer une identité filmique n'a jamais cessé de croître, avec notamment le traumatisme de l'épidémie du sida pendant les années 1980 comme accélérateur de sa mise en valeur sociale et artistique. Chaque film avec un personnage gay participait ainsi, en bien ou en mal, à la formation d'une représentation globale des homos. Tel un outil d'affirmation, qui permettait surtout aux jeunes homos en quête d'exemples, de se construire une identité sans avoir honte d'être pédé, par le biais d'une visibilité grandissante. Récemment, si les films destinés explicitement à un public homo trouvent de moins en moins leur chemin jusqu'en salle, la production grand public a découvert le potentiel tout relatif d'histoires autour de thèmes homosexuels.
Le plus beau fleuron à ce jour de la démocratisation et de la banalisation de l'homosexualité au cinéma est sans aucun doute Le Secret de Brokeback Mountain de Ang Lee. A l'autre extrémité du spectre de la valorisation de l'amour entre deux hommes se trouve cette production franco-américaine, qui nous ramène des années-lumière en arrière dans le domaine de la représentation positive du monde gay. Rien ne semble en effet avoir changé entre l'ignoble L'Escalier de Stanley Donen il y a quarante ans, dans lequel le courant entre Richard Burton et Rex Harrison passait par ailleurs aussi mal qu'ici entre Jim Carrey et Ewan McGregor, et cet amas de clichés plus consternants les uns que les autres. I love you Phillip Morris donne en effet l'impression d'être l'œuvre d'une bande d'opportunistes, qui ne semblent guère se soucier de l'impact que leur vision crade, criminelle et globalement déplaisante du monde gay peut avoir sur sa représentation future. Loin de nous l'idée, empreinte de naïveté, que tout est rose dans la vie des homos. Mais l'ambition de coller le plus près possible à la réalité, puisque l'histoire vraie de Steven et de Phillip s'était déroulée à peu de choses près ainsi, ne justifie nullement un ton aussi factice et condescendant.
La mise en scène serviable de Glenn Ficarra et John Requa n'est pas autant à mettre en cause pour ce désastre filmique que leur scénario froid et l'interprétation péniblement forcée de Jim Carrey et Ewan McGregor. Le petit avantage de la représentation vaguement concrète de la sexualité homo est rapidement anéanti par la frilosité grâce à laquelle la plupart des baisers entre les deux têtes d'affiche sont montrés en ombres chinoises. Quant au reste, la propension du protagoniste antipathique à se prendre pour un Frank Abagnale Jr. dans Arrête-moi si tu peux déroute régulièrement le récit vers un humour lourd, parfaitement en phase avec le ton distant de cette leçon primaire et finalement répugnante en homophobie.
Vu le 12 janvier 2010, à l'Elysées Biarritz, en VO
Note de Tootpadu: