Frozen river

Frozen river
Titre original:Frozen river
Réalisateur:Courtney Hunt
Sortie:Cinéma
Durée:97 minutes
Date:07 janvier 2009
Note:
Quelques jours avant Noël, Troy, le mari de Ray et un joueur invétéré, s'en va sans donner signe de vie, et avec toutes les économies familiales, maladroitement cachées dans la boîte à gants. Le rêve de Ray, d'offrir enfin un mobile home décent à ses deux fils, vole alors en éclats. Criblée de dettes, elle retrouve la voiture de Troy auprès de Lila, une jeune femme indienne qui fait passer des immigrés clandestins chinois et pakistanais à travers la frontière proche avec le Canada. Ray participe au trafic humain, le temps de réunir assez d'argent pour finir de payer sa nouvelle maison.

Critique de Tootpadu

L'aperçu initial que nous offre ce premier film sans concession de son personnage principal en dit aussi long sur son statut social que sur son état d'esprit, qui ressemble à une résignation permanente, interrompue uniquement par quelques sursauts déterminés, motivés par un besoin profond de survie. Tatouée sur ses orteilles, négligemment habillée et en train de fumer une clope devant sa caravane avant d'envoyer ses enfants à l'école, Ray n'a vraiment rien d'une héroïne de fiction. Elle appartient davantage aux femmes coriaces de la vie réelle, qui ont préservé quelques vestiges de rêves qu'elles ressortent chaque fois que le quotidien menace de les écraser. Le parcours de Ray à travers Frozen river ressemble par conséquent à une course contre la montre, pour échapper à la noyade financière, qui se traduirait sans doute par une dégringolade sociale irrémédiable.
Son acharnement forcené et parfois contre toute raison n'est motivé que par la poursuite d'une conception du bonheur, qui devrait être hors de sa portée. Les catastrophes de la vie courante l'assaillent de partout, mais Ray réussit malgré tout à garder la tête hors de l'eau. Elle n'est point instruite et pas non plus idéaliste. Mais sa débrouillardise toujours en marge de la légalité et rarement en phase avec ce qu'on pourrait appeler un comportement exemplaire témoigne d'une force vitale indéfectible. C'est cette énergie téméraire qui la rend intéressante, faute d'être réellement attachante, tout comme l'interprétation magistrale de Melissa Leo. Ce rôle aurait pu convenir à Patricia Clarkson, par exemple, si ce n'était pour une absence de sophistication que Leo exprime sans gêne, ni fausse pudeur.
Principalement un portrait saisissant de femmes, au pluriel puisque le personnage de Lila est au moins aussi complexe et difficile d'accès que celui de Ray, Frozen river promeut également une idée plutôt rafraichissante de la justice. Cela ne se traduit pas toujours par une simplicité aussi apaisante que lorsque Troy Jr. est mis face à sa victime à la fin du film. Mais le constat d'une réalité dure, mais guère désespérante, avec lequel nous laisse Courtney Hunt est plus intelligent et moins tendancieux que les messages tout faits des films dont elle dit s'inspirer bizarrement, comme Babel de Alejandro Gonzalez Iñarritu ou Collision de Paul Haggis.

Vu le 17 décembre 2008, au Club 13, en VO

Note de Tootpadu: