Bellflower

Bellflower
Titre original:Bellflower
Réalisateur:Evan Glodell
Sortie:Cinéma
Durée:106 minutes
Date:21 mars 2012
Note:
Originaire du Wisconsin, Woodrow s’est installé avec son ami Aiden en Californie, afin d’y construire ensemble un lance-flammes et une voiture de guerre, inspirés de l’univers de Mad Max, qui leur assureraient la survie en cas de l’avènement de l’apocalypse. Leur plan devra attendre, quand Woodrow rencontre Molly dans un bar. Il tombe amoureux de cette fille, qui l’a battu lors d’une compétition d’ingestion de criquets.

Critique de Tootpadu

Le cinéma indépendant américain s’apparente à cet immense vivier dans lequel les studios hollywoodiens puisent de nouveaux talents, qui n’attendent qu’à être corrompus par les sommes colossales dorénavant à leur disposition à condition de se laisser récupérer par le système. Le premier film du réalisateur, producteur, monteur et acteur Evan Glodell est l’exemple parfait de ces productions artisanales, qui, au lieu de nous surprendre agréablement par une nouvelle voix susceptible de perturber le climat d’uniformité dans lequel stagne actuellement le cinéma américain, se fourvoient irrémédiablement dans un délire formel et narratif qu’elles n’ont pas la carrure de mener à bon port. Ce n’est en effet pas depuis le navrant Eyes find eyes de Jean-Manuel Fernandez et Sean Price Williams que nous avons été pareillement désarçonnés par ce genre de film, qui tend à méprendre la liberté d’expression pour une licence de faire sauvagement abstraction des règles basiques d’une intrigue de fiction à peu près censée.
Pourtant, le récit de Bellflower commence d’une manière plutôt prometteuse, à l’exception du condensé prophétique avant le générique, qui nous donne d’ores et déjà un aperçu du carnage dévastateur du dernier quart d’heure de ce film très inégal. Il émane un air de quiétude décontractée plutôt plaisante des premières minutes de ce film, qui abusera par la suite des dispositifs formels pour instaurer un désordre sanglant faussement hypothétique. Les deux personnages principaux sont certes des fainéants incorrigibles, qui passent leur temps à glander et à s’investir dans un projet idiot. Mais dans ce décalage avec le monde branché des gens riches, beaux et ambitieux, qui peuplent normalement le reflet médiatique du quotidien californien, réside un potentiel de séduction indéniable, que l’intrigue exploite sans fausse modestie tant que les choses ne dégénèrent pas.
Or, cette tranche de vie de deux mecs passablement paumés, qui ont vu trop souvent la trilogie Mad Max de George Miller, s’engage dans une spirale de la violence dont seuls des cinéastes confirmés de la folie sanguinaire comme David Cronenberg ou David Lynch auraient pu échapper indemnes. Soudainement, la banalité des deux premiers tiers du film est ainsi mise sens dessus-dessous, pour basculer dans un délire de sang et de feu, qui s’apparente plus à un mauvais film d’horreur qu’aux classiques du genre du road-movie rebelle, auxquels Evan Glodell semble vouloir rendre un hommage vain. L’attrait des personnages, bâti très doucement au fil de la première partie du film, est alors insuffisant, pour que nous puissions nous émouvoir de leur sort macabre et grandiloquent, qui – comble de l’ironie ou plutôt du crétinisme narratif – ne pourrait en fait sortir que de l’imagination perturbée de Woodrow, suite au traumatisme de l’accident de moto.

Vu le 8 février 2012, au Club de l'Etoile, en VO

Note de Tootpadu: