Le professeur Alessandro Regazzoni est veuf depuis de longues années. Il remplit tant bien que mal sa vie avec des activités associatives, mais il n’arrive toujours pas à complètement faire le deuil de sa femme Louise, décédée dans un accident de voiture cinq mois après la naissance de leur fille Irina. Celle-ci rentre désormais dans l’âge ingrat de l’adolescence et donne encore plus de fil à retordre à son père en manque d’amour.
Critique de Tootpadu
Commençons par la fin : cela n’est certes qu’un détail, mais comment prendre au sérieux un film, qui n’écorche pas seulement le nom d’un réalisateur aussi connu que Henry Hathaway, mais même celui de sa propre attachée de presse à la fin de son générique ? Cette petite touche de négligence finale est hélas assez symptomatique du deuxième film de Philippe Claudel, qui paraît pendant longtemps ne pas trop décidé quant à la direction qu’il souhaite prendre. Tandis que ses débuts derrière la caméra avec le très solide Il y a longtemps que je t’aime se dirigeaient imperturbablement vers une révélation finale sous forme d’aveux cathartiques, le scénario de ce film-ci ne poursuit aucun but clairement défini pendant un temps considérable. Il est du coup difficile de savoir par quel bout tenir Tous les soleils, dont les tentatives insistantes de nous familiariser avec ses personnages pittoresques portent à peine leurs fruits.
A force d’honorer la mémoire de sa femme disparue tragiquement, le protagoniste passe en effet à côté de sa propre vie. Il y a un vide immense dans le quotidien d’Alessandro, qu’il escamote artificiellement à travers des occupations qui ne paraissent pas lui procurer une satisfaction intense. Que ce soient ses cours de musique à l’université, la lecture à l’hôpital, ou les répétitions de la chorale, il n’est jamais tout à fait présent, mais toujours dans un mouvement de fuite, que l’on pourrait aussi appeler une névrose. Stefano Accorsi a perfectionné au fil de sa carrière ce genre de rôle du tombeur de filles potentiel, qui se pose pourtant trop de questions sur sa propre existence pour s’y épanouir pleinement. Ce spleen italien a beaucoup de mal à se dissiper. Il est remplacé de surcroît par une renaissance timide de l’amour, qui culmine à la fin du film par le sourire d’épagneul toujours un peu bête d’Accorsi.
Auparavant, le récit s’était démarqué par un éparpillement fâcheux, qui multipliait les actions annexes pas vraiment indispensables au retour à la vie du personnage principal. Ni la croisade du frère contre Berlusconi, ni les premières amours de la fille, et encore moins la boutade de l’échange de mots érotiques via un site de rencontres avec la supérieure d’Alessandro à l’insu de ce dernier, ne sont ainsi susceptibles d’arracher la narration de la banalité quelconque dans laquelle elle se complaît un peu trop aisément. Les seuls véritables rayons de soleil de ce film plutôt marqué par la grisaille – en dépit de la mise en valeur d’un décor urbain aussi peu exploité au cinéma que la ville de Strasbourg – sont alors la présence de la radieuse Anouk Aimée et, dans une moindre mesure, celle de Clotilde Courau.