Fighter

Fighter
Titre original:Fighter
Réalisateur:David O. Russell
Sortie:Cinéma
Durée:116 minutes
Date:09 mars 2011
Note:
Au début des années 1990, la carrière professionnelle du boxeur Micky Ward paraît terminée avant qu’elle n’ait réellement commencé. Mal conseillé par sa mère possessive et livré aux caprices de son demi-frère aîné et entraîneur Dicky Eklund, autrefois la fierté de la petite ville de Lowell près de Boston grâce à son combat légendaire contre Sugar Ray Leonard mais désormais accro aux drogues, Micky est décidé de raccrocher ses gants suite à son dernier combat minable. La rencontre avec la barmaid Charlene lui donne l’espoir d’une vie stable. Mais l’appel du ring est plus fort et Micky reprend l’entraînement, en promettant à son nouvel entourage de ne plus faire appel ni à sa mère, ni à Dicky.

Critique de Tootpadu

L’histoire du boxeur vieillissant qui revient de loin pour tenter une dernière fois sa chance afin de remporter le titre de champion du monde en dépit du milieu défavorisé dont il est issu, nous la connaissons par cœur grâce à Sylvester Stallone qui l’a conjuguée dans tous les sens imaginables à travers ses six films autour de Rocky Balboa. Que celle-ci est inspirée de faits réels et que son ressort dramatique principal est une famille particulièrement caricaturale ne change pas grand-chose à son déroulement largement prévisible. C’est davantage la mise en scène de David O. Russell qui confère au moins un semblant de fraîcheur à ce récit autrement vieux comme le monde, et pas exceptionnellement bien écrit, avec sa structure décousue et étrangement avare en temps forts.
En signe d’hommage ultime au Rocky original, né au milieu des années 1970 mais guère tributaire du style novateur de cette époque foisonnante, Fighter s’inspire à son tour de cette décennie faste pour le cinéma américain en termes de nouvelles formes d’expression filmique. La narration se démarque en effet par une nervosité qui ne tire point sa vigueur des quelques affrontements sur le ring – tournés au demeurant à la va-vite, sans réellement permettre au spectateur d’entrer au cœur de l’action et d’éprouver la douleur des coups assenés au héros –, mais de la proximité des personnages lors des nombreuses engueulades, de mise dans l’environnement social très populaire de la famille Eklund. Associée aux supports lourds de connotations sentimentales et de la perception de la fiction comme une réalité possible, par le biais du faux film de famille et du faux documentaire, cette façon d’aborder une histoire surchargée de clichés permet à cette œuvre singulière de ne pas apparaître exclusivement comme un spectacle grotesque d’individus en panne d’intégration sociale.
Entre les deux extrêmes du jeu très en retrait de Mark Wahlberg, qui a par conséquent du mal à porter le film sur ses larges épaules, et celui extravagant de Melissa Leo, qui faisait ici apparemment juste un tour de chauffe dans le domaine du cabotinage avant son discours ahurissant aux Oscars, deux interprétations arrivent heureusement à exister, qui par leur capacité de transformation ont réussi à nous impressionner grandement. Christian Bale nous avait déjà fait le coup de l’amaigrissement dans The Machinist, mais contrairement au film de Brad Anderson, ce changement physique est soutenu admirablement ici par une sorte de possession mentale, qui permet à l’acteur de disparaître complètement derrière son personnage de toxicomane. La véritable révélation de ce film somme toute solide est cependant le départ bluffant d’Amy Adams des rôles de filles naïves, incapables de voir le mal autour d’elles, sur lesquels s’était jusqu’à présent bâti sa réputation. Sa Charlene ne manque pas de cran pour se faire respecter dans un environnement familial peuplé de harpies, plus laides les unes que les autres.

Vu le 19 mars 2011, au Max Linder, en VO

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

Entre Rocky et The Wrestler, Fighter est une réussite totale et se rapproche du brillant exercice de style de Martin Scorsese, Raging bull. On ne pouvait pas rêver plus bel hommage que ce film pour rendre hommage à ce qui fait d'un homme un grand boxeur.

Comme dans Rocky III, ce film témoigne que le meilleur entraîneur pour un boxeur est un ancien boxeur, aussi drogué soit-il. Dicky Ecklund, star déchue et droguée, entraîne donc son frère, véritable « punching ball » humain (une énième comparaison avec Rocky Balboa s'impose naturellement). La force de se relever constamment de Micky Ward est un hymne au courage. L'influence de sa compagne pratiquement aussi abîmée que lui l'aidera à se relever, même après un combat de trop. Ce film est aussi touchant que redonnant de l'espoir aux hommes meurtris par leur quotidien.

L'excellent scénario de Fighter est tel que les deux acteurs principaux se sont totalement investis dans leur rôle. Mark Wahlberg, qui tient le film sur ses épaules, a refusé d'être payé et n'a demandé qu'une participation sur les recettes de ce film. Son engagement se ressent chaque minute et on pourra comparer le parcours du boxeur qu'il incarne avec son propre parcours. Issu d'un quartier pauvre de Boston, ces deux hommes se sont faits à force d'un travail acharné. Amy Adams, qui interprète sa compagne, change littéralement l'image de timorée qu'elle bâtit sur des comédies grand public et s'impose comme une actrice avec laquelle il faudra dorénavant compter : son jeu est brillant et renforce l'attrait que nous avons pour cette pure réussite. De même, Melissa Leo, qui interprète cette mère de famille, mérite clairement son Oscar par une interprétation si brillante qu'elle retient toute notre attention.

Enfin, que serait ce film si parfait, sans la présence du plus brillant acteur anglo-saxon actuel. Christian Bale a réitéré son exploit inhumain de transformer son physique comme précédemment dans The Machinist, mais cette fois il ressemble en plus par son comportement à un vrai toxicomane. Il s'efface totalement derrière son interprétation, au point qu’on a du mal à y retrouver l'acteur qui fut précédemment celui de American psycho, Equilibrium, et surtout The Dark knight.

Ce film est une réussite exemplaire, un uppercut qui marque à jamais notre mémoire de mordu de cinéma !

Vu le 12 mars 2011, au Gaumont Disney Village, Salle 3, en VF

Note de Mulder: