Que justice soit faite

Que justice soit faite
Titre original:Que justice soit faite
Réalisateur:F. Gary Gray
Sortie:Cinéma
Durée:109 minutes
Date:22 décembre 2010
Note:
La femme et la fille de Clyde Shelton sont sauvagement assassinées devant ses yeux. Alors que les deux coupables sont vite appréhendés, les preuves ne suffisent que pour en condamner un, Ames, à la peine capitale. Pour l’autre, Darby, le procureur de la Philadelphie Nick Rice accepte un compromis qui l’enverra derrière les barreaux pour un certain temps. Dix ans plus tard, la sentence d’Ames doit enfin être exécutée. Mais l’injection du poison mortel ne se passe pas comme prévu. Cet acte de sabotage n’est que la première étape d’une série d’enlèvements et de meurtres, orchestrée par Shelton pour montrer à Rice et à toute la ville à quel point le système judiciaire est immoral.

Critique de Tootpadu

Une sortie française maintes fois repoussée, pour être enfin calée en pleine période de Noël –quinze mois après la première américaine – et de surcroît affublée d’une affiche hideuse : tout prédestinait Que justice soit faite à n’être qu’un produit mercantile de basse qualité, largué discrètement par son distributeur avant la fin de l’année. Même si le nouveau film de F. Gary Gray contient son lot d’absurdités, notamment un dénouement qui tient à un raisonnement temporel trop juste pour être crédible, il constitue un retour pas sans charme vers ces thrillers des années 1990, où des cerveaux machiavéliques tenaient en haleine toute la panoplie des institutions américaines. A cette époque d’avant le 11 septembre 2001, la menace d’un terrorisme susceptible de paralyser la vie d’un pays tout entier inspirait les scénaristes hollywoodiens justement parce qu’elle relevait encore largement de la fiction. De nos jours, la réalité a hélas rattrapé ces idées qui apparaissent auparavant farfelues, sans que ce film tienne réellement compte de ce changement de donne majeur.
La guéguerre que l’avocat pragmatique et le méchant idéaliste se livrent évolue par conséquent comme dans un vase clos. Les attentats spectaculaires et la tension dramatique, qui monte d’un cran chaque fois que Shelton élimine un autre associé du procès à l’issue moralement insatisfaisante pour lui, priment sur la plausibilité et le réalisme de cette intrigue manichéenne. Les actes barbares du justicier auto-proclamé sont aussi peu légitimes que ceux de Hannibal Lecter ou de John Doe dans Seven de David Fincher. A l’encontre de son ancêtre filmique, Charles Bronson dans Un justicier dans la ville de Michael Winner, le personnage interprété par Gerard Butler vise une sorte de rétablissement de l’ordre mégalomane, qui dépasse largement la simple punition expéditive de ceux qui lui ont causé du tort. Le peu de sympathie que l‘on pouvait éprouver à son encontre au début du film se mue en un sentiment plus antipathique, au fur et à mesure que sa folie meurtrière sort du contexte déjà discutable de l’équation biblique de l’« œil pour œil, dent pour dent ». De même, à l’image des films d’horreur qui perdent beaucoup de leur intérêt, une fois que l’origine du mal est dévoilée, la suprématie tactique du méchant est sévèrement diminuée suite à la découverte du mode opératoire de sa croisade.
En renouant avec ses débuts et un autre film de genre très solide, Négociateur, le réalisateur F. Gary Gray nous ferait presque oublier l’atrocité comique qu’était Be cool. Sa mise en scène joliment traditionnelle des forces de l’ordre, à travers des vols en hélicoptère et des propos de fermeté de la part du maire qui cachent mal l’impuissance de la police face à la mécanique implacable du plan de leur adversaire sans scrupule, participe autant au succès tout relatif du film que sa capacité d’arracher des interprétations plutôt sobres aux deux cabotins potentiels Jamie Foxx et Gerard Butler.

Vu le 14 décembre 2010, à la Salle Pathé François 1er, en VO

Note de Tootpadu: