Custer L'Homme de l'ouest

Custer L'Homme de l'ouest
Titre original:Custer L'Homme de l'ouest
Réalisateur:Robert Siodmak
Sortie:Cinéma
Durée:143 minutes
Date:27 septembre 1968
Note:
Devenu un héros national grâce à ses exploits pendant la guerre de Sécession, le général George Armstrong Custer se sent désoeuvré en temps de paix. Il insiste alors auprès de son supérieur, le général Sheridan, d'être muté, en compagnie de sa femme Libby, au Dakota, afin d'y participer à la surveillance des tribus indiennes. Mais une fois sur place, Custer doit se rendre compte que ses idéaux ne résistent guère au rouleau compresseur des révoltes indiennes, des chercheurs d'or, et du progrès, sous forme de la construction des chemins de fer.

Critique de Tootpadu

Le réalisateur Robert Siodmak ratisse large dans son avant-dernier film, qui raconte les dix dernières années de la vie du célèbre général américain. Tellement large que ce western se retrouve en quelque sorte à cheval entre une tradition classique du genre, tournée vers l'aspect aventurier de la conquête de l'ouest, et une vision plus crépusculaire et violente de cette époque, qui allait s'accentuer peu de temps après sa sortie dans La Horde sauvage de Sam Peckinpah, par exemple. Bien qu'il ait quelques traits en commun avec Les Cheyennes de John Ford, notamment à travers sa structure narrative sous forme d'épisodes, le but principal de Custer L'Homme de l'ouest ne paraît guère être de rendre un dernier hommage au peuple indien. Il s'agit davantage du chant de cygne très digne d'un réalisateur vieillissant, qui se trouve confronté, comme son protagoniste, à une modernité qu'il ne peut et ne veut pas comprendre.
Le symbole le plus parlant pour ce refus de rompre avec une esthétique et une conception de l'humanité quelque peu datées est sans aucun doute le motif récurrent de la course folle. A trois reprises, des personnages secondaires sont pris au piège d'une descente endiablée. Le point commun entre les chercheurs d'or attachés par les Indiens sur une voiture sans cheval qui dévale à toute vitesse une colline, le soldat endurant qui espère échapper à ses poursuivants en s'agrippant à un tronc d'arbre qui est transporté à travers le flume, et le wagon détaché de la locomotive bloquée dans un guet-apens tendu par les Indiens, c'est que le mouvement spectaculaire de la fuite involontaire est censé leur épargner une fin certaine. Or, chaque fois, l'illusion d'avoir une chance, aussi infime soit-elle, d'échapper au triste sort que l'histoire réserve à ces personnages condamnés d'avance s'écrase avec fracas. Toute leur agitation et leur ingéniosité n'auront servi à rien pour contrecarrer le cours d'une intrigue à l'issue tristement célèbre. De la même façon, Robert Siodmak paraît s'être résigné à son départ prochain du fauteuil prestigieux de réalisateur. Il se débat encore et nous livre un western au demeurant fort solide. Simultanément, il est conscient du temps qui passe et de son manque d'adaptation croissant par rapport à l'avènement imminent d'une nouvelle période cinématographique dans le sillage des bouleversement sociaux de Mai '68.
Le héros incompris de ce conte légendaire fait preuve de la même lucidité. Le général Custer, tel qu'il est dépeint dans cette production de Philip Yordan, est un idéaliste ambitieux, aux convictions rigides, qui a le plus grand mal de se plier aux exigences d'une politique américaine inconsistante et aux nouvelles tactiques de guerre, qui n'avaient plus rien de chevaleresque. Sous les traits de Robert Shaw, qui avait pour une fois le privilège de briller ici dans un rôle principal, il accède au statut de héros tragique, qui ne correspond pas forcément à la réalité historique, mais qui convient parfaitement à cette oeuvre de maturité, à la fois spectaculaire et intimiste.

Vu le 13 mai 2010, à la Cinémathèque Française, Salle Henri Langlois, en VO

Note de Tootpadu: