Brüno

Brüno
Titre original:Brüno
Réalisateur:Larry Charles
Sortie:Cinéma
Durée:78 minutes
Date:22 juillet 2009
Note:
Le journaliste gay et flamboyant Bruno règne sur la scène de la mode autrichienne, grâce à son émission "Funkyzeit". Mais son apparition disgracieuse au défilé Prada à Milan dans un costume entièrement fabriqué de velcro lui fait perdre sa réputation et son emploi. Accompagné par Lutz, l'assistant de son assistant, il s'envole alors pour l'Amérique, où il rêve de devenir la première célébrité autrichienne gaie, après Arnold Schwarzenegger.

Critique de Tootpadu

Plus opportuniste que jamais, Sacha Baron Cohen poursuit son portrait au vitriol des Etats-Unis avec les aventures de Bruno, un animal médiatique aussi peu adapté que Borat. Après la mise à l'épreuve hilarante des fondements de la culture américaine dans Borat, le comédien s'attaque cette fois-ci à deux caractéristiques, elles aussi typiques d'une société plus complexée et complexe qu'il ne paraît : la recherche effrénée de la célébrité, ainsi que l'acceptation ou plutôt le rejet de l'homosexualité. La glace que Sacha Baron Cohen tend aux Américains est une fois de plus sarcastique et nullement valorisante. Et nous sommes les premiers à regretter l'absence totale du bon goût, que ce soit dans la représentation de la communauté et des pratiques gaies ou dans celle d'autres sujets délicats, comme par exemple la maltraitance et l'exploitation des travailleurs mexicains ou l'avortement. Une chose est néanmoins sûre : que Sacha Baron Cohen sait exploiter jusqu'à la nausée les travers minables d'une société américaine, qui emploie habituellement les grands moyens pour véhiculer une image diamétralement opposée à ce festin d'une débauche étonnamment ambiguë !
A commencer par une approche de l'homosexualité, qui dégoûte autant par sa polarisation caricaturale qu'elle fait rire par son côté volontairement exacerbé. Quinze ans après que les homosexuels ont commencé timidement à se faire une niche dans le cinéma grand public, il est toujours périlleux de choisir le ton juste pour aborder cette communauté minoritaire, qui a heureusement eu le cran de sortir du placard social et médiatique que la majorité hétérocentriste lui avait imposé depuis des décennies, voire des siècles. Brüno a échoué dans cette tâche de la création d'une oeuvre gaie ultime, comme tant d'autres films avant lui, qui étaient depuis toujours soit trop frileux et coincés, soit trop empressés de ne pas brusquer outre mesure l'édifice morale et érotique de la majeure partie du public. En quelque sorte, ce film régresse même, puisqu'il s'approprie un modèle unique de l'homosexualité et par conséquent de l'homosexuel, qui confirme avant tout les préjugés archaïques entretenus à l'égard de ce groupe depuis la nuit des temps, et qui exclue en même temps la majorité des gays soi-disant "normaux", qui se définissent autrement qu'à travers un style de vie flamboyant.
Cependant, ce cliché ambulant s'inscrit parfaitement dans la démarche de provocation que Sacha Baron Cohen peaufine depuis longtemps. L'important dans ses films n'est pas forcément le personnage principal et ses frasques sexuelles, mais la réaction ahurie qu'il provoque chez les autres, des Américains typiques au point de tomber là encore dans la caricature facile. Le mode opératoire depuis Borat n'a ainsi guère changé, même si les cercles dans lesquels Bruno évolue (les échangistes, les chasseurs, l'armée, les agents des relations publiques) reflètent une idée moins globale de l'Amérique, que celle des participants de la classe moyenne du film précédent.
Autant dire que la recette s'affaisse un peu et que la charge que Sacha Baron Cohen mène contre les Etats-Unis et leur culture des fans de catch homophobes et des cures de reconversion évangéliques n'est plus aussi mordante et innocemment amusante que le périple de Borat. Peut-être, parce que son traitement lourdement parodique de l'homosexualité touche chez nous un nerf sensible, qu'il vaut mieux ne pas provoquer inutilement par des pitreries plus opportunistes que sincèrement progressistes.

Vu le 13 août 2009, au MK2 Quai de Seine, Salle 5, en VO

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

Borat avait marqué nos mémoires par la révélation d'un acteur capable des pires pitreries possible, en la présence de Sacha Baron Cohen. Les autres films de cet acteur décalé, Sweeney Todd, Rocky Bobby avaient montré qu'il était capable de camper des personnages haut en couleur et moins caricaturaux. Malgré ces éléments, je ne retiendrai pratiquement rien de ce film, mis à part un vidéoclip final avec Bono et Elton John, une scène avec Paula Abdul, et une très courte apparition de Harrison Ford.

Faire un film comique, voire un pseudo-documentaire, sur un personnage représentatif d'une minorité sexuelle de notre civilisation n'est, dans le cas présent, pas une bonne idée. Lorsque Charles Chaplin faisait une caricature d'un des pires personnages historiques (Le Dictateur), cela donnait un grand film comique. Lorsqu'ici on découvre Bruno, nous découvrons un personnage homosexuel obsédé et surtout totalement ridicule. De ce fait, nous regardons d'une façon honteuse ce film, en espérant qu'il n'y aura ni une suite ni l'exploitation d'un autre sujet dramatique et historique par cet acteur.

Ce film devrait donc figurer aux Framboises de l'année prochaine dans les catégories de pire film, pire scénario, et pire acteur. Cela serait certes lui faire de la publicité, mais vu la campagne menée par Sacha Baron Cohen pour vendre son film et l'échec mondial de celui-ci, on ne sera plus à cela près !

Vu le 24 juillet 2009, au Gaumont Disney Village, Salle 16, en VF

Note de Mulder: