
Titre original: | Tellement proches |
Réalisateur: | Eric Toledano, Olivier Nakache |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 102 minutes |
Date: | 17 juin 2009 |
Note: | |
En 1993, il aurait été temps pour Alain de devenir adulte. Ancien animateur du Club Med et de supermarchés, il vivrait bien la relation amicale avec son fils Lucien et le chômage, si ce n'était pour les reproches incessants et le ras-le-bol généralisé de sa femme Nathalie. Celle-ci n'en peut plus de son fils hyperactif et de son mari glandeur, surtout lorsqu'elle les compare à la famille de son frère Jean-Pierre, un avocat brillant, dont la femme Catherine s'investit entièrement dans l'éducation exigeante des enfants, au point de leur faire apprendre simultanément plusieurs langues et instruments dès leur plus jeune âge. Pour parfaire les réunions familiales assez tendues à Créteil, il ne manque plus que Roxane, la soeur de Nathalie et Jean-Pierre, qui s'est amourachée de Bruno, un interne en médecine, qu'elle emmène chez les siens le jour de leur rencontre .
Critique de Tootpadu
Le ton désarmant, hilarant, touchant et franchement bordélique est donné dès le générique de ce troisième film du tandem formé par Eric Toledano et Olivier Nakache, de loin leur meilleur. Il suffit en effet d'une visite conflictuelle au centre commercial, pour nous rendre les personnages, leurs déboires et leurs imperfections profondément sympathiques. La maîtrise dans l'écriture scénaristique et la narration filmique des réalisateurs se révèle dès ce moment-là. Elle ne sera point démentie au cours des cent minutes suivantes, aussi désopilantes que la vie réelle ou plutôt, aussi imprévisibles et empreintes de tragédie comique qu'on aimerait qu'elle le soit.
Les dysfonctionnements sociaux auxquels la famille d'Alain et de Nathalie doit faire face sont en effet nombreux. Mais le cercle familial ne prend jamais une posture de victime dans ce tourbillon de manies plus ou moins amusantes. Chaque personnage se distingue à travers ses propres imperfections et son refus catégorique d'y remédier du mieux qu'il peut. L'élan d'individualisme dans lequel s'engage chacun pour arriver à ses fins aurait normalement dû déboucher sur une spirale exacerbée d'hystéries ou un éparpillement inévitable de l'intrigue. Grâce à sa réalisation exemplaire, Tellement proches propose au contraire un idéal de l'imperfection humaine par lequel on ne peut qu'être subjugué.
Derrière le rythme quasiment parfait et une inventivité scénaristique qui ne paraît jamais forcée, le film interroge avec légèreté les modes de perception et les impératifs sociaux, qui nous gouvernent. Les dérives de l'institution judiciaire, traitées sur un mode infiniment plus sobre dans le récent Commis d'office de Hannelore Cayre, y sont autant passé au crible que la bêtise des préjugés racistes ou antisémites. Toutefois, l'approche d'Eric Toledano et Olivier Nakache ne vise point la leçon de morale, aussi désarmante et décomplexée soit-elle. Elle révendique davantage le droit à l'erreur et à l'égarement, à condition d'assumer ses choix et les conséquences qui peuvent en résulter.
Le cinéma français regorge d'histoires familiales, qui cherchent à nous divertir avec une mise en question plus ou moins sérieuse du modèle familial. Très rarement, le trait est par contre assez subtil et sincère pour en faire autre chose qu'un provocateur consensuel d'ennui, de larmes ou de bons sentiments. L'accomplissement majeur de Tellement proches réside ainsi dans la capacité de ses créateurs de préserver la bonne humeur communicative de leur film précédent, Nos jours heureux, et de l'enrichir d'un fond existentiel certes sérieux, mais qui provoque avec le recul une sympathie et une compassion humaines authentiques, à la place de la moquerie ironique, voire cynique, bien trop souvent de mise dans ce genre de film.
S'il fallait trouver un défaut bénin à ce film en tous points vigoureux, ce serait son affiche incroyablement quelconque, ainsi qu'éventuellement l'épilogue, qui modifie le point de vue sans pour autant dénaturer l'ensemble.
Vu le 8 juin 2009, à l'Elysées Biarritz
Note de Tootpadu:
Critique de Mulder
Voici le troisème film du tandem Eric Toledano et Olivier Nakache, déjà à l'oeuvre sur Je préfère qu'on reste amis ... (2005) et Nos jours heureux (2006). Ces deux réalisateurs restent avec ce film cantonné à leur genre préféré, soit l'étude de mœurs de personnes représentants des tares différentes. La différence de ce film par rapport à leur deux films précédents vient du fait que le scénario nous fait passer du rire aux larmes, avec une facilité déconcertante.
Le spectateur est immergé ici en plein dans cette farce caustique aux très bons mots. Le soin porté au casting (Isabelle Carré, Vincent Elbaz, Omar Sy, François-Xavier Demaison), ainsi que l'humour omniprésent font que je retrouve enfin le plaisir pris lorsque j'ai vu en salle Les Bronzés et Les Bronzés font du ski. On sent bien ici que les deux réalisateurs ont été influencés, peut-être sans s'en rendre compte, par les comédies des années 1980 de Patrice Leconte.
Non seulement ce film nous montre que le cinéma français est capable de rivaliser avec les plus grandes comédies américaines, mais surtout qu'il existe en France des acteurs et des réalisateurs, qui prennent encore le plaisir de divertir leur public sans l'abrutir. De plus, le fait de peindre si soigneusement nos moeurs actuelles témoigne du soin apporté par les deux réalisateurs à leur scénario.
J'attends avec impatience leur prochaine collaboration !
Vu le 6 mai 2009, à l'Elysées Biarritz
Note de Mulder: