Commis d'office

Commis d'office
Titre original:Commis d'office
Réalisateur:Hannelore Cayre
Sortie:Cinéma
Durée:91 minutes
Date:06 mai 2009
Note:
Antoine Lahoud plaide depuis de nombreuses années comme avocat pénaliste devant la cour de Paris. Le plus souvent assigné en tant que commis d'office, il gagne assez peu d'argent avec ses affaires minables de stupéfiants ou de proxénétisme, qui se suivent et se ressemblent. Suite à une plaidoirie brillante pour un de ces cas désespérés, il est contacté par son confrère Maître Marsac, qui, lui, ne s'intéresse qu'aux procès lucratifs. Maître Lahoud se laisse séduire par l'appât du gain, jusqu'à ce qu'il découvre pourquoi Marsac l'a réellement recruté.

Critique de Tootpadu

Le regard que la réalisatrice Hannelore Cayre porte sur le milieu judiciaire français dans son premier film est des plus alarmants. Cette ancienne avocate connaît en effet son sujet sur le bout des doigts, puisqu'elle a arpenté les couloirs du palais de justice pendant de longues années. Son entrée en la matière, sous forme de descente aux enfers du quotidien peu glorieux de l'exercice de la justice, ressemble au portrait tout aussi désabusé que Raymond Depardon avait dressé de ce milieu professionnel dans 10e chambre Instants d'audiences. Au lieu de participer au triomphe du Bien, les avocats et les juges s'épuisent dans la monotonie des procédures administratives et la punition sommaire d'individus, dont la société ne veut plus depuis longtemps.
Comment sortir de cette crise profonde de l'appareil judiciaire ? Mystère. Après avoir astucieusement campé son décor, la réalisatrice ne se préoccupe même plus tellement de ses dysfonctionnements. A la place, elle dissèque son pouvoir corrupteur sur un individu pas du tout dupe, mais qui n'en peut plus de patauger littéralement dans la merde de la république. Antoine Lahoud aimerait bien avoir les moyens pour défendre convenablement les intérêts de ses clients. Mais le système est ainsi fait que seuls ceux qui se placent du côté de l'argent, aussi sale soit-il, peuvent faire pencher en leur faveur la balance d'une Thémis plus du tout impartiale.
De ce constat sombre naît le deuxième fil de l'histoire, qui ressemble davantage à un fait divers policier conventionnel. Faute de pouvoir exceller légalement dans sa profession, le Maître aigri cherche alors à exploiter à son profit les arcanes de son fonctionnement. Tout cela pour se retrouver en fin de compte là où il avait commencé, à la différence cruciale près, qu'il est toujours plus aisé d'afficher un engagement humaniste, si la survie matérielle n'en dépend pas.
Ce semblant de morale tordu ne fait cependant pas démériter la facture générale de Commis d'office. Porté d'emblée par la bande originale vive de Charlie Nguyen Kim, le ton du film reste en effet fidèle au regard narquois avec lequel Hannelore Cayre observe son ancien métier. Cette ironie désabusée se retrouve également au niveau de l'interprétation de Roschdy Zem, toujours aussi fiable et crédible, qui nous subjugue une fois de plus par son jeu plein d'humanité et sans la moindre fausse note.

Vu le 14 avril 2009, au Club Marbeuf

Note de Tootpadu: