Who's that knocking at my door

Who's that knocking at my door
Titre original:Who's that knocking at my door
Réalisateur:Martin Scorsese
Sortie:Cinéma
Durée:90 minutes
Date:10 juin 2009
Note:
J.R., actuellement entre deux boulots comme il dit, traîne avec ses potes Harry et Sally Gaga dans les rues de New York. De retour d'une visite chez sa mère, il rencontre sur le ferry une fille dont il tombe amoureux. Après être sorti avec elle pendant quelque temps, J.R. envisage de l'épouser. Mais elle lui fait une révélation pénible sur son passé, qu'il a du mal à accepter.

Critique de Tootpadu

Tout y est déjà, dans ce premier film de Martin Scorsese, tourné en 1968 et qui sort enfin au cinéma en France, sous forme d'une leçon essentielle de rattrapage, comme le fut Mala noche il y a trois ans. Et comme pour les débuts de Gus Van Sant, nous avions déjà découvert ce coup de jeune maître il y a une vingtaine d'années dans notre pays natal. La vivacité formelle de Who's that knocking at my door nous a alors permis de confirmer tout le bien qu'on pense de lui.
Le véritable terrain de jeu d'un metteur en scène exubérant, ce film indique magistralement tous les éléments qui allaient faire par la suite - et jusqu'à nos jours, quarante ans et vingt films plus tard - la réputation du cinéma selon Martin Scorsese. Les prouesses stylistiques prennent d'emblée le dessus sur le développement scénaristique. Tandis que l'action du film se laisse résumer en peu de phrases, il faudrait des pages entières pour venir à bout de sa complexité formelle. Le récit est tellement nerveux, voire instable, que les excès symboliques sont balayés facilement par le rythme endiablé de la narration.
Le style "coup de poing" de Scorsese ne se complaît cependant pas à tourner à vide à la surface de son drame romantique dans les rues de New York. Il s'investit plutôt corps et âme dans l'exploration des grandes obsessions de l'oeuvre futur du réalisateur. Placer une madone dans le premier plan de son premier film est une affirmation de ses préoccupations thématiques au moins aussi claire que le détournement de cette séquence sur le rôle de la mère par une musique agressive. Ces figures de style qui formeront la base du cinéma de Scorsese, comme l'emploi récurrent de chansons emblématiques, un montage qui assure à lui seul toute la valeur significative du récit, et une approche chorale des personnages, tel qu'on la retrouvera par exemple dans Mean streets ou Les Affranchis, font de ce film embryonnaire une formidable esquisse à l'état brut.
Le drame humain, qui se déchaîne sous la surface de l'exagération formelle consciente et même voulue, est porté avec une sincérité à fleur de peau par un jeune Harvey Keitel magnifique, lui aussi débutant à l'époque. En quelque sorte, son rôle de petite frappe complexée annonce avec force son interprétation magistrale, encore plus crue, dans Bad lieutenant d'Abel Ferrara presqu'un quart de siècle plus tard.

Revu le 5 mai 2009, au Club Marbeuf, en VO

Note de Tootpadu: