Revanche

Revanche
Titre original:Revanche
Réalisateur:Götz Spielmann
Sortie:Cinéma
Durée:122 minutes
Date:11 mars 2009
Note:
Alex travaille comme videur dans un bordel du "quartier rouge" de Vienne. Il est amoureux de Tamara, une prostituée ukrainienne qui y travaille. Pour résoudre les problèmes d'argent de son amie et partir sur de nouvelles bases à l'étranger, Alex planifie le cambriolage d'une banque dans un petit village à la campagne. D'abord hésitante, Tamara décide finalement de le suivre dans son projet téméraire.

Critique de Tootpadu

Il doit y avoir quelque chose d'irrésistible dans la prostitution ukrainienne, pour que le deuxième film autrichien à sortir en France de suite s'y intéresse longuement. Après l'Import export de Ulrich Seidl, voici un autre film qui réserve une place de choix à l'exploitation sexuelle des immigrées de l'Est. Les points communs entre ces deux films s'arrêtent cependant là, bien qu'ils transpirent tous les deux une résignation désabusée qui caractérise durablement le cinéma autrichien de ces dernières années.
Revanche se consacre à l'exploration prenante de dilemmes moraux dans un monde écartelé entre l'ancien et le nouveau, entre la campagne croyante et traditionnelle et la ville matérialiste et nihiliste. Pas vraiment un adepte des oppositions simplistes, le réalisateur Götz Spielmann excelle plutôt dans l'éclaircissement sans naïveté des zones d'ombres des personnages habituellement catalogués comme les bons ou les méchants. Pour y parvenir, son récit se construit à partir d'une certaine décomposition de la virilité. Vus de près, tous les personnages masculins, à l'exception notable du grand-père le gardien d'un style de vie appelé à disparaître, sont en effet des chiffes molles. Ils sont incapables de mener à bout leur plan, qu'il relève du crime ou de la procréation dans le cadre familial. Dans cet univers déprimant, les femmes ne tiennent pas non plus les rênes de l'intrigue. Elles savent néanmoins provoquer de brefs instants de soulagement et d'assouvissement sexuel.
Décrit de la sorte, ce film intense paraît être une bien sordide affaire. Sauf que la mise en scène très maîtrisée ne laisse jamais glisser la narration vers les bassesses glauques auxquelles elle se prêterait facilement. Le point culminant du film n'est ni une boucherie, ni une orgie, ni même une demande de pardon pleurnicharde. Götz Spielmann dispose de la sagesse filmique rare de conclure son film sur une mise à nu des sentiments, qui laisse les deux personnages centraux, et dans une moindre mesure le spectateur, à fleur de peau. C'était donc cela la finalité narrative d'un film à la mécanique implacable : ce moment de vérité qui transcende tous les coups tordus qui l'ont précédé.
Quant à la nomination de ce film à l'Oscar du Meilleur film étranger, si elle est méritée, elle nous laisse cependant perplexes. Emotionnellement distant et situé de nos jours, dans la banalité de la vie campagnarde autrichienne, Revanche véhicule en effet une image de son pays qui n'a rien de valorisant. A la fois par son style très sobre et son sujet adulte, ce n'est pas vraiment le genre de film que l'on s'attend à voir invité à la célébration de la qualité consensuelle du cinéma américain.

Vu le 29 janvier 2009, à la Salle MK2, en VO

Note de Tootpadu: