
Titre original: | Des poupées et des anges |
Réalisateur: | Nora Hamdi |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 102 minutes |
Date: | 25 juin 2008 |
Note: | |
Depuis qu'elle a quatorze ans, son père ne regarde plus Cherine de la même façon. Auparavant sa fille préférée, elle met désormais son corps de jeune femme en valeur d'une manière qui déplaît fortement à cet homme violent. De ce mutisme qui dure depuis quatre ans, toute la famille trinque. Surtout Lya, la soeur cadette, qui a trouvé dans les sports de combat sa façon personnelle d'exorciser les pressions et les coups qu'elle subit chez elle.
Critique de Tootpadu
Ce premier film, l'adaptation d'un roman par son auteur, souffre d'une lacune majeure, qui affaiblit considérablement les quelques éléments prometteurs qu'il contient. La fuite de ces deux filles de leur foyer et de leur cité prend en effet comme point de départ la haine de leur père, peu importe qu'elle s'exprime par l'opposition violente ou par le deuil désespéré de la perte de l'attention. Cette figure paternelle, bornée et violente, se trouve par conséquent au point névralgique du film. C'est à partir d'elle que les femmes de l'histoire prennent position. Et c'est du poids de culpabilité ou d'autorité qu'elle dégage, qu'elles devront s'affranchir. Le choix de Samy Naceri pour interpréter ce rôle secondaire, mais crucial, s'avère alors plus que préjudiciable.
En dehors de la série des Taxi et de sa vie privée criminelle, amplement relayée dans les médias, Naceri n'a fait que très rarement preuve de son talent dramatique. On lui accorderait au mieux ses prestations dans Nid de guêpes, La Mentale et Indigènes pour asseoir sa légitimité de comédien. Ici, il n'est clairement pas à la hauteur d'un rôle, qui requiert à la fois de la violence aveugle et une mise en question très progressive. Pour incarner crédiblement ce personnage, peut-être au fond le plus malheureux dans l'histoire, à cause de son incapacité de tenir convenablement sa famille et de la haine qu'il essuye en retour de ses actes méprisables, il manque la carrure et la maturité à Naceri. D'une apparence trop jeune, trop soignée et trop superficielle pour être un père ouvrier colérique et borné, Naceri n'arrive à aucun moment à s'approprier réellement ce rôle, pourtant pas extraordinaire. De ce manque d'authenticité et de crédibilité, toute la construction du film pâtit douloureusement.
Nora Hamdi n'a pas été plus heureuse dans la sélection de ses autres comédiens confirmés. Samuel Le Bihan et Fejria Deliba sont toujours à deux doigts du cabotinage, au lieu d'habiter solidement leur personnage. Heureusement, les deux héroïnes s'en sortent infiniment mieux ! La rage de Leïla Bekhti est palpable, notamment dans ses monologues furieux, sous forme de slam, sur le toit de son immeuble. Et la beauté incontestable de Karina Testa n'ignore nullement le dilemme social et émotionnel, qui fait souffrir cette adolescente dans le corps d'une femme ravissante.
Grâce à ces deux révélations tout à fait remarquables, le film arrive à se libérer de ses contraintes formelles. Le rythme narratif n'est ainsi pas le fort de Nora Hamdi, particulièrement maladroite dans les transitions elliptiques. Mais la lourdeur et le manque de naturel de certaines répliques sont plutôt rattrapés par un regard sans préjugés sur la vie en cité. S'il ne fallait retenir qu'une chose de Des poupées et des anges, comme il vaut en effet mieux oublier ses nombreux défauts précités, ce serait qu'il permet de voir une génération, émergeant de la banlieue défavorisée, sans oeillères, ni misérabilisme, ni condescendance.
Vu le 21 mai 2008, au Club Marbeuf
Note de Tootpadu: