Funny Games U.S.

Funny Games U.S.
Titre original:Funny Games U.S.
Réalisateur:Michael Haneke
Sortie:Cinéma
Durée:111 minutes
Date:23 avril 2008
Note:
Ann et George Faber se rendent comme tous les ans à la campagne, pour y passer l'été dans leur maison secondaire avec leur fils Georgie. A peine installés, ils reçoivent la visite de deux garçons, Peter et Paul, qui sont apparemment des invités de leurs voisins. Cette rencontre fortuite dégénère rapidement en un jeu perfide pour la survie des Faber.

Critique de Tootpadu

Michael Haneke est actuellement le plus grand cinéaste de la perversité humaine. Que ce soit dans La Pianiste, Caché ou ce remake de son propre film d'il y a dix ans, qu'il nous reste à découvrir, le réalisateur autrichien sonde les multiples défauts du caractère humain et de la vie en société, avec une noirceur invariablement virtuose. On cherchera en vain chez lui des fins heureuses. Ses films sont davantage des études déprimantes, si ce n'était pour la maîtrise de leur exécution formelle, sur les aspects irrécupérables de la nature humaine.
Les contrastes sont ainsi d'emblée exacerbés dans ce premier film anglophone de Haneke. Au jeu familial des morceaux d'opéra à reconnaître pendant le trajet, presque mignon par sa naïveté, succède d'abord l'agression sonore de la chanson rock, avant que tout ce beau monde ne s'écroule misérablement, à travers une série de jeux infiniment plus pervers. L'échange ludique, point édifiant évidemment, ne concerne cependant pas uniquement le rapport de force écrasant entre les agresseurs et les victimes. Par quelques figures de style sans doute platement voyantes entre les mains d'un réalisateur moins doué que Haneke, comme l'adresse à la caméra de la part de Paul à plusieurs reprises ou le retour en arrière lors de l'unique séquence susceptible de renverser la situation, le récit interpelle directement le spectateur dans son confort d'observateur, extérieur à l'action. Cette implication s'opère par contre surtout à un niveau psychologique et ainsi plus viscéral dans son état d'esprit tordu, puisque la tentation du voyeurisme face au corps dénudé est volontairement écartée.
Par ailleurs, tout comme l'humiliation féminine d'Ann se passe hors cadre, la plupart des atrocités commises par les deux intrus ont lieu hors champ. En dehors d'un enrichissement considérable de la bande son, ce procédé permet de mettre encore un peu plus le spectateur à l'épreuve. Comme si l'anéantissement du modèle familial et de l'ordre civilisé en un rien de temps ne suffisait pas, Haneke s'applique à un jeu formel à la perfidie pas moins insoutenable, que celle avec laquelle ces deux représentants d'une génération inquiétante s'acharnent sur l'univers préservé des Faber. Les relâchements de la tension, après des périodes de stress atroce, sont ainsi les leurres puissants d'une narration, qui excelle dans l'évocation nihiliste du cauchemar suprême des adeptes d'un monde intact et rassurant.

Vu le 12 mai 2008, au MK2 Bibliothèque, Salle 2, en VO

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

A vrai dire, ce n’est que le deuxième film de Michael Haneke que je vois en salle. Le premier fut La Pianiste, qui ne m’avait pas réellement convaincu, hormis le jeu excellent de Isabelle Huppert. Dans ce remake américain d’un de ses précédents films, qu’il met lui-même en scène avec le même découpage visuel, les mêmes scènes, les mêmes dialogues, la seule réelle différence est son casting américain. La force de ce film tient au jeu réellement convaincant des cinq comédiens (deux tueurs, la famille de trois personnes) et surtout à celui de Naomi Watts, qui montre qu’elle est bien une des meilleures actrices de sa génération, à l’égal d’une Mery Streep ou d’une Nicole Kidman. Nous voyons dans ce film l’empreinte visible de John Carpenter : tout est suggéré, y compris la mort de ce couple au fusil à pompe. Dire que cela salit leur télévision est tout dire.

Ce film est donc un des films les plus flippants que j’ai pu voir depuis longtemps. A l’instar de REC, l’horreur est ici plus psychologique que physique. Le réalisateur joue avec les nerfs de ses spectateurs avec un tel enthousiasme, qu’il attire notre coopération totale. La scène du rembobinage via une télécommande vers la fin du film est une idée purement géniale ! De même, lorsque l’un des tueurs s’adresse à la salle en nous disant que nous devons en avoir pour notre argent est une idée à reprendre pour d’autres films …

Le seul bémol que je porterais à ce petit chef-d’œuvre est le fait qu'il est d’une immoralité puante. Le réalisateur semble porter en estime ces tueurs et semble haïr l’idée de famille. A aucun moment, il ne retourne l’action et fait que la famille peut réellement tuer ses deux tueurs en série … Certes, c’est un petit bémol mais je tenais à le faire remarquer.

Reste que ce film est à voir en salle et à revoir pour montrer comment faire monter au fur et à mesure un climat malsain !

Vu le 26 avril 2008, au Gaumont Disney Village, Salle 12, en VF

Note de Mulder: