
Titre original: | Ulzhan |
Réalisateur: | Volker Schlöndorff |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 105 minutes |
Date: | 23 avril 2008 |
Note: | |
Charles Simon arrive au Kazakhstan en voiture. Une fois tombé en panne d'essence, il l'abandonne, ainsi que tous ses papiers et tout ce qui le relie à son existence en France, pour traverser à pied les steppes interminables du pays. Il veut être seul, disparaître, effacer ses traces, à moins qu'il ne soit réellement en quête d'un trésor caché dans les montagnes. Sur la route, il croise des compagnons de voyage involontaires, comme Shakuni, le marchand de mots, et Ulzhan, qui lui vend son cheval.
Critique de Tootpadu
La recherche de la quiétude d'esprit, à l'écart du brouhaha de la civilisation, n'est pas la première fois au centre d'un film cette année. Avant cette errance mélancolique et majestueuse à travers un Kazakhstan lointain, un autre personnage en quête de quelque chose, qui n'était pas forcément lui-même, s'était perdu dans les étendues enneigées de l'Alaska. Sauf que Ulzhan se situe aux antipodes esthétiques et narratives d'Into the Wild, ou pour le dire clairement, il réussit partout où le film de Sean Penn avait échoué assez misérablement.
D'abord, en termes visuelles, la mise en scène de Volker Schlöndorff sait rendre compte du paysage désolé du Kazakhstan avec l'oeil attentif de l'observateur, qui ne se cache pas des laideurs relatives aux vestiges du passage de l'homme, comme les kolkhozes abandonnés, les champs de pétrole déserts ou les terrains contaminés par la radiation, mais qui excelle dans leur inclusion dans un aperçu général profondément beau et plastiquement fascinant. C'est à travers son rôle dans ces décors pour la plupart naturels que le protagoniste s'identifie auprès du spectateur, par le biais du regard qu'il porte sur ce pays étranger et sur son propre statut d'étranger déraciné, et non pas par des conversations interminables. En réalisateur avisé et largement expérimenté, Schlöndorff s'appuie sur la force suggestive des images avec une aisance et une confiance qui font le plus grand bien à l'esprit et à l'oeil du spectateur !
Mais Ulzhan n'est pas qu'un film joli à regarder. Son ton, qui respire pleinement une pesanteur, que nous appelerions par défaut typiquement allemande, agit comme un conte réfléchi et lucide sur l'état du monde. Déjà à moitié parti de son existence terrestre, puisqu'il n'éprouve plus grand-chose au niveau émotionnel, Charles traverse le pays tel un observateur incrédule. Alors que son âme est remplie de chagrin et que ses jambes sont lourdes de fatigue, il découvre quelque chose loin de chez lui qui ressemble à s'y méprendre à des répliques des secousses de la vie. Une vie qui n'a rien d'exubérant ou de platement romantique, mais plutôt une façon d'être qui s'attache à autre chose qu'aux jeux de pouvoir et d'argent qui gouvernent le nouveau Kazakhstan, personnifié par la capitale moderne et artificielle. Il ne s'agit pas ici d'un retour aux sources ou à un idéal caricatural de la nature, comme dans le film de Penn, mais plutôt d'un magnifique état de suspension entre la vie, qui n'est plus, et la mort, qui n'est pas encore.
Vu le 3 mars 2008, au Club 13
Note de Tootpadu: