
Titre original: | Lust Caution |
Réalisateur: | Ang Lee |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 158 minutes |
Date: | 16 janvier 2008 |
Note: | |
Hong Kong, 1938. La jeune Wong Chia Chi se joint à un groupe d'étudiants patriotiques, sous la direction du fanatique Kuang Yu Min, qui présente des pièces de théâtre pour soutenir l'effort de guerre contre les Japonais. Lorsque Kuang décide de donner une direction plus militante au groupe, Wong le suit. En tant qu'espions amateurs, les étudiants tentent d'approcher M. Yee, un haut responsable et collaborateur, et de l'assassiner. Mais avant qu'ils puissent mettre leur plan à exécution, Yee part pour Shanghai. Profondément compromise dans la séduction de Yee, Wong quitte alors le groupe. Quelques années plus tard, ses amis reviennent vers elle pour infiltrer à nouveau l'entourage de Yee, désormais responsable de la sécurité intérieure.
Critique de Tootpadu
Ang Lee a beau alterner les genres, il se dessine de plus en plus, film après film, comme le maître incontesté des drames sentimentaux tortueux. Pour son deuxième Lion d'or de Venise consécutif, il se jette à corps perdu dans une histoire, dont la cruauté et la laideur sont sublimés magnifiquement par le doute et une forme une fois de plus irréprochable.
La relation qui lie Wong à Yee, une variation sur le même genre de dépendance et de soumission que la mission d'Ingrid Bergman dans Les Enchaînés de Hitchcock, met en effet beaucoup de temps avant de montrer son vrai visage. D'ici là, Wong avance insidieusement, sans que l'on sache vraiment ce qu'elle éprouve envers sa proie. Le rapport de force entre les deux amants est des plus complexes, ne serait-ce qu'à cause de la brutalité avec laquelle Yee pratique ses jeux sexuels. Les nombreuses scènes intimes se déroulent ainsi avec une violence, qui romp clairement avec la convention affective et qui s'inscrit dans la continuité de celle de The Player de Robert Altman, rapprochée à l'époque par un des nos confrères du découpage habituel d'une scène de meurtre. Toutefois, quelque part entre la manipulation, le calcul et les pulsions animales se cache, peut-être, un lien plus profond et plus sincère.
Dès la première séquence, un jeu de mah-jong au montage endiablé qui campe magistralement le décor, la mise en scène d'Ang Lee nous entraîne dans sa narration posée et intense. D'ailleurs, le tout premier plan d'un berger allemand qui observe est emblématique de ce film, où toutes les ruses sont permises pour nuire à l'ennemi, quitte à se perdre soi-même. L'emploi de Wong comme source d'informations dans la gueule du loup nous rappelle évidemment celui de Rachel Stein dans l'excellent Black Book de Paul Verhoeven. En comparaison, le ton de Lee est cependant bien plus pondérant et tortueux que l'exaltation jouissive du Hollandais.
Lust, Caution reste néanmoins un film magnifiquement beau et juste dans son refus systématique du bonheur. Servi par une photo, une musique et un montage exquis, ainsi que par des interprétations d'une intensité douloureuse, il confirme une fois de plus le talent hors normes d'Ang Lee d'aller au fond émotionnel d'histoires, qui ne sont conventionnelles qu'en apparence.
Vu le 21 décembre 2007, à la Salle UGC, en VO
Revu le 13 août 2009, en DVD, en VO
Revu le 26 novembre 2009, en DVD, en VO
Note de Tootpadu: