Itinéraires

Itinéraires
Titre original:Itinéraires
Réalisateur:Christophe Otzenberger
Sortie:Cinéma
Durée:94 minutes
Date:22 février 2006
Note:
Après une première condamnation et peine de prison pour complicité de meurtre, le jeune Thierry bénéfice d'une liberté conditionnelle qui l'oblige de retourner vivre chez ses parents. Contraint de se tenir à carreau, le jeune homme impulsif supporte mal les reproches de son père alcoolique. Lorsqu'il est injustement associé à un autre crime, Thierry prend la fuite et se cache dans un petit village.

Critique de Tootpadu

Quel film ! Et quelle prestation du jeune Yann Trégouët ! Quel plaisir enfin de découvrir un cinéaste auparavant spécialisé dans le documentaire et le court-métrage ("Le vigneron français" dans lequel Roschdy Zem devait renier ses origines afin de vendre du vin) à travers un film aussi maîtrisé et beau ! Cette histoire d'un jeune en fuite et accablé par son sombre passé prouve une fois de plus que les meilleures surprises se trouvent là où on les attend le moins. Il a beau ne pas payer de mine (affiche très médiocre, distribution probablement confidentielle), Itinéraires est bel et bien la première véritable révélation de l'année, en compagnie d'oeuvres tout aussi remarquables qui disposaient au moins d'un indice de grandeur.
La comparaison avec d'autres films, comme Thelma & Louise pour la traque d'un innocent, La 25ème heure pour le ton pesant qui ne laisse à aucun moment oublier l'épée de Damoclès qui menace Thierry, ou bien Le Clan qui est également porté par un protagoniste jeune et impulsif, ne dessert pas le film de Christophe Otzenberger. Cependant, son récit fascinant opère selon des règles qui lui sont propres et qui incorporent à chaque instant une dose exacte d'originalité et de banalité afin de maintenir un équilibre exquis du ton. Le destin de Thierry n'a rien d'exceptionnel, mais par la vivacité de la mise en scène et par la force humaine subjuguante de tous les personnages, jusqu'au plus petit rôle, son histoire nous passionne. Vous ne trouverez pas de grands sentiments ici, ni de décors urbains ou campagnards surchargés de sens, mais simplement le combat quotidien d'une bête traquée dans un décor sans éclat. C'est ce refus de la pose et de la tension triviale qui nous a convaincus de la sincérité et de l'honnêteté artistique du film et de ses créateurs.
Sans Yann Trégouët, phénoménal, excellent, inquiétant, écorché à vif et digne de tous les superlatifs, cette oeuvre aurait sans doute fortement faibli. Depuis Nicolas Cazalé dans le film de Gaël Morel cité plus haut, nous n'avons pas eu le bonheur de voir un jeune comédien français aussi habité par son rôle, aussi peu frileux pour sonder les troubles intimes de son personnage et pour garder en même temps une part de mystère ! Espérons que ce rôle majeur lui servira de tremplin pour remuer la jeune génération dramatique de chez nous qui manque de cette intensité perturbée et de cette innocence perdue si irrésistibles.
Du cinéma français comme nous l'aimons, tout simplement !!!

Vu le 14 février 2006, au Club de l'Etoile

Note de Tootpadu: