Twelve

Twelve
Titre original:Twelve
Réalisateur:Joel Schumacher
Sortie:Cinéma
Durée:94 minutes
Date:08 septembre 2010
Note:
Un an après la mort de sa mère d’un cancer, le jeune White Mike a quitté l’école et est devenu un des dealers les plus sollicités des quartiers huppés de New York. Alors que son cousin Charlie est lui-même un toxicomane irascible et que son ami d’enfance Hunter cherche à exorciser sa honte d’être un fils de riche en affrontant les jeunes de Harlem sur le terrain de basket, White Mike reste sobre dans ses affaires en faisant profil bas. Les choses commencent à dégénérer avec l’apparition d’une nouvelle drogue, Twelve, à cause de laquelle Charlie est abattu de sang froid par Lionel, le fournisseur de White Mike. Pendant que Hunter est accusé à tort du meurtre, Sara Ludlow, la fille la plus belle et populaire du lycée, veut organiser la fête de son 18ème anniversaire chez Chris, dont le frère Claude vient de débarquer, après avoir fugué d’un centre de redressement.

Critique de Tootpadu

Selon notre théorie personnelle, qui veut que Joel Schumacher soit capable de créer comme par miracle un film majeur par décennie, au sein d’une filmographie qui accumule autrement les navets pénibles, le réalisateur prend sérieusement du retard pour nous convaincre à nouveau de ses capacités intermittentes, plus de dix ans après son dernier coup de maître, Tigerland. Ce n’est hélas pas cette adaptation clinquante du roman de Nick McDonnell, qui nous fera reprendre espoir ou nous laissera au moins patienter convenablement. Aussi creux que l’existence des personnages adolescents qu’il décrit, le style de Joel Schumacher cherche vainement à être en phase avec une génération qu’il a peut-être la volonté, mais visiblement plus la faculté de comprendre réellement. Son portrait de l’âge ingrat juste avant le passage à la vie d’adulte s’efforce certes à retracer la vacuité qui définit le quotidien d’une jeunesse qui a tout, d’un point de vue matériel, tout en souffrant de l’absence flagrante de valeurs repères – autres que le culte de la célébrité et de la beauté extérieure – et d’un investissement affectif sincère. Mais la pléthore d’effets de style dont il se sert pour conférer une identité esthétique à l’état de flottement existentiel de ses personnages immatures ne sert en fin de compte qu’à exacerber le ton prétentieux de Twelve.
L’emploi prohibitif de la voix off, à laquelle Kiefer Sutherland apporte de surcroît une sorte de sagesse désabusée en contradiction directe avec le fourvoiement de ces jeunes sans but, n’est alors que la pointe de l’iceberg. Le découpage de l’intrigue par jour, abandonné abruptement après le carnage du samedi, la structure temporelle qui remplace le crescendo dramatique propre à la linéarité par quelque chose d’infiniment plus brouillon, truffé de souvenirs subjectifs et de flashs mentaux peu fins, ainsi que le dépouillement absolu du décor dès que la mort de la mère de White Mike est évoquée – sans oublier la séquence la plus grotesque du film, pendant laquelle Jessica, passablement défoncée, discute de son suicide avec sa collection de nounours – : tout cela participe à enterrer le film sous une couche épaisse de pseudo-philosophie branchée, jamais plus évidente que lors de la conclusion, qui incite le protagoniste à « vivre la meilleure vie possible ». Ces jeunes peuvent évidemment être considérés comme le produit de la déchéance de la civilisation occidentale, matérialiste et nihiliste. La glace que Joel Schumacher leur tend avec une complaisance trop prononcée ne nous renvoie pourtant qu’une image déplaisante. Elle ne l’est pas nécessairement à cause de l’état d’esprit désespérément futile de cette génération perdue, mais surtout parce que la mise en scène ne redouble pas d’effort pour gratter plus en profondeur, afin de trouver les vestiges d’une humanité authentique en dessous des couches multiples de paillettes et de la fuite de la réalité à travers la drogue.
Nous disons donc « patience » à tous ceux qui attendent toujours le grand retour de moins en moins probable de Joel Schumacher. Ce projet aurait pu lui fournir le canevas sur lequel exprimer les préférences et les préoccupations d’un réalisateur à l’âme indépendante comme lui. Hélas, c’est une fois de plus son goût pour l’excès formel qui a eu raison d’un portrait cru sur une jeunesse en panne de maturité. Ainsi, ce serait plutôt le réalisateur qui en manque. D’un, parce qu’il ne sait toujours pas dompter sa démesure formelle pour la mettre au service de l’intrigue, au lieu de se complaire dans des poses sans fondement narratif. Et de deux, parce que sa prétendue jeunesse d’esprit cache mal la rupture qui existe forcément entre un réalisateur septuagénaire et un sujet qui se veut l’expression d’une culture adolescente contemporaine, encore plus périssable que l’aptitude cinématographique de Joel Schumacher.

Vu le 18 août 2010, à la Salle Gaumont - Louis Feuillade, en VO

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

Après avoir pratiquement réussi à détruire le mythe de Batman dans les années 1990, Joel Schumacher s'attaque cette fois-ci au film d'étudiants branchés et décérébrés, que l'on aurait presque envie de plaindre, s’ils n'étaient pas aussi risible et imbus d'eux-mêmes.

Un dealer de substances illicites, ses altercations avec des jeunes de son entourage, et surtout les méfaits d'une drogue dure, la Twelve, sont la clé de voûte de ce film. Nous comprenons mieux pour quelle raison ce film – filmé sans grande conviction et avec une voix off persistante et irritante, qui desservit le rythme – est resté deux bonnes années dans un tiroir de la production.

Certes, les rebondissements liés au meurtre du cousin du personnage principal et l'apothéose finale (on regrette qu'il y ait trop de survivants, vu le jeu de certains d'entre eux) apportent pour un temps un peu d'intérêt à ce film, mais pas suffisamment pour que l'on souhaite le revoir.

Joel Schumacher n'arrive donc pas á se renouveler et ce n'est pas avec ce film que les choses changeront.

Vu le 5 septembre 2010, au Morny, Salle 1, Deauville, en VO

Note de Mulder: