Chaque année, le Festival du Cinéma Américain de Deauville consacre une place aux documentaires qui interrogent notre monde avec urgence, poésie et souvent avec une intimité brute que la fiction ne peut reproduire. L'édition 2025, qui se tiendra du 6 au 14 septembre, présente une sélection particulièrement marquante, qui équilibre conflits géopolitiques, parcours profondément personnels, témoignages environnementaux et hommages cinématographiques à des figures qui ont marqué la culture. Ces œuvres, réalisées par des cinéastes primés et des voix émergentes, reflètent non seulement les turbulences de notre époque, mais aussi le pouvoir du cinéma à documenter, interpréter et remettre en question les récits dont nous héritons. La programmation de Deauville cette année semble souligner une vérité : le film documentaire n'est plus confiné à un coin de la non-fiction, mais est devenu l'une des artères vitales du cinéma contemporain.
Le film le plus urgent sur le plan politique de cette sélection est sans aucun doute 2000 Meters To Andriivka, réalisé par Mstyslav Tchernov, dont le nom restera à jamais associé aux images de guerre viscérales capturées pendant le siège de Marioupol. Ici, Mstyslav Tchernov tourne à nouveau sa caméra vers l'Ukraine, relatant la mission intimidante d'un peloton qui doit traverser un kilomètre de forêt fortement fortifiée afin de libérer un village stratégique. Ce voyage, à la fois claustrophobe et expansif, reflète l'incertitude totale d'une guerre qui semble sans fin. Produit par Raney Aronson, Michelle Mizner, Mstyslav Chernov et Raney Aronson-Rath, et sorti aux États-Unis en juillet 2025 par PBS Distribution, ce documentaire combine la cinématographie du réalisateur avec le montage précis de Michelle Mizner et la bande originale envoûtante de Sam Slater. Le résultat est une œuvre qui brouille les frontières entre le journalisme de guerre et le cinéma, un film que le public du festival de Deauville pourra découvrir à la fois comme un reportage et une élégie.
Après le traumatisme collectif de la guerre, le programme passe à un voyage profondément personnel et irrévérencieux avec André is an Idiot, réalisé par Tony Benna. Ce documentaire américain suit André Ricciardi qui, après avoir négligé de passer une coloscopie, reçoit un diagnostic terminal. Plutôt que de sombrer dans le désespoir, il se lance dans un voyage marqué par l'humour, l'absurdité et une curiosité pour la mort qui semble à la fois libératrice et profondément humaine. Produit par André Ricciardi, Tory Tunnell, Joshua Altman, Stelio Kitrilakis et Ben Cotner, le film porte la marque de la volonté d'A24 de soutenir des histoires non conventionnelles. Avec une photographie d'Ethan Indorf, un montage de Parker Laramie et une musique de Dan Beacon, ce film de 88 minutes refuse toute sentimentalité et explore avec une joie surprenante comment on peut embrasser la vie même face à une mort imminente. C'est le genre de documentaire qui pourrait faire rire aux larmes le public de Deauville, un équilibre que peu de films parviennent à atteindre.
Holding Liat, réalisé par Brandon Kramer, est une autre histoire d'endurance personnelle, bien que celle-ci se déroule dans l'arène géopolitique internationale. Le film retrace le calvaire de Liat Beinin Atzili, une Israélo-Américaine kidnappée le 7 octobre, et le conflit déchirant au sein de sa famille qui se bat pour obtenir sa libération. Produit par Darren Aronofsky, Lance Kramer, Yoni Brook, Ari Handel et Justin A. Gonçalves, le film explore les douloureuses intersections entre identité nationale, perte personnelle et impasse politique. Avec une photographie de Yoni Brook, un montage de Jeff Gilbert et une musique de Jordan Dykstra, ce documentaire de 97 minutes explore non seulement l'histoire d'une famille, mais aussi le paysage plus vaste et fracturé d'une région définie par des récits contradictoires. À Deauville, sa projection devrait résonner comme l'une des œuvres les plus émouvantes, démontrant comment les histoires personnelles reflètent – et humanisent – les réalités géopolitiques.
Tous les documentaires ne sont pas ancrés dans des conflits contemporains. Vertigo, écrit et réalisé par Alexandre O. Philippe, s'intéresse au cinéma lui-même et retrace la vie de Kim Novak à travers des images d'archives et sa propre voix. Produit par Terri Piñon et Alexandre O. Philippe, avec une photographie de Robert Muratore, un montage de David Lawrence et une musique de Jon Hegel, le film revisite son rôle emblématique dans Vertigo d'Alfred Hitchcock tout en explorant son retrait d'Hollywood pour mener une vie tranquille d'artiste dans l'Oregon. D'une durée de seulement 77 minutes, ce film promet d'être l'un des portraits les plus intimes d'une légende hollywoodienne depuis des années, offrant au public de Deauville à la fois nostalgie et révélation.
La sélection fait également place à un témoignage environnemental avec Lowland Kids, réalisé par Sandra Winther. Centré sur les deux derniers adolescents vivant sur l'île de Jean Charles, une île de Louisiane en train de disparaître sous le poids du changement climatique, ce documentaire est à la fois un portrait de famille et un requiem pour un paysage. Produit par William Crouse, avec une musique de Katya Mihailova, une photographie d'Andrea Gavazzi et un montage d'Eva Dubovoy et Per K. Kirkegaard, le film capture non seulement la dévastation écologique, mais aussi la résilience émotionnelle de ceux qui refusent d'abandonner leur foyer. D'une durée de 94 minutes, il s'inscrit parfaitement dans l'engagement de longue date de Deauville à présenter un cinéma américain qui traite de questions sociétales urgentes.
L'un des titres les plus attendus du festival est Orwell: 2+2=5, réalisé par Raoul Peck, cinéaste nominé aux Oscars et lauréat d'un BAFTA pour I Am Not Your Negro. Produit par Alex Gibney, Blair Foster, Tamara Rosenberg et Nick Shumaker, ce film de 119 minutes bénéficie de la coopération exclusive de la succession Orwell et cherche à présenter George Orwell non pas comme une relique de l'histoire littéraire, mais comme une voix prophétique de notre époque. Avec une photographie de Benjamin Bloodwell, Stuart Luck et Julian Schwanitz, un montage d'Alexandra Strauss et une musique d'Alexeï Aïgui, le film explore la « novlangue » autoritaire sous ses formes contemporaines, des algorithmes d'IA à la propagande d'État en passant par l'interdiction de livres dans le sud des États-Unis. Distribué par NEON aux États-Unis et prévu pour une sortie en octobre 2025, ce documentaire sera sans aucun doute l'une des œuvres phares du festival, intellectuellement provocateur et culturellement urgent.
La sélection comprend également Viktor, réalisé et tourné par Olivier Sarbil, qui dresse le portrait d'un jeune homme sourd à Kharkiv aux prises avec les premiers jours de l'invasion russe en Ukraine. Fasciné par les films de samouraïs mais empêché de faire son service militaire en raison de son handicap, Viktor devient le substitut poétique d'innombrables personnes en quête de sens au milieu de la destruction. Produit par Darren Aronofsky, Dylan Golden, Brendan Naylor, Sigrid Jonsson Dyekjær, Philippe Levasseur et Olivier Sarbil, monté par Atanas Georgiev et accompagné d'une musique de Disasterpeace, ce film de 89 minutes promet d'être une expérience visuelle profonde, qui redéfinit ce que signifie « être témoin » d'une guerre en l'absence de son.
Enfin, le film profondément émouvant Why We Dream, réalisé et produit par Meredith Danluck aux côtés de Casey Engelhardt, Matthew Shattuck et Drake Springer, offre au public de Deauville un pont vivant entre le passé et le présent. Avec une musique de Hans Zimmer et Christian Lundberg, une photographie de Jake Burghart et un montage de Brian Gersten et Ronnie Silva, ce documentaire de 93 minutes suit des vétérans centenaires de la Seconde Guerre mondiale, dont Arlester Brown, Sam Carlile, Gideon Kantor, Wally King, Jake Larson, George Mullins, Andy Negra et Betty Huffman-Rosevear, lors d'un pèlerinage en Normandie pour le 80e anniversaire du débarquement. En marchant sur les plages et dans les cimetières de France, ces vétérans se retrouvent face aux paysages où ils ont perdu leur jeunesse et où l'histoire s'est écrite. Le film ne traite pas seulement de mémoire, mais aussi de survie, d'humour et de la persévérance de la dignité humaine, même après un siècle de vie.
Ensemble, ces documentaires forment une sélection remarquablement diversifiée dans son champ d'action, mais unie par son ambition thématique. Des zones de guerre en Ukraine à la côte en voie de disparition de la Louisiane, des légendes hollywoodiennes aux avertissements orwelliens, de l'humour face à la mort à la commémoration de la survie, les documentaires de Deauville 2025 nous rappellent le pouvoir du cinéma documentaire pour informer et inspirer. Ils nous invitent non seulement à regarder, mais aussi à écouter : les individus, l'histoire et l'avenir que nous façonnons collectivement. Cette année, la section documentaire du festival n'est pas une simple annexe, mais l'un des volets les plus importants et les plus marquants du programme, prouvant qu'à Deauville, comme dans le monde, la vérité reste plus étrange, plus forte et souvent plus belle que la fiction.
2000 Meters To Andriivka
Réalisé par Mstyslav Tchernov
Produit par Raney Aronson, Michelle Mizner, Mstyslav Chernov, Raney Aronson-Rath
Musique : Sam Slater
Photographie : Mstyslav Chernov
Montage : Michelle Mizner
Sociétés de production :
Distribué par PBS Distribution (États-Unis)
Date de sortie : 25 juillet 2025 (États-Unis)
Durée : 106 minutes
Synopsis : La mission d'un peloton ukrainien : traverser un kilomètre de forêt fortement fortifiée pour libérer un village stratégique des forces russes. Un journaliste les accompagne, témoin des ravages de la guerre et de l'incertitude croissante quant à son issue.
André is an Idiot (États-Unis)
Réalisé par Tony Benna
Produit par André Ricciardi, Tory Tunnell, Joshua Altman, Stelio Kitrilakis, Ben Cotner
Musique de Dan Beacon
Photographie : Ethan Indorf
Montage : Parker Laramie
Sociétés de production : A24
Durée : 88 minutes
Synopsis : André est un génie idiot. Il est en train de mourir parce qu'il n'a pas fait de coloscopie. Son diagnostic alarmant, son irrévérence totale et sa curiosité insatiable le poussent à entreprendre un voyage inattendu pour apprendre à mourir heureux et ridiculement sans perdre son sens de l'humour.
Holding Liat (États-Unis)
Réalisé par Brandon Kramer
Produit par Darren Aronofsky, Lance Kramer, Yoni Brook, Ari Handel, Justin A. Gonçalves
Musique de Jordan Dykstra
Directeur de la photographie : Yoni Brook
Montage : Jeff Gilbert
Sociétés de production : Meridian Hill Pictures, Protozoa Pictures
Durée : 97 minutes
Synopsis : Après l'enlèvement de Liat Beinin Atzili le 7 octobre, sa famille israélo-américaine est confrontée à des points de vue divergents pour lutter pour sa libération et l'avenir des lieux qu'ils considèrent comme leur foyer.
Kim Novak’s Vertigo (France)
Écrit et réalisé par Alexandre O. Philippe
Produit par Terri Piñon, Alexandre O. Philippe
Avec : Kim Novak
Musique de Jon Hegel
Photographie : Robert Muratore
Montage : David Lawrence
Sociétés de production : Gull House Films, Medianoche Productions
Durée : 77 minutes
Synopsis : Ce film explore la vie de Kim Novak, en mettant l'accent sur son rôle dans Vertigo d'Alfred Hitchcock et son parcours, de la célébrité à une vie recluse en tant qu'artiste dans l'Oregon, à travers des images d'archives rares et les réflexions de Novak elle-même.
Lowland Kids
Écrit et réalisé par Sandra Winther
Produit par William Crouse
Musique de Katya Mihailova
Photographie : Andrea Gavazzi
Montage : Eva Dubovoy, Per K. Kirkegaard
Sociétés de production : Willy Bob Films
Durée : 94 minutes
Synopsis : Alors que le changement climatique efface la côte de la Louisiane, les deux derniers adolescents de l'île de Jean Charles se battent pour rester sur une île qui appartient à leur famille depuis des générations.
Rotten Tomatoes : https://www.rottentomatoes.com/m/lowland_kids
Orwell : 2+2=5
Réalisé par Raoul Peck
Produit par Alex Gibney, Blair Foster, Tamara Rosenberg, Nick Shumaker
Musique : Alexeï Aïgui
Photographie : Benjamin Bloodwell, Stuart Luck, Julian Schwanitz
Montage : Alexandra Strauss
Sociétés de production : Closer Media, Anonymous Content, Jigsaw Productions
Distribué par NEON (États-Unis)
Date de sortie : 3 octobre 2025 (États-Unis)
Durée : 119 minutes
Synopsis : Réalisé par Raoul Peck (I Am Not Your Negro), nominé aux Oscars® et lauréat d'un BAFTA, Orwell est le documentaire définitif sur l'auteur visionnaire George Orwell, réalisé avec la collaboration exclusive de la succession Orwell. « Qui contrôle le passé contrôle l'avenir : qui contrôle le présent contrôle le passé... », écrivait Orwell dans son roman 1984. Aujourd'hui, la « novlangue » du régime autoritaire est bien vivante et se manifeste dans des endroits inattendus, de l'essor des chatbots IA à la machine de propagande russe, des réseaux marketing des métavers commerciaux à l'interdiction politique de livres dans le sud des États-Unis. « Orwell » de Peck s'appuiera sur la vie, l'œuvre et l'héritage de George Orwell, écrivain iconoclaste et non-conformiste, pour brouiller les signaux des algorithmes devenus incontrôlables qui, au nom de la liberté individuelle, menacent de nous fermer l'esprit à des possibilités plus vastes.
Viktor (Danemark)
Réalisé par Olivier Sarbil
Produit par Darren Aronofsky, Dylan Golden, Brendan Naylor, Sigrid Jonsson Dyekjær, Philippe Levasseur, Olivier Sarbil
Musique : Disasterpeace
Photographie : Olivier Sarbil
Montage : Atanas Georgiev
Sociétés de production : Protozoa Pictures, Real Lava, Newen Studios, Time Studios, Impact Partners
Durée : 89 minutes
Synopsis : Viktor, un jeune homme sourd vivant à Kharkiv, assiste avec anxiété aux premiers jours de l'invasion russe en Ukraine. Fasciné par les films de samouraïs et nourri depuis son enfance d'histoires de guerre, il rêve de devenir combattant, mais se voit refusé à plusieurs reprises lorsqu'il tente de s'enrôler. En quête de sens, Viktor tente de trouver sa place au cœur d'une guerre qu'il ne peut entendre.
Why We Dream (États-Unis)
Réalisé par Meredith Danluck
Produit par Meredith Danluck, Meredith Danluck, Casey Engelhardt, Matthew Shattuck, Drake Springer
Avec Arlester Brown, Sam Carlile, Gideon Kantor, Wally King, Jake Larson, George Mullins, Andy Negra, Betty Huffman-Rosevear
Musique de Hans Zimmer, Christian Lundberg
Directeur de la photographie : Jake Burghart
Montage : Brian Gersten, Ronnie Silva
Sociétés de production : Pulse Films
Durée : 93 minutes
Synopsis : Lorsqu'un groupe de vétérans centenaires de la Seconde Guerre mondiale se rend en pèlerinage en Normandie pour commémorer le 80e anniversaire du débarquement, ces paysages marqués par la guerre et figés dans le temps réveillent le souvenir des vies perdues et de ceux qui ont survécu.
(Source : Communiqué de presse)