Festivals - Festival du film de Biarritz 2025 : Halfdan Ullmann Tøndel, un président du jury qui incarne l'avenir du cinéma

Par Mulder, 06 mai 2025

Depuis sa création, le Festival du film de Biarritz – nouvelles vagues s'est positionné comme bien plus qu'une simple vitrine pour les talents émergents. C'est un festival ancré dans la conviction, la vision et la volonté audacieuse de mettre en avant un cinéma qui reflète la jeunesse dans toute sa complexité. Cette année, la nomination du cinéaste et scénariste norvégien Halfdan Ullmann Tøndel à la présidence du jury n'est pas seulement un honneur distingué, c'est une affirmation audacieuse, presque poétique, de la mission fondamentale du festival. À seulement 34 ans, Tøndel s'est déjà taillé une place singulière dans le paysage cinématographique européen, non pas en s'appuyant sur la renommée de ses ancêtres – il est le petit-fils des figures emblématiques Liv Ullmann et Ingmar Bergman – mais en forgeant activement sa propre voix cinématographique. Une voix qui ne crie pas pour se faire entendre, mais murmure avec une précision étonnante, attentive aux micro-drames de la vie quotidienne, aux silences aussi puissants que n'importe quel monologue, aux dissonances privées qui révèlent les contradictions de la société moderne. Son travail ne consiste pas à reproduire un héritage, mais à le redéfinir.

La sélection de Halfdan Ullmann Tøndel ne pouvait tomber à un moment plus opportun. Son premier long métrage, La Convocation (2024), a été une véritable révélation. Récompensé par la prestigieuse Caméra d'Or au Festival de Cannes, puis par le Prix FIPRESCI Discovery aux European Film Awards, le film a captivé les critiques et les cinéphiles par son éclat discret. Autour d'un événement apparemment anodin – une altercation entre deux enfants à l'école –, le film devient une méditation profondément troublante et élégante sur le monde des adultes, filtrée par le regard innocent des enfants. C'est dans ce choix narratif que réside le génie de Tøndel : son cinéma n'est pas axé sur le spectacle, mais sur la perception, et il transforme même les histoires les plus simples en vecteurs de tension psychologique et de questionnement philosophique. Le postulat peut sembler modeste, mais l'enjeu émotionnel est profond, ce qui en fait un écho parfait aux thèmes chers à NOUVELLES VAGUES : l'esprit critique, la turbulence émotionnelle et l'énergie transformatrice de la jeunesse.

Toute l'œuvre de Tøndel, y compris ses courts métrages tels que Bird Hearts, est imprégnée d'une compréhension presque tactile de la jeunesse : son honnêteté brutale, son désir, son ambivalence. Que ce soit à travers les interactions tendues entre frères et sœurs, la maladresse des jeunes adultes en quête d'amour et d'appartenance, ou la dissonance entre les désirs personnels et les attentes sociales, il capture l'inexprimé avec une sensibilité à couper le souffle. Sa mise en scène est empreinte d'une empathie tranquille et persistante qui résiste au moralisme et laisse place à l'ambiguïté, une approche qui s'inscrit parfaitement dans l'esprit d'un festival qui ne cherche pas à définir la jeunesse, mais à la laisser s'exprimer dans toute sa contradiction chaotique et glorieuse. Pour les cinéastes émergents qui présenteront leur travail à Biarritz cette année, savoir que Tøndel sera dans le public, lui qui voit la vulnérabilité non pas comme un défaut, mais comme un moteur narratif, est à la fois rassurant et inspirant.

Au-delà de ses films, Tøndel est quelqu'un qui vit et respire le cinéma avec la profondeur de quelqu'un qui a grandi dans ce milieu, mais avec le détachement de quelqu'un qui n'a pas peur de remettre en question ses dogmes. Dans des interviews passées, il a parlé ouvertement de la pression liée à son héritage et de son choix conscient d'étudier la réalisation à la Westerdals School of Arts d'Oslo, plutôt que de suivre un parcours plus traditionnel ou prestigieux dans une école de cinéma. Cette décision à elle seule en dit long sur son engagement en faveur du métier plutôt que de l'image, de la substance plutôt que de la superficialité. À une époque où les festivals de cinéma sont trop souvent pris entre la célébration des célébrités et la promotion de la véritable innovation artistique, la nomination de Tøndel représente un alignement conscient sur cette dernière. Sa vision cinématographique du monde – que l'art doit faire ressentir avant d'enseigner, que les histoires doivent être vécues avant d'être comprises – est le type de perspective dont les jeunes cinéastes ont besoin et dont l'industrie a désespérément besoin.

Le poids symbolique de sa présidence à Biarritz réside également dans le changement subtil mais significatif qu'elle annonce : nous nous tournons désormais vers une génération de cinéastes qui ne sont pas seulement les produits de la grandeur passée, mais les voix qui façonnent une nouvelle esthétique, un nouveau langage émotionnel. Alors que le festival continue de défendre un cinéma qui ose parler aux jeunes et à travers eux, non pas par des slogans, mais par des histoires, le leadership de Tøndel sera déterminant pour donner le ton. Il apporte avec lui une rigueur nordique dans la composition et le rythme, mais aussi une fluidité émotionnelle universelle qui transcende les frontières géographiques. Avec The Communion, il a montré comment l'enfance peut être le miroir des échecs des adultes, comment des moments de calme peuvent porter le poids d'un jugement sociétal. Imaginez alors le type de conversations, le type de découvertes cinématographiques qui pourraient émerger sous sa présidence, guidées non pas par l'ego, mais par un profond respect pour le pouvoir du cinéma à provoquer, à guérir et à éveiller.

En fin de compte, ce qui fait de Halfdan Ullmann Tøndel un choix si convaincant comme président du jury, ce n'est pas seulement son talent de cinéaste, ni sa liste croissante de distinctions, mais le type de cinéaste qu'il est en train de devenir : quelqu'un qui écoute plus qu'il n'affirme, qui fait confiance au spectateur et qui croit que les plus petites histoires peuvent receler les vérités les plus profondes. Dans un monde saturé de spectacle et de bruit, son cinéma offre une pause rare, une invitation à ressentir plus profondément et à voir plus clairement. C'est précisément ce à quoi aspire depuis toujours le Festival de Biarritz – nouvelles vagues : être non seulement un festival dédié à la jeunesse, mais aussi un festival qui croit en la jeunesse comme une force – chaotique, questionnante, lumineuse – capable de transformer le cinéma de l'intérieur. Avec Halfdan Ullmann Tøndel à la barre, cette vision semble non seulement possible, mais inévitable.

Photos : ©Erika Hebbert

(Source : communiqué de presse)