Sorties-Cinema - Un ours dans le Jura : Des Neiges Blanches aux Ombres Noires

Par Mulder, 30 décembre 2024

Franck Dubosc, réalisateur et acteur de renom, s’émancipe brillamment de ses comédies habituelles avec Un ours dans le Jura, un film qui s'aventure sur le terrain glissant du film noir. Ce long-métrage, profondément ancré dans la rudesse et la beauté de la région jurassienne, suit Michel et Cathy, un couple en crise, dont l’existence morne est bouleversée par un accident fatidique. La découverte de deux millions d’euros dans le coffre d’une voiture accidentée devient le catalyseur d’une intrigue mêlant crime, secret et résurrection de leur complicité perdue. Dubosc, épaulé par Sarah Kaminsky au scénario, livre ici une œuvre à la croisée des genres, où l’humour noir côtoie un réalisme poignant. Le spectateur est transporté dans un western rural, avec la neige comme toile de fond, évoquant par moments l’univers des frères Coen auquel Dubosc rend un hommage assumé.

La force narrative du film réside dans son équilibre subtil entre la tension dramatique et des instants d'humour grinçant. Franck Dubosc dépeint un microcosme rural où chaque personnage, aussi secondaire soit-il, est imprégné d’une profondeur et d’une humanité troublantes. Benoît Poelvoorde, dans le rôle de Roland, un gendarme à la fois déterminé et fragile, illustre parfaitement cette dichotomie. Sa relation avec sa fille, complexe et empreinte d’émotion, ajoute une dimension supplémentaire au film, tout en soulignant la capacité de Dubosc à explorer les relations humaines avec une sincérité désarmante. Laure Calamy, dans le rôle de Cathy, incarne une femme qui, d’abord résignée, se découvre une force insoupçonnée. Son évolution reflète avec subtilité les mutations sociétales actuelles, tout en restant ancrée dans un réalisme brutal. Cette confrontation des failles humaines, amplifiée par l’arrivée de personnages mafieux, rappelle les codes classiques du film noir tout en y insufflant une saveur typiquement française.

Ce choix audacieux d’un décor rural enneigé n’est pas anodin. Le Jura, avec ses paysages âpres et isolés, devient un personnage à part entière, miroir des tensions internes des protagonistes. La cascade de la Billaude et les Rousses, lieux emblématiques du tournage, sont magnifiés par la photographie de Ludovic Colbeau-Justin et Dominique Fausset, qui capturent l’essence de cette France profonde. La musique de Sylvain Goldberg vient parachever cette immersion en jouant avec finesse sur les contrastes, dédramatisant parfois des scènes de violence tout en accentuant l'absurde de certaines situations. Cette dichotomie est particulièrement visible dans les séquences au club échangiste, où Dubosc, bien que novice dans ce registre, parvient à insuffler une dose de pudeur à un décor pourtant propice à l’excès.

Un ours dans le Jura brille également par ses choix de casting. Franck Dubosc s’entoure d’acteurs venus d’univers différents, apportant une fraîcheur inattendue à son récit. Kim Higelin, en tant que fille de Michel et Cathy, séduit par son originalité et sa modernité. Joséphine de Meaux, avec sa mélancolie naturelle, et Anne Le Ny, dans le rôle d’une commissaire de police, renforcent la dimension réaliste du film. Ce mélange d'acteurs confirmés et de visages moins associés au genre ajoute à l’authenticité de l’œuvre. L'alchimie entre les personnages transcende l’écran, créant un univers cohérent où chaque interaction, aussi minime soit-elle, enrichit l’intrigue principale.

Avec ce film, Franck Dubosc ne se contente pas de raconter une histoire : il interroge la morale, explore la cupidité et joue avec la zone grise de l’éthique humaine. Si l’argent catalyse les événements, il sert également de prisme pour exposer la fragilité et la résilience des relations humaines. Les dilemmes auxquels les personnages sont confrontés forcent le spectateur à s’interroger : jusqu’où irions-nous pour protéger nos secrets et améliorer nos vies ? Cette exploration de l’amoralité, loin d’être dénuée de légèreté, est traitée avec un humour décalé et surprenant, faisant de ce film une œuvre à la fois dérangeante et délicieusement divertissante.

Un ours dans le Jura marque un tournant audacieux dans la carrière de Franck Dubosc. Plus qu’une simple incursion dans le film noir, il s’agit d’un témoignage sincère de son désir de renouvellement et de liberté artistique. Avec son esthétique soignée, ses performances mémorables et son scénario à la fois poignant et absurde, le film s’impose comme une œuvre incontournable pour ceux qui apprécient les récits humains, complexes et ancrés dans une réalité crue.

Synopsis : 
Michel et Cathy, un couple usé par le temps et les difficultés financières, ne se parle plus vraiment. Jusqu’au jour où Michel, pour éviter un ours sur la route, heurte une voiture et tue les deux occupants. 2 morts et 2 millions en billets usagés dans le coffre, forcément, ça donne envie de se reparler. Et surtout de se taire.

Un ours dans le Jura
Réalisé par Franck Dubosc
Produit par
Ecrit par Franck Dubosc, Sarah Kaminsky
Avec Franck Dubosc, Rôle : Michel, Laure Calamy, Benoît Poelvoorde, Joséphine de Meaux, Kim Higelin, Mehdi Meskar, Timéo Mahaut, Emmanuelle Devos, Louka Meliava, Jean-Louis Loca , Christophe Canard , Anne Le Ny , Claire Guillon , Bérénice Sand
Musique : Sylvain Goldberg
Directeur de la photographie : Ludovic Colbeau-Justin, Dominique Fausset
Montage : Audrey Simonaud
Sociétés de production : Gaumont
Distribué par Gaumont (France),
Date de sortie : 1er janvier 2025 (France)

(Source : dossier de presse)