Max - Dune: Prophecy :  Un voyage complexe et ambitieux dans les origines des Bene Gesserit

Par Mulder, 15 novembre 2024

La série HBO Dune : Prophecy, attendue depuis longtemps, et développée par Diane Ademu-John et Alison Schapker, plonge au cœur de l'univers de Dune de Frank Herbert, en présentant l'histoire complexe des origines de l'énigmatique confrérie des Bene Gesserit. Se déroulant 10 000 ans avant l'ascension de Paul Atreides, la série cherche à démêler les jours de formation de la puissante secte, en explorant les thèmes de l'ambition, de la manipulation et de la nature corruptrice du pouvoir. Avec Emily Watson dans le rôle de Valya Harkonnen et Olivia Williams dans celui de sa sœur Tula Harkonnen, Dune : Prophecy offre un récit captivant, bien qu'inégal, qui peine à trouver un équilibre entre sa vaste portée et l'intimité de ses études de personnages.

Dune : Prophecy est une histoire d'ambition et de contrôle. Valya Harkonnen (Emily Watson) a une présence imposante, incarnant une volonté implacable de restaurer l'héritage terni de sa famille tout en façonnant l'avenir de la Confrérie. La performance nuancée d’Emily Watson ancre la série, oscillant entre une manipulatrice impitoyable et une dirigeante hantée par le poids de ses décisions. Olivia Williams la complète dans le rôle de Tula Harkonnen, une figure plus réservée mais tout aussi convaincante, dont la loyauté envers sa sœur et la confrérie cache une détermination farouche. Ensemble, elles naviguent dans les paysages politiques et personnels traîtres de l'Imperium, jetant les bases de la future domination du Bene Gesserit.

La double ligne temporelle de la série - qui retrace l'ascension des sœurs Harkonnen dans leur jeunesse, incarnées par Jessica Barden et Emma Canning, et leur consolidation ultérieure du pouvoir - fournit une structure narrative à plusieurs niveaux. Les flashbacks, en particulier dans le troisième épisode, sont parmi les moments les plus captivants, offrant un aperçu des événements qui ont façonné les sœurs. Les interprétations de Jessic Barden et Emma Canning sont sincères et brutes, contrastant avec la détermination de leurs aînées. Cette juxtaposition souligne les thèmes de la perte, de l'ambition et des sacrifices nécessaires à la survie et au pouvoir.

Cependant, Dune : Prophecy trébuche lorsqu'il sort des limites de l'histoire de la Confrérie. Les machinations politiques de l'empereur Javicco Corrino, interprété avec une menace mesurée par Mark Strong, et les intrigues secondaires tentaculaires impliquant sa fille, la princesse Ynez (Sarah-Sofie Boussnina), semblent souvent déconnectées du récit central. Alors que ces intrigues visent à étoffer l'Imperium et ses luttes de pouvoir, elles n'ont pas le poids émotionnel et la cohésion de l'arc de la Confrérie. L'arrivée de Desmond Hart, interprété avec une intensité troublante par Travis Fimmel, ajoute une couche de conflit intrigante mais peu développée. Ses mystérieux pouvoirs, acquis lors d'une rencontre éprouvante avec un ver de sable sur Arrakis, font de lui à la fois un allié potentiel et une menace imminente pour la Confrérie.

Sur le plan visuel, la série est mitigée. La direction photographie de Pierre Gill capture la grandeur de l'univers de Dune, avec ses imposantes structures monolithiques et ses paysages désolés, mais elle semble souvent limitée par rapport aux vastes panoramas des films de Denis Villeneuve. Les décors et les costumes sont méticuleusement conçus, évoquant l'esthétique austère de l'univers de Dune. Cependant, le manque d'innovation dans la construction de certains mondes - surtout si l'on tient compte de l'écart de 10 000 ans entre la série et les films - peut donner l'impression que l'univers stagne plutôt qu'il n'évolue.

Sur le plan thématique, Dune : Prophecy explore les ambiguïtés morales des méthodes du Bene Gesserit, en mettant en évidence la frontière ténue qui sépare l'orientation de la manipulation. Le programme de reproduction génétique de la Confrérie, l'utilisation de La Voix et leur influence clandestine sur l'Imperium sont explorés d'un œil critique, remettant en question l'éthique de leur quête de pouvoir. Cependant, la série faiblit parfois sous le poids de sa propre ambition, avec sa mythologie dense et son casting tentaculaire de personnages qui brouillent parfois le fil de la narration.

L'un des points forts de la série réside dans l'exploration de la relation entre Valya et Tula. Leur dynamique, marquée par l'amour, la rivalité et les traumatismes partagés, constitue le cœur émotionnel de la série. Emily Watson et Olivia Williams partagent une alchimie palpable, leurs interprétations étant empreintes de subtilité et de profondeur. Cette relation, associée aux conflits internes et aux menaces externes de la confrérie, permet au récit de rester ancré dans les enjeux cosmiques.

Malgré ses défauts, Dune : Prophecy est une expansion ambitieuse de l'univers de Dune. Cette nouvelle série offre un riche univers d'intrigues et de drames, soutenue par d'excellentes performances et un engagement à explorer les aspects les plus sombres et les plus complexes des origines du Bene Gesserit. Même si elle n'atteint pas les sommets cinématographiques des films de Denis Villeneuve, la série occupe sa propre place dans la mythologie de Dune, promettant une compréhension plus profonde des forces qui façonnent cet univers. Pour les fans de la franchise comme pour les nouveaux venus, Dune : Prophecy est un voyage fascinant, bien qu'imparfait, dans les sables du temps.

Synopsis :
Dans un futur où l'humanité a voyagé à travers la galaxie des mille planètes, une mystérieuse sororité appelée Bene Gesserit navigue dans les batailles politiques et les imbroglios de l'Imperium, poursuivant un objectif très spécifique qui mènera ses membres jusqu'à l'énigmatique planète de Dune....

Dune : Prophecy
Basé sur Great Schools of Dune de Brian Herbert, Kevin J. Anderson et Dune de Frank Herbert
Développé par Diane Ademu-John, Alison Schapker
Showrunner : Alison Schapker
Avec : Emily Watson, Olivia Williams, Jodhi May, Sarah-Sofie Boussnina, Shalom Brune-Franklin, Aoife Hinds, Travis Fimmel, Mark Strong, Jade Anouka, Chris Mason, Tabu
Musique : Volker Bertelmann
Producteurs exécutifs : Diane Ademu-John, Alison Schapker, Jon Spaihts, Scott Z. Burns, Matthew King, John Cameron, Cait Collins, Brian Herbert, Byron Merritt, Kim Herbert, Dana Calvo
Producteur : Kevin J. Anderson
Cinématographie : Pierre Gill
Sociétés de production : Cunning Hand, Annabelita Films, Legendary Television, Warner Bros. Television
Réseau : Max

(Notre critique se base sur les trois premiers épisodes)

Photos : copyright HBO