Entretiens - John Frizzell : Notre interview exclusive

Par earina, Los Angeles, 16 septembre 2016

Q : Quel est votre histoire musicale?

John Frizzell : Je n’ai jamais rien fait d’autre. En fait, c’est tout ce que je sais faire. J’ai commencé à chanter étant enfant et fait quelques opéras. J’ai chanté dans les chœurs du Met et de l’Opéra de Paris jusqu’à ce que ma voix change. Ensuite, j’ai commencé à jouer de la guitare. D’abord du rock, ensuite du jazz. Je suis allé à l’USC et ensuite à l’Ecole de Musique de Manhattan. Je suis devenu ami avec Joe PASS et j’ai étudié un peu avec lui. C’est ainsi que j’ai compris que j’étais un compositeur, pas un interprète. Il a été très clair avec moi sur le fait que je ne serai jamais un grand guitariste, et il avait raison. J’ai commencé à composer des jingles de pub et j’ai même été connu comme étant le gars à embaucher pour faire un jingle qui sonnerait comme une musique de film. J’ai ensuite travaillé sous la direction de Ryuichi Sakamoto sur la mini-série d’Oliver Stone, Wild Palms. C’est comme ça que j’ai su que je devais composer des musiques de film. J’ai sollicité James Newton Howard jusqu’à ce qu’il me laisse travailler pour lui et il m’a beaucoup appris. James m’a donné mes premiers grands travaux et il a lancé ma carrière.

Q : Vous avez travaillé avec le réalisateur français Jean-Pierre JEUNET sur Alien Résurrection. Quel genre de souvenir gardez-vous de cette collaboration ?

John Frizzell : Des magnifiques souvenirs. Des moments amusants. À cette époque, Jean-Pierre ne parlait pas beaucoup anglais (et je ne parle quasiment pas le français) alors nous avons beaucoup travaillé avec nos expressions faciales, des pouces en haut et des pouces en bas. La scène sous l’eau, dans ce film, était un véritable challenge. J’ai tout réécris de nombreuses fois.

Q : Quel est votre plus grand souvenir avec un réalisateur ou un film?

John Frizzell : J’ai adore les films que j’ai fait pour Mark RYDELL. Mark est un musicien alors il pouvait faire le lien entre les émotions et la direction musicale. J’ai composé la musique du film James Dean quelques mois après la mort de mes parents et j’étais une épave. Mark est venu me voir et m’a demandé si je voulais insuffler toute cette douleur dans le film. Il a dit qu’il y avait ce nouveau gars incroyable qui interprétait le rôle de James Dean, James Franco. Franco a gagné le Golden Globe. C’était une expérience formidable.

Q : En tant que compositeur, vous avez travaillé sur des films comme Beavis et Butt-Head se font l’Amérique (1996), le Pic de Dante (1997), Alien: résurrection (2001), 13 Fantômes (2001), Vaisseau Fantôme (2002), En Sursis (2003), The Woods (2006), Légion (2010), Texas Chainsaw 3D (2013). Comment choisissez-vous vos projets?

John Frizzell : Je pense que les films me choisissent. La chose la plus importante dans ma carrière ce sont les gens avec qui je travaille. Joel Silver, Mike Judge, Kevin Williamson, l’équipe de Screen Gems, ces relations clefs sont toute ma carrière. Je suis toujours enthousiaste à l’idée de travailler avec eux. D’autres projets, d’autres réussites et d’autres échecs. La meilleure partie dans le tournage d’un film c’est de travailler avec des gens avec qui vous êtes à l’aise, ce qui me permet de prendre des risques quitte à échouer de temps en temps et d’expérimenter afin de trouver la meilleure solution. Ce n’est donc pas vraiment le projet en lui-même mais plutôt la relation à long terme.

Q : Selon vous, pourquoi la musique est si importante dans un film ?

John Frizzell : C’est simple. La musique est, et a probablement toujours été, une partie essentielle du déroulement de l’histoire. Je parierai que, lorsque les premières histoires furent racontées, quand les premières langues furent parlées, quelqu’un tapait sur deux cailloux afin d’ajouter un effet dramatique à tout cela. C’est son travail dans sa forme actuelle. Et cela évoluera en d’autres formes. Les histoires sont le ciment social et je suis quasiment certain que la société n’existerait pas sans histoires et sans mythologie.

Q : Qu’est-ce-qui vous plaît dans la création de BO de films d’horreur?

John Frizzell : Ils me rappellent mon enfance. Haaaaa. Actuellement, les films d’horreur permettent au compositeur d’aller loin, d’explorer le plus étrange de l’étrange, le plus dissonant du dissonant, la limite de la musique même. C’est donc un type de musique hautement créatif à écrire.

Q : Dans quel studio préférez-vous enregistrer vos bandes originales et pourquoi?

John Frizzell : La ville dans laquelle nous enregistrons est souvent déterminée par le budget et les exemptions fiscales accordées aux films. Mais entre tous, mon endroit favori pour travailler est probablement Air Lyndhusrt.

Q : Quels sont les compositeurs qui sont pour vous une source d’inspiration?

John Frizzell : Il y en a beaucoup trop! Parlons juste des compositeurs de films. Jerry Goldsmith, Elmer Bernstein, John Wiliams, Ennio Morricone, James Newton Howard, Harry Greyson Williams, John Powell... Wahou... J’en oublie tellement. Mais ces gars sont incroyables. J’écoute toute sorte de musique. Country, bluegrass, rock… Tout ce que je trouve. Je n’écoute pas beaucoup de musique de films ces derniers temps. En 2014, j’ai décidé de n’écouter que les Beatles pendant toute une année et apprendre le plus de morceaux possible. C’était une bonne décision.

Q : Quelles sont pour vous les différences de travail principales entre une série et un film?

John Frizzell : Le rythme. J’aime le rythme de la TV. J’aime me lever chaque jour avoir une liste de scènes sur lesquelles je dois travailler. Composer est ce que je préfère dans ce travail. Je fais les autres trucs mais j’adore creuser. Travailler sur une série comme Following était incroyable. C’était comme
faire une bande-originale pour 45 films de Kevin Bacon.

Q : Qu’est-ce-que vous aimez dans la création d’une bande originale?

John Frizzell : Il y a toujours le frisson d’entendre un grand orchestre jouer. Clairement, les musiques de film en général sont moins orchestrales qu’il y a 10 ou 20 ans en arrière. Mais les choses changent toujours et je reste optimiste : la musique est essentielle au film. Les tendances vont et viennent. Mais les grandes bandes-originales seront toujours de grandes bandes-originales, quelque soit des tendances.

Q : Avec quels réalisateurs américains aimeriez-vous travailler et pourquoi?

John Frizzell : Mmmm… Seulement américain. OK. J’adore ce que fait Shane Black. Et j’adore ce que fait Ben Affleck. Je suis aussi un grand fan du travail de James Wan.

Q : Quels sont vos projets actuels?

C John Frizzell : onviction est une nouvelle série sur ABC. Je suis également en train de composer Leatherface, qui sera un préquel de Massacre à la tronçonneuse.

Q : Quel conseil donneriez-vous à quelqu’un qui voudrait travailler comme compositeur?

John Frizzell : Développer la musicalité. Se rappeler que travailler efficacement, pas forcément dur, est aussi important que le talent.

traduction : Earina