Conference-de-Presse - Les Vies privées de Pippa Lee

Par Mulder, Deauville, 10 septembre 2009

Q : Ce film est le très beau portrait d’une femme qui regarde son passé. Est-ce que le tournage a été pour vous une raison de vous tourner également vers votre passé ?

Rebecca Miller (réalisatrice): A partir du moment où j’ai écrit le roman, avant de faire le film, c’est une question qui me tient à cœur et je dois dire que ce n’est pas une autobiographie, mais ce film est très personnel pour moi. On va forer en soi-même. Si on ne reconstitue pas des scènes de sa vie, ce sont des choses qui viennent de moi. En tant que parents, on se pose en effet les questions de savoir si on fait bien les choses et à quel point on fait mal les choses.

Robin Wright Penn : Cette histoire de retour sur soi fonctionne pour moi pour les 37 dernières minutes, plutôt que les 37 dernières années.

Q : J’aimerais savoir si la réalisatrice qui a écrit aussi le roman a pensé en écrivant celui-ci aux comédiens, qui correspondent le mieux aux différents rôles importants. J’aimerais savoir aussi pour Robin, comment elle s’est préparée pour ce rôle aux facettes multiples.

Miller : Non en fait, ce n’est pas dans cet ordre là que cela s’est passé. J’ai d’abord écrit un roman et cela n’était rien de plus au début. En finissant d’écrire ce livre, je me suis rendue compte que je n’avais pas fini avec l’histoire et qu’il fallait trouver une continuité à ce livre. Pour moi, la meilleure forme fut d’en faire un film. J’ai adapté moi-même ce livre en scénario. A partir du moment que le scénario était écrit, j’ai commencé à penser aux personnages, aux acteurs. Dans une dernière phase, j’ai travaillé avec ma directrice de casting et on a eu la chance de trouver les bonnes personnes et que celles-ci acceptent de jouer dans ce film.

Wright Penn : Il me semble que dans la première version que j’avais lu, si je ne me trompe pas, la question se posait de l’âge du personnage que je devais incarner. Il était prévu pour Rebecca que cela soit quelqu’un d’autre qui incarne la jeunesse de Pippa. Je joue son rôle depuis l’âge de trente ans. Cette multiplicité des périodes de la vie du personnage est un des traits de ce roman. Là, on reconnaît le style extrêmement lyrique de Rebecca et le développement poétique des facettes de cette femme est quelque chose que l’on devait retrouver dans ce film.

Q : Pour enchaîner avec la question précédente : on avait parlé de la préparation du rôle. Je rends hommage au passage à Robin pour son excellente carrière. Quelle méthode utilisez-vous, Robin ? Actor’s studio ou une autre technique ?

Wright Penn : Je dirais que cela varie beaucoup en fonction des rôles. Il n’y a pas une façon générale de faire pour moi, d’autant plus que je ne suis pas quelqu’un qui a une formation de préparation et d’interprétation. Peut-être que je regrette de ne pas avoir eu cette formation, car cela vous donne un certain nombre d’outils, qui fait que vous avez un vrai travail préparatoire. Vous répétez et répétez, jusqu’à trouver la bonne interprétation. Je dois constamment me remettre en condition. Avec Rebecca, on a passé une année entière à discuter pour ce film. J’ai dû m’imprégner du rôle et de ce que j’ai lu. Une fois que vous vous êtes réellement imprégné, cela devient comme une autre peau.

Q : Ici même, il y a quelques jours, Meryl Streep disait que chaque personnage a trois dimensions. Une dimension sociale, une dimension privée et une dimension secrète. Est-ce que vous pensez que la manière dont vous avez abordé le personnage va à la recherche de ces trois dimensions ?

Miller : C’est très précisément l’approche qui a été la mienne, sans que je connaisse cette citation.

Wright Penn : Cela me fait penser à une autre citation que j’ai entendue récemment. Cette citation de Benjamin Franklin qui dit, enseignez moi et j’apprendrai, dites moi et je me rappellerai, accueillez-moi et je serai. Je pense que c’est comme cela que Rebecca écrit. Il faut qu’il y ait une seconde personne qui vous accueille, qui vous intègre pour que la troisième personne puisse naître.

Q : J’ai deux question, la première pour Rebecca : est-ce essentiel pour vous de vous inspirer d’un milieu que vous connaissez bien, car il est vraiment question de littérature et des gens qui gravitent autour ? La deuxième pour Robin : ce couple comment vous le voyez ? Est-ce un couple que vous avez aimé interpréter avec votre partenaire ?

Miller : Je crois qu’à partir du moment où on se fixe la mission de raconter une histoire, d’écrire un roman ou de faire un film, on puise dans un bain sonore dans lequel on a grandit, des choses qui ont entouré votre esprit et votre cœur et ces choses deviennent des ingrédients de votre recette. Je crois qu’immanquablement, je me suis nourri de ce qu’a été ma vie et cela collait bien avec cette histoire-là.

Wright Penn : Le couple que le personnage de Pippa constitue avec Herb est le couple au sens d’une forteresse, au sens d’une unité de sécurité de bien-être, de moyen de survie. C’est quelque chose de réel, c’est un mode de couple et c’est une des facettes de l’amour. Mais après, quand Pippa rencontre Chris, cela éveille en elle ce que son couple ne lui apporte plus : une sorte d’éveil de l’âme.

Q : Comment se font le choix et la répartition du travail pour Robin, entre les films qui sont de grands succès commerciaux et ce genre de film, où vous pouvez incarner de grands rôles ?

Wright Penn : J’aime varier le choix des films dans lequel je suis. Par exemple récemment, je me suis beaucoup amusé avec « Christmas Carol », l’impression d’être dans une cour de récré. Par contre, le rôle de Pippa, cela fait peur au bon sens du terme. C’est une responsabilité et un engagement tout autre. Il faut gagner sa vie.

Q : Quels sont vos projets, communs ou non ?

Miller : Je suis en train d’écrire un roman et en parallèle un nouveau scénario. Il se trouve que cela tourne autour de Robin.

Wright Penn : Je suis en train de tourner le nouveau film du réalisateur Randy Gardell.