
Il y a des rendez-vous qui réveillent instantanément la mémoire affective des spectateurs, et la convention Enter the Magical World, qui s’est déroulé à l’Hôtel Hilton Paris Charles de Gaulle Airport à Tremblay-en-France les 8 et 9 novembre 2025, joue exactement sur cette corde sensible. À deux pas des pistes de Roissy, un morceau de l’histoire du cinéma populaire se matérialise : les interprètes de personnages devenus compagnons de jeunesse reviennent dialoguer avec un public qui a grandi avec eux, entre livres et écrans. Au porogramme des rencontres, des séances photo, des signatures et des conférences, et la promesse réelle est ailleurs : retrouver, l’espace d’un week-end, cette sensation de passer de la file d’embarquement des Moldus aux couloirs de Poudlard, de quitter la routine pour un univers dont les leitmotivs — un thème musical, un clin d’œil, un nom prononcé — suffisent à faire remonter dix ans d’images.
Le casting convoqué a le parfum des chapitres qu’on rouvre : Matthew Lewis (Neville Londubat), Bonnie Wright (Ginny Weasley), Evanna Lynch (Luna Lovegood), David Bradley (Garrick Ollivander), Stanislav Yanevski (Viktor Krum) et Christian Coulson (Tom Jedusor). Chacun transporte avec lui une tranche de saga et un type de souvenir : l’outsider qui devient héros du quotidien, la sœur de cœur qui s’affirme, l’excentrique qui voit plus clair que tout le monde, l’artisan qui offre des baguettes comme on tend un destin, le champion taciturne et le visage juvénile du futur ennemi. Sur place, les échanges prendront des formes très concrètes — photos, autographes, Q&A —, mais ce sont les témoins directs d’un tournage étalé sur une décennie qui donneront sa profondeur à l’événement, ces acteurs capables d’une anecdote de plateau, d’un détail de costume, d’un fou rire de nuit qui soudain vous replace dans la fabrique d’un mythe.

Le charme de ce type de convention vient aussi de ce que l’on sait désormais de la genèse de l’aventure. Avant les tapis rouges, il y a eu une secrétaire dans les bureaux londoniens du producteur David Heyman qui, en 1997, tombe sur un manuscrit relégué et le remonte sur la pile : une chaîne de hasards s’enclenche et mène à une vente de droits en 1999 et à un pari de studio qui va bientôt dépasser les 7,7 milliards de dollars au box-office mondial. En marge des rencontres à Tremblay, on imagine très bien les fans demander à Matthew Lewis comment il a vécu, lui, cette croissance d’échelle, le passage d’un plateau britannique à une forteresse industrielle : Leavesden, l’ancien aérodrome devenu base arrière de la saga, où plus de 700 personnes s’activaient et que David Heyman décrivait comme une véritable petite ville. Le fait que le studio soit aujourd’hui visitable amplifie encore la mythologie : ceux qui viendront au Hilton se souviendront des salles immenses où l’on a reconstruit la Grande Salle, la Salle sur Demande ou encore les couloirs où l’on a autant tourné qu’attendu.
Cette histoire industrielle n’a pourtant jamais été qu’une affaire de chiffres ; elle s’est écrite à hauteur de personnalités. Le choix des réalisateurs a construit un nuancier esthétique que l’on devine dans les souvenirs de jeu : Chris Columbus donne aux deux premiers films l’allure d’un livre d’images doré, Alfonso Cuarón désature et étire l’espace, Mike Newell injecte la paranoïa d’un thriller adolescent, David Yates installe une gravité politique et émotionnelle qui mènera à la bataille finale. Les scénarios de Steve Kloves — épaulé une fois par Michael Goldenberg — ont arbitré l’essentiel, et la musique a cousu la mémoire collective : de John Williams à Patrick Doyle, Nicholas Hooper puis Alexandre Desplat, chacun a ajouté ses motifs à « Hedwig’s Theme », ce sifflement de nostalgie qu’on entendra probablement sortir des enceintes du hall d’accueil en même temps que les fans dérouleront des affiches pour les signatures.

Les invités de Tremblay sont aussi des passerelles vers des pans précis du récit. David Bradley se prête, par exemple, aux confidences sur la scène des baguettes et la logique presque artisanale du choix, quand la magie passe par la texture du bois et le poids en main ; Evanna Lynch, longtemps fan avant d’être actrice, parle avec une délicatesse rare des objets fétiches et de la manière dont Luna s’est imposée comme un modèle d’excentricité bienveillante ; Bonnie Wright revient souvent sur la maturation de son personnage, de la petite sœur en bord de cadre à l’alliée de première ligne ; Stanislav Yanevski réactive, lui, le frisson sportif et l’étrangeté des rencontres internationales du Tournoi des Trois Sorciers ; Christian Coulson raconte la pression subtile d’incarner un visage du mal encore en construction, où la douceur apparente masque déjà la fracture ; Matthew Lewis, enfin, incarne cette trajectoire dont se souviennent tant de spectateurs : l’assurance qui gagne jour après jour, quand la maladresse se change en courage lucide et que le plan se resserre pour lui donner, à l’instant décisif, l’épée, la réplique et le regard.
Il y a, dans la promesse d’Enter the Magical World, l’idée simple d’un tête-à-tête entre des carrières et des publics qui ont avancé ensemble. Quand Daniel Radcliffe, Emma Watson et Rupert Grint étaient propulsés malgré eux au cœur d’une tornade médiatique, un choix d’adultes tenait la barre : J. K. Rowling exigeant un casting majoritairement britannique, Steve Kloves jurant de rester fidèle aux personnages, David Heyman protégeant un tournage marathon, Stuart Craig repensant l’architecture de Poudlard au fil des besoins, Tim Burke et les équipes effets spéciaux britannique faisant grandir une industrie locale. Ce tissu de décisions a permis à un public de vieillir avec ses héros, et c’est ce fil-là que les visiteurs viennent retoucher du doigt lorsqu’ils se placent devant l’objectif pour un duo avec Bonnie Wright ou qu’ils tendent un étui à David Bradley pour récupérer une signature à côté d’un croquis de baguette.

Cette convention porte aussi le reflet d’une actualité culturelle mouvante. Les débats ont rejailli ces dernières années : déclarations de Chris Columbus sur l’improbable adaptation de « The Cursed Child » avec la distribution d’origine, prises de position polémiques autour de J. K. Rowling et discussion, plus large, sur la séparation de l’œuvre et de l’autrice. Dans un contexte où chacun a sa boussole, ce type de rassemblement ramène à l’expérience première — les films comme expérience de salle, la communauté comme foyer — et rappelle qu’un univers partagé est d’abord une conversation, parfois contradictoire, toujours vivante. On ne vient pas à Tremblay pour trancher, mais pour réécouter, à hauteur d’acteurs, ce que fut cette décennie de plateau et de sorties synchronisées avec nos propres âges.
Concrètement, l’accès se faisait par pass (à partir de 79 €) auxquels s’ajoutaient des extras modulés selon les invités pour les shootings photo, les autographes ou les meetings privés. C’est la règle du jeu des conventions : un ticket pour l’ambiance, puis des options à la carte pour fabriquer son moment, qu’il s’agisse d’une photo qu’on encadrera dans l’entrée ou d’une dédicace datée qui rejoindra la tranche d’un coffret de DVD. Le lieu, parfaitement desservi, a l’avantage d’absorber les flux tout en laissant respirer les échanges ; et l’on sait d’expérience que les conférences, quand elles embarquent un ou deux souvenirs de tournage inattendus, peuvent valoir à elles seules le déplacement.

Ces deux jours ne rejouent pas seulement une nostalgie, ils réaffirment la force d’un récit qui a structuré un imaginaire collectif. Quand Eduardo Serra parlait de « précision mathématique » pour harmoniser prises de vues et effets numériques, il disait au fond la même chose que les fans qui discutent d’un raccord entre deux films : l’exigence d’un monde crédible. Quand Alexandre Desplat retrouvait, avec Conrad Pope, l’ampleur symphonique des origines pour accompagner l’ultime bataille, il bouclait une boucle sonore que l’on entend encore. Et quand David Yates choisissait les caméras à l’épaule pour faire sentir la fuite en rase campagne, il renouait avec une idée simple : la magie ne fonctionne que si on en sent le poids, la fatigue et la peur. C’est ce poids-là que l’on vient partager, le temps d’un regard, d’un mot ou d’une photo, avec Matthew Lewis, Bonnie Wright, Evanna Lynch, David Bradley, Stanislav Yanevski et Christian Coulson. À Tremblay-en-France, le temps d’un week-end, l’embarquement est annoncé ; et l’on sait déjà que, dans les valises du retour, il y aura un peu plus qu’un badge et un selfie — un supplément de récit.

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Informations pratiques
Dates et Horaires : Du 8 novembre 2025 au 9 novembre 2025
Lieu Hôtel Hilton Paris Charles de Gaulle Airport,8 Rue de Rome, 93290 Tremblay en France
Tarifs : A partir de : 79€
Site officiel : www.dreamit-conventions.com
Photos : @fannyrlphotography