Festivals - Japan Expo 2025 : Purple Spiral Shunka – Une descente envoûtante dans l'horreur musicale

Par Mulder, Villepinte, Parc des Expositions, 05 juillet 2025

Lors de l'édition 2025 de la Japan Expo, qui s'est tenue du 4 au 7 juillet au Parc des Expositions de Villepinte, une performance s'est démarquée comme une expérience audacieuse et effrayante dans le domaine du théâtre jeunesse : Purple Spiral – Shunka, une comédie musicale sur le thème de l'horreur mise en scène par Youth Theatre Japan. Cette création originale n'était pas une simple vitrine de la culture pop ou un numéro de danse typique d'idoles, mais une véritable descente théâtrale dans le macabre, mêlant l'horreur traditionnelle japonaise à l'énergie de la jeunesse, à une chorégraphie élaborée et à une musique live chargée d'émotion. Réalisé par Mamoru Ueki, sur une musique du compositeur Junichi Matsuda et écrit par le scénariste Ryota NGSK, le spectacle visait directement les peurs les plus profondes du public, ces angoisses irrationnelles enracinées dans l'enfance, le folklore et l'étrange. Il a réussi à faire battre le cœur de nombreux spectateurs.

L'histoire tourne autour de Kanna, une lycéenne en apparence ordinaire qui nourrit une peur intense des poupées, ce qui n'est pas anodin étant donné qu'elle a été élevée dans un temple qui les conserve. Cette subtile référence à la tradition japonaise des ningyō (poupées spirituelles) ajoute une profondeur culturelle qui ne fait qu'amplifier le caractère effrayant. L'intrigue prend une tournure glaçante lorsque Kanna apporte à l'école une poupée grotesque et difforme. Ce qui commence comme un léger malaise se transforme rapidement en horreur physique, Kanna subissant une métamorphose inquiétante. L'horreur s'intensifie lorsqu'un nuage violet en forme de spirale se forme au-dessus de l'école et que ses camarades de classe sombrent dans une hystérie frénétique, semblable à une danse. Les seules personnes qui semblent épargnées sont ses amies d'enfance, Sora et Miho, qui doivent donner un sens à ce cauchemar qui danse avec elles au lieu de les envahir en silence. Le scénario est riche en allégories et ancré dans un sentiment de terreur typiquement japonais, évoquant les kaidan (histoires de fantômes) classiques tout en restant accessible à un public adolescent.

Ce qui distingue vraiment cette production, c'est son audace esthétique et performative. Sous la direction de Mamoru Ueki, la mise en scène utilise un minimum d'accessoires, mais un maximum d'éclairage et de son pour créer une atmosphère angoissante. Des lumières stroboscopiques violettes imitent les « nuages en spirale » et des projections d'ombres renforcent l'idée d'un monde en mutation. Les spectateurs ont raconté avoir eu le souffle coupé à plusieurs reprises, non seulement à cause des révélations horribles, mais aussi grâce à l'engagement puissant des jeunes comédiens. Une séquence particulièrement émouvante était celle où le monologue intérieur de Kanna était chanté sur une musique minimaliste et inquiétante composée par Junichi Matsuda, qui comprend clairement que le silence, juxtaposé à des notes soigneusement mesurées, peut être plus dérangeant que le bruit. La partition musicale a renforcé l'intensité émotionnelle, avec des mélodies envoûtantes s'intégrant parfaitement à des mouvements chorégraphiés à la fois beaux et terrifiants.

En coulisses, le scénario de Ryota NGSK s'est distingué par son rythme intelligent et sa tension psychologique. Alors que l'horreur est notoirement difficile à rendre dans un contexte live, en particulier dans une comédie musicale, son écriture a su trouver un équilibre entre l'horreur surréaliste et les peurs profondément humaines, telles que l'isolement, la pression des pairs et la perte de contrôle de son corps et de son esprit. Les commentaires des spectateurs qui ont assisté aux premières représentations indiquaient que beaucoup avaient été rappelés à « Uzumaki » de Junji Ito ou à l'atmosphère inquiétante des œuvres de Satoshi Kon, même si Purple Spiral – Shunka conservait une voix qui lui était propre. Dans les interviews et les tables rondes qui ont suivi le spectacle, les spectateurs ont salué l'intensité des acteurs et l'originalité d'une histoire d'horreur qui osait s'éloigner des performances joyeuses et colorées qui font la renommée de la Japan Expo.

Cette nouvelle orientation du Youth Theatre Japan semble être un pas en avant vers des productions plus ambitieuses. Si la troupe est déjà connue pour former de jeunes artistes talentueux, Purple Spiral – Shunka prouve qu'elle n'a pas peur de repousser les limites. Le genre de l'horreur, rarement abordé dans les comédies musicales pour jeunes, a été traité avec respect et complexité. Plutôt que de miser sur des effets faciles, l'équipe s'est inspirée de ses racines culturelles et des angoisses contemporaines pour offrir un spectacle qui a laissé une impression durable après le tombé du rideau. Même les habitués de la Japan Expo ont admis n'avoir jamais rien vu de tel. La mise en scène audacieuse, les images troublantes mais évocatrices des poupées et la descente vertigineuse dans la folie capturée par la danse et les voix ont créé une expérience inoubliable.

Visuellement, le spectacle a été documenté par le photographe Boris Colletier pour Mulderville, dont les images saisissantes des acteurs en costume, avec un éclairage teinté de violet et des expressions faciales exagérées figées en pleine danse, ont permis de capturer l'esthétique unique du spectacle pour ceux qui l'ont manqué. La galerie complète, accessible dans les archives photos de Mulderville, offre un aperçu fascinant des coulisses de la production, de sa puissance et de son ampleur.

Au cours d'une année où Japan Expo s'est fortement orientée vers le genre horreur, Purple Spiral – Shunka n'était pas seulement une œuvre thématique bien exécutée, mais est devenu un symbole de prise de risque créatif, d'introspection culturelle et de l'esprit implacable de la performance jeune. Il est rare de sortir d'une comédie musicale en réfléchissant à ses peurs d'enfant, en s'interrogeant sur le sens de la transformation et en se demandant si ses vieilles poupées ne sont vraiment que des jouets. C'est là toute la magie, et toute l'horreur, de Purple Spiral – Shunka.

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Photos : Pierre Champion / Mulderville