Le 3 juin 2025, le Forum des Images à Paris a résonné de rires et d'applaudissements lors d'une nouvelle édition du Club Allociné, une soirée privée dédiée à la passion du cinéma, à la rencontre de talents et à la découverte en avant-première d'un film qui s'annonce comme un grand succès. Cette fois-ci, les projecteurs étaient braqués sur Avignon, le premier long métrage de Johann Dionnet, coécrit avec Benoît Graffin. Devant une salle comble, le réalisateur était accompagné de plusieurs membres du casting – Baptiste Lecaplain, Elisa Erka, Amaury de Crayencour, Romain Francisco, Rudy Milstein, Ariane Mourier et Lyes Salem – pour une discussion animée et captivante avec le public. Notre média était présent pour immortaliser non seulement l'effervescence de ce moment spécial, mais aussi la promesse d'un film aussi drôle qu'intelligent, ancré dans une tradition cinématographique française qui sait allier légèreté et profondeur.
Dès les premières minutes de la projection, Avignon séduit par sa sincérité désarmante. Ce qui aurait pu être une simple comédie estivale se révèle rapidement être une déclaration d'amour au théâtre, à ses illusions, à ses tensions, à ses débordements émotionnels, mais aussi à ses excès et à ses fragilités. Lauréat du Grand Prix et du Prix Canal+ lors du dernier Festival international du film de comédie de l'Alpe d'Huez, Avignon est une œuvre généreuse, nourrie d'observations fines sur le quotidien des artistes et la beauté éphémère des rencontres que seul un festival comme celui d'Avignon peut susciter. Le film se déroule dans les ruelles ensoleillées de la cité papale, brillamment capturées par le directeur de la photographie Thomas Rames, qui fait du décor un personnage à part entière : de la rue des Teinturiers au Palais des Papes, chaque plan respire l'authenticité d'un lieu mythique qui devient, le temps d'un été, le cœur battant du spectacle vivant.
Mais si le film fonctionne si bien, c'est avant tout grâce à l'écriture subtile du duo Dionnet-Graffin. Ils parviennent à évoquer la précarité du monde artistique sans tomber dans le misérabilisme, à rire de ses absurdités sans le mépriser, et à saisir ce qu'on appelle la « magie du théâtre » sans succomber à la naïveté. Le personnage de Stéphane, interprété avec une authenticité touchante par Baptiste Lecaplain, symbolise cette tension constante entre ambition et doute, rêves et mensonges. En se lançant dans une supercherie pour séduire une actrice célèbre, il devient le miroir de tant d'artistes prêts à tout pour une chance, un moment sous les projecteurs, un rôle. Ce mensonge devient le moteur comique de l'histoire, mais aussi son ressort émotionnel : plus le quiproquo s'épaissit, plus le film reflète nos propres peurs d'être démasqués dans la vie.
La présence de Johann Dionnet lui-même devant la caméra renforce l'impression d'un projet conçu comme un travail d'artisanat, à la fois personnel et collectif. On pense parfois à Bertrand Blier ou Nicolas Bedos dans cette manière de mélanger les tons, de réunir la farce et la tendresse, d'oser créer une comédie d'ensemble où les seconds rôles brillent autant que les premiers. Le choix d'acteurs tels qu'Elisa Erka, Amaury de Crayencour et Rudy Milstein, tous très justes et charismatiques, témoigne d'une volonté de construire un univers crédible peuplé de personnages que l'on pourrait croiser sur une terrasse du festival Off, distribuant des flyers ou répétant dans un coin sombre. Ce monde est rarement filmé avec autant d'affection, et ce n'est pas un hasard si le film a déjà conquis le public lors de ses avant-premières locales au Capitole du Pontet et au Vox à Avignon.
Au-delà de son humour, Avignon est aussi une réflexion légère mais pertinente sur le besoin de reconnaissance, la solitude de l'artiste et la quête de sens dans une société où les métiers créatifs sont souvent marginalisés. Vers le milieu du film, une scène où un comédien doute de sa légitimité après une représentation devant une poignée de spectateurs endormis est profondément émouvante dans sa simplicité et résonne fortement chez tous ceux qui ont déjà essayé de créer quelque chose face à l'indifférence. Le film ne cherche jamais à faire pleurer, mais il touche profondément par sa lucidité empathique qui évite tout pathos. C'est ce ton à la fois joyeux et mélancolique qui rend le projet si unique.
Enfin, il faut souligner l'intelligence de la production : entre Nolita Cinéma, TF1 Studio, France 2 Cinéma et la distribution par Warner Bros France, Avignon bénéficie d'un solide soutien qui augure bien d'une belle carrière dans les festivals nationaux et même internationaux. Ce n'est pas tous les jours qu'une comédie française ose s'éloigner des sentiers battus pour explorer des territoires aussi vivants que le théâtre de rue. À une époque où de nombreux films recherchent des formules toutes faites, Johann Dionnet a créé une œuvre unique et généreuse qui mérite d'être soutenue. Pour ceux d'entre nous qui étions dans la salle ce soir-là, les rires chaleureux, les applaudissements enthousiastes et les questions passionnées du public ont témoigné du lien déjà fort qui unit le film et son public.
Avec sa sortie prévue le 18 juin 2025, Avignon est plus qu'un film : c'est une invitation à se souvenir de la première fois où l'on a mis les pieds sur scène, où l'on a cru en un scénario ou où l'on s'est enthousiasmé pour un rôle. C'est une ode à la scène et à ceux qui la foulent avec courage, parfois maladroitement, mais toujours avec foi. Et si, après avoir quitté la salle, certains rêvent d'assister au prochain Festival d'Avignon avec un regard neuf, c'est sans doute la plus belle victoire du film.
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Synopsis
Stéphane, un acteur en difficulté, arrive avec sa troupe au Festival d'Avignon pour jouer une comédie légère. Il y rencontre Fanny, une actrice renommée, et tombe sous son charme. Profitant d'un malentendu pour se rapprocher d'elle, Stéphane se retrouve pris dans un mensonge qu'il devra entretenir tout au long du festival... mais qui va rapidement dégénérer !
Avignon
Réalisé par Johann Dionnet
Produit par Mikael Govciyan
Écrit par Johann Dionnet, Benoît Graffin
Avec Baptiste Lecaplain, Elisa Erka, Amaury de Crayencour, Johann Dionnet, Romain Francisco, Rudy Milstein, Ariane Mourier, Lyes Salem, Alison Wheeler
Directeur de la photographie : Thomas Rames
Sociétés de production : Nolita Cinéma, Studio TF1 Cinéma, France 2 Cinéma
Distribué par Warner Bros (France)
Date de sortie : 18 juin 2025 (France)
Durée : 102 minutes
Photos et vidéo : Boris Colletier / Mulderville