Convention - Comic Con France 2025 : Brad et Fiona Dourif reviennent sur l'héritage durable de Chucky lors d'une table ronde sobre et intense

Par Mulder, Villepinte, Parc des Expositions, 13 avril 2025


Le 13 avril 2025, sur la scène principale du Comic Con France, un moment discret mais profondément émouvant s'est produit, qui ne reposait pas sur le spectacle ou les annonces théâtrales, mais plutôt sur l'histoire, les nuances et l'héritage personnel. La table ronde réunissant Brad Dourif et sa fille Fiona Dourif était moins un événement destiné à faire frissonner qu'une invitation à réfléchir sur des décennies de cinéma d'horreur façonnées par l'une de ses icônes les plus durables et les plus improbables : Chucky. La discussion, sérieuse et introspective, a offert aux fans un rare aperçu des coulisses d'une franchise qui a tranquillement évolué, passant d'une curiosité slasher à un mythe multigénérationnel, tout en restant inextricablement liée à une seule famille. Il en est ressorti non seulement une appréciation commune du métier et des personnages, mais aussi la subtile complexité d'un père et d'une fille qui ont mené une carrière construite autour d'un tueur fictif à la voix troublante d'humain.

Brad Dourif, qui a fêté ses 75 ans cette année, est revenu au Comic Con avec la même attitude réservée qui caractérise depuis longtemps sa présence hors écran. Mieux connu en dehors de la franchise pour son rôle dans Vol au-dessus d'un nid de coucou, qui lui a valu une nomination aux Oscars, ses collaborations avec des auteurs tels que David Lynch et Werner Herzog, et sa performance dans Deadwood, nominée aux Emmy Awards, Brad Dourif ne s'est jamais montré particulièrement intéressé par la célébrité. Il considère son association avec Chucky, un rôle qu'il double depuis le premier Child's Play en 1988, avec un mélange de pragmatisme et de loyauté indéfectible. Au cours du panel, il a clairement indiqué, sans sentimentalisme, que sa décision de rester dans la franchise, même après avoir annoncé sa retraite en 2024, était entièrement liée à deux personnes : Don Mancini, le créateur de Chucky, et Fiona, sa fille. Ce choix, plus personnel que professionnel, en dit plus long sur sa relation avec le personnage que n'importe quelle anecdote sur les coulisses.

Le point de vue de Fiona Dourif offre un contrepoint complémentaire, moins nostalgique, plus contemporain, mais tout aussi réaliste. Ayant rejoint la franchise dans Curse of Chucky (2013), elle a joué un rôle central dans sa revitalisation au cours de la dernière décennie, non seulement en incarnant Nica Pierce, un personnage dont l'arc narratif a approfondi la dimension psychologique de la série, mais aussi en assumant des fonctions narratives plus complexes, notamment en incarnant le jeune Charles Lee Ray dans des séquences de flashback de la série télévisée Chucky. La dynamique des scènes où son personnage est tourmenté par une poupée doublée par son propre père ajoute une dimension supplémentaire et complexe au sentiment de malaise, qu'elle a évoqué avec une honnêteté sans fioritures. Sa présence a contribué à remodeler la série pour en faire quelque chose de beaucoup plus fluide et multifacette que ne le laissaient présager les premiers opus, même si elle s'est gardée de surestimer son impact. Elle a plutôt mis l'accent sur l'évolution de la narration axée sur les personnages et la résonance émotionnelle croissante d'une franchise qui, autrefois, ne vivait que du choc.

La conversation a également porté sur l'évolution technique et créative de Chucky lui-même, depuis la manipulation complexe des premiers films, qui nécessitait une équipe de neuf personnes pour manipuler la bouche, les membres et les expressions faciales de la poupée, jusqu'à l'utilisation d'effets numériques et d'animatronique dans les derniers opus. Brad a rappelé comment le caractère physique des premières productions contribuait au réalisme troublant de la poupée, quelque chose qui, selon lui, s'est en partie perdu avec le passage aux techniques modernes. Fiona a souligné les défis liés au fait de jouer face aux nouvelles versions du personnage, où les effets pratiques et la post-production créent parfois un décalage avec le jeu des acteurs. Ces réflexions n'étaient pas présentées comme des critiques, mais comme des observations réfléchies sur l'évolution de l'industrie au fil des ans et sur ce qui a été gagné ou perdu au cours de ce processus.

La discussion a inévitablement porté sur la série télévisée Chucky, diffusée de 2021 à 2024. Bien que parfois plus légère dans le ton, la série a réussi à s'appuyer sur la mythologie existante de manière étonnamment réaliste, en introduisant de nouveaux personnages adolescents tout en poursuivant l'histoire des personnages emblématiques, notamment Nica, incarnée par Fiona, et Andy Barclay, incarné par Alex Vincent. La série a également abordé des thèmes tels que l'identité, les traumatismes et la violence générationnelle, suggérant que derrière l'absurdité de son postulat, Chucky avait plus à dire que ce que ses premiers films laissaient entendre. La double performance de Fiona, qui incarne à la fois Nica et le jeune Charles Lee Ray, est un exemple particulièrement frappant de la manière dont la franchise a appris à faire référence à sa propre histoire de manière à la fois inventive sur le plan narratif et personnellement évocatrice. La décision de lui confier le rôle de la version jeune du personnage de son père n'a pas été considérée comme un gadget, mais comme une évolution naturelle dans un univers où les identités s'estompent et où la lignée a son importance.

Plus que tout, le panel a permis de souligner discrètement le cœur émotionnel de la longévité de la franchise. Chucky, initialement conçu comme une parodie grotesque de la poupée « My Buddy », est devenu quelque chose de plus durable, non seulement grâce à son adaptabilité narrative, mais aussi grâce à la présence constante des Dourif au cœur de l'histoire. L'annonce faite par Brad en 2024 de sa retraite du monde du cinéma, à l'exception des projets liés à Chucky, en dit long sur l'importance de ce rôle dans sa vie. Il ne s'agit plus simplement d'une performance, mais d'une partie de son histoire personnelle, qui croise désormais celle de sa fille. Fiona, quant à elle, semble prête à continuer d'explorer des rôles plus sombres et plus nuancés sur le plan psychologique, et même si elle finira peut-être un jour par dépasser Chucky, sa contribution a déjà aidé la franchise à s'orienter vers un territoire plus ambitieux sur le plan émotionnel et thématique.

Le panel s'est terminé sans annonce majeure ni révélation surprenante, ce qui semblait approprié. Plutôt que de dévoiler de nouveaux projets ou de se livrer à des fan services, les Dourif ont choisi de parler calmement et de manière réfléchie de leur travail commun, de la place qu'il occupe dans leur vie et de l'étrange héritage d'une icône de l'horreur qui refuse d'être oubliée. Dans un genre souvent dominé par le bruit et le spectacle, ce moment discret et réfléchi s'est démarqué. Il a rappelé au public que certains des personnages les plus marquants de l'horreur ne survivent pas grâce au choc ou au gore, mais grâce à une voix constante et engagée, qui, dans ce cas précis, a été transmise de père en fille.

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Photos et vidéo : Boris Colletier / Mulderville