Scorpio

Scorpio
Titre original:Scorpio
Réalisateur:Michael Winner
Sortie:Cinéma
Durée:114 minutes
Date:22 mars 1973
Note:
Après une longue carrière comme homme de terrain pour les services secrets américains, Gerald Cross veut quitter ce travail dangereux et contraignant pour se retirer sur une île avec sa femme Sarah. Mais son supérieur McLeod le soupçonne d'être un double agent et il met donc le meilleur assassin sur contrat au service de la CIA à ses trousses. Il s'agit de Jean Laurier, qui a déjà travaillé plusieurs fois avec Cross et qui connaît par conséquent toutes les ruses du vieux renard. Pour se mettre à l'abri des tentatives d'assassinat des services secrets américains, Cross part à l'étranger, à Vienne, où il retrouve son vieux confrère russe Zharkov.

Critique de Tootpadu

Ecrire que Michael Winner est un mauvais réalisateur relève d'une banalité aussi affligeante que la majeure partie des films du cinéaste britannique. C'est "mauvais", "ennuyeux" ou "bâclé", certes, mais il en ressort, presque à l'insu de l'oeuvre elle-même, une conception du cinéma à l'antipode de ce que l'on considère communément le bon goût ou une narration suivie.
La narration, ou plutôt son absence, est justement le détail qui dénote le plus dans ce thriller d'espionnage qui se veut malin, et qui s'avère en fin de compte être long, bancal et désagréablement déroutant. Le rythme y opère tant bien que mal à travers une logique d'association qui place le montage soit du côté du génie abstrait, soit de celui d'une ineptie artistique absolue. Le respect de l'espace et du temps y est considéré telle une convention inutile, puisque le récit saute aux moments les moins opportuns d'un décor à l'autre. De même, les prétextes pour ces passages vraisemblablement arbitraires sont des plus risibles. Il suffit qu'une porte s'ouvre, qu'un personnage verse du café ou qu'un chat apparaisse, et le minimum de fermeté narrative établie depuis peu vole en éclats. Des actions très ordinaires surgissent ainsi à l'improviste, comme pour meubler les quelques dizaines de secondes qu'il aurait fallu pour argumenter la suite de l'intrigue.
Forcément, avec une structure narrative aussi cabossée, rien de très solide peut ressortir du récit, quant à ses éventuels enjeux et tensions. La chasse à l'homme en Autriche et aux Etats-Unis est alors des plus fades. La brillance du chat (Delon) et de la souris (Lancaster), on est censé la croire à partir des répliques point inspirées, mais on ne la voit pratiquement jamais à l'écran. Le pas trop piètre affrontement sur le chantier (l'unique véritable scène d'action du film) n'occulte alors guère les revirements de plus en plus abracadabrants ou la bande originale de Jerry Fielding particulièrement irritante.
Curieusement, l'interprétation dans ce marasme filmique n'est pas tout à fait catastrophique. Il y a bien sûr une légion de comparses entièrement interchangeables et notre Alain national manque particulièrement de charisme dans une de ses rares excursions dans le cinéma américain. Mais la dignité de Burt Lancaster et la malice de Paul Scofield donnent du prestige à un film, qui n'en mérite pas.

Vu le 17 mai 2007, à la Cinémathèque Française, Salle Georges Franju, en VO

Note de Tootpadu: