| Titre original: | Avatar: Fire and Ash |
| Réalisateur: | James Cameron |
| Sortie: | Cinéma |
| Durée: | 197 minutes |
| Date: | 17 décembre 2025 |
| Note: |
Avec Avatar : de feu et de cendres (Avatar: Fire and Ash), James Cameron plante une fois de plus son drapeau dans le domaine qu'il connaît le mieux : le cinéma maximaliste, animé par la conviction, le spectacle et la croyance presque obstinée que les films doivent encore être considérés comme des événements. D'une durée de près de trois heures et dix sept minutes, le film est sans complexe monumental, exigeant une immersion totale de la part du public, sans jamais paraître désinvolte ou bâclé. Il ne s'agit pas ici de contenu, mais de cinéma d'auteur, façonné par un cinéaste qui a passé des décennies à affiner une vision singulière de Pandora, à la fois écosystème vivant et terrain d'expérimentation cinématographique. Assis dans une salle de cinéma à regarder Avatar : de feu et de cendres (Avatar: Fire and Ash ) se dérouler, on a le sentiment palpable que James Cameron s'intéresse moins à une économie narrative soignée qu'à l'immersion elle-même, à donner au public l'impression d'avoir été plongé dans un mythe en cours plutôt que dans une suite soigneusement emballée. Cette approche comporte des défauts (répétitions, narration décousue, moments de franchise excessive) mais elle donne également naissance à un film qui semble énorme, engagé et résolument théâtral à une époque de plus en plus dominée par les franchises jetables.
Sur le plan émotionnel, le film est ancré dans le chagrin, et ce chagrin imprègne presque toutes les relations au sein de la famille Sully. Jake Sully, interprété par Sam Worthington, se comporte comme un homme qui se réfugie dans le devoir parce que ses sentiments sont devenus insupportables, tandis que Neytiri, interprétée par Zoe Saldaña, canalise son chagrin en dévouement, en colère et en ressentiment à peine contenu. La perte de leur fils Neteyam persiste comme une blessure qui refuse de se refermer, façonnant non seulement leurs choix, mais aussi le ton de tout le film. Lo'ak, interprété par Britain Dalton, apparaît comme un vecteur émotionnel crucial, accablé par la culpabilité du survivant et le sentiment que son existence même est un rappel de ce qui a été perdu. James Cameron s'oriente ici vers un drame familial plus intime, qui traite de la confiance brisée, du fardeau générationnel et du coût du leadership, mais il laisse rarement ces idées s'exprimer dans le silence. Au contraire, elles sont portées par le mouvement, les conflits et l'escalade, renforçant la conviction de Cameron selon laquelle le caractère se révèle souvent plus clairement dans les moments de pression extrême que dans la réflexion tranquille.
Sur le plan structurel, Avatar : de feu et de cendres (Avatar: Fire and Ash) fait indéniablement écho à Avatar : The Way of Water, parfois à un degré frustrant. Les rythmes familiers de la poursuite, de la capture, de la fuite et de la vengeance se répètent si souvent que le film donne parfois l'impression de tourner en rond autour de sa propre mythologie plutôt que de la faire progresser. Cependant, cette répétition est contrebalancée par un élargissement du paysage moral de Pandora, notamment grâce à l'introduction du peuple des Cendres. Dirigé par Varang, incarnée par Oona Chaplin, le clan Mangkwan représente une rupture idéologique radicale au sein de la société Na'vi, rejetant Eywa et embrassant la destruction comme stratégie de survie. Varang est l'un des personnages les plus marquants de la franchise, tant sur le plan visuel que conceptuel, sa présence recouverte de cendres et sa fureur volcanique s'opposant fortement à l'harmonie spirituelle traditionnellement associée à Pandora. Oona Chaplin apporte une physicalité hypnotique au rôle, insufflant à Varang une menace, une sensualité et un nihilisme à peine contenu, même si le scénario finit par mettre de côté son potentiel au profit d'une dynamique antagoniste plus familière.
Cette dynamique est encore compliquée par le retour du colonel Miles Quaritch, incarné par Stephen Lang, qui reste le personnage le plus perversement fascinant de la franchise. Entièrement intégré à son corps Na'vi mais s'accrochant à ses instincts colonialistes, le colonel Miles Quaritch existe dans un état constant de contradiction, et Avatar : de feu et de cendres (Avatar: Fire and Ash) exploite cette tension plus ouvertement qu'auparavant. Son alliance instable avec Varang crépite d'une alchimie tordue, fondée sur une brutalité partagée et une fascination mutuelle plutôt que sur une idéologie. Stephen Lang savoure clairement ce rôle, donnant à Quaritch une étrange vitalité qui frôle le charisme sombre, même si le personnage reste moralement répugnant. En revanche, Spider, interprété par Jack Champion, occupe une position narrative plus précaire, élevé à une importance quasi messianique tout en restant émotionnellement sous-estimé. L'arc narratif de Spider est le moteur de l'urgence de l'intrigue, mais le film peine à concilier sa signification symbolique avec la perspective humaine terre-à-terre qu'il est censé apporter.
Visuellement, Avatar : de feu et de cendres (Avatar: Fire and Ash) est stupéfiant d'une manière que peu de superproductions modernes osent même tenter. La cinématographie de Russell Carpenter, associée à la technologie de capture de mouvement en constante évolution de James Cameron, crée des images si tactiles qu'elles en deviennent presque écrasantes. Les rituels éclairés par le feu, les champs de bataille recouverts de cendres et les séquences de combats aériens vertigineux sont rendus avec une clarté et une cohérence spatiale étonnantes. La maîtrise de James Cameron en matière d'action à grande échelle reste inégalée ; même au milieu du chaos, la géographie est toujours lisible, les mouvements toujours intentionnels. Cela dit, l'utilisation continue d'une fréquence d'images élevée reste une arme à double tranchant, renforçant le réalisme tout en brisant parfois l'illusion, rappelant au spectateur l'appareil technologique qui se cache derrière le rêve. Néanmoins, lorsque le film trouve son rythme, le résultat est un pur transport cinématographique, du genre qui fait disparaître momentanément le monde extérieur.
Sur le plan thématique, James Cameron, aux côtés de Rick Jaffa et Amanda Silver, continue de privilégier la clarté plutôt que la nuance. Effondrement environnemental, violence coloniale, foi contre fanatisme : ces idées sont présentées avec la force d'un manifeste plutôt que d'un essai. Les métaphores sont larges, les lignes morales clairement tracées, et la subtilité est rarement l'objectif. Pourtant, il y a une sincérité indéniable dans l'approche de Cameron, le sentiment qu'il croit sincèrement à l'urgence de ces messages et refuse de les édulcorer pour plus de confort. Dans un paysage cinématographique de plus en plus façonné par la prudence algorithmique, Avatar : de feu et de cendres (Avatar: Fire and Ash) semble rafraîchissant et sans filtre, même lorsque sa narration plie sous le poids de sa propre ambition.
Il est impossible d’écrire une critique d’Avatar : de feu et de cendres (Avatar: Fire and Ash) sans évoquer la partition de Simon Franglen qui est tout simplement remarquable. S'inspirant des fondements thématiques posés par James Horner, le compositeur virtuose Simon Franglen élargit le langage musical d'Avatar avec des textures plus sombres et plus élémentaires qui reflètent la descente du film dans le conflit et la fracture idéologique. La partition véhicule une charge émotionnelle que les dialogues ne peuvent parfois pas exprimer, soulignant le chagrin, l'émerveillement et la fureur avec une sensibilité remarquable. Dans les moments plus calmes, la musique pleure avec les personnages ; dans les séquences d'action, elle déferle avec une force mythique sans submerger les images. C'est un élément unificateur qui lie le récit tentaculaire du film, renforçant l'identité de Pandora à la fois comme monde sacré et champ de bataille, et qui constitue l'un des éléments les plus réussis de toute la production.
Avatar : de feu et de cendres (Avatar: Fire and Ash) n'est pas le film le plus cohérent ou le plus discipliné de la saga sur le plan narratif, mais il reste un acte cinématographique impressionnant. Malgré tous ses excès, ses répétitions et ses indulgences, il offre des moments d'émerveillement authentique qui réaffirment la puissance du spectacle théâtral. James Cameron revisite peut-être un terrain familier, mais il le fait avec une ampleur, une conviction et une sincérité que peu de cinéastes vivants peuvent égaler. Imparfait mais formidable, écrasant mais indéniablement immersif, Avatar : de feu et de cendres (Avatar: Fire and Ash) nous a conquis à la fois par la maîtrise inégalée de James Cameron dans la réalisation de superproductions et rappelant que Pandora, malgré toute sa beauté, reste un monde forgé par les conflits, la foi, le feu et les cendres.
Avatar : de feu et de cendres (Avatar: Fire and Ash)
Réalisé par James Cameron
Écrit par James Cameron, Rick Jaffa, Amanda Silver
Histoire de James Cameron, Rick Jaffa, Amanda Silver, Josh Friedman, Shane Salerno
Produit par James Cameron, Jon Landau
Avec Sam Worthington, Zoe Saldaña, Sigourney Weaver, Stephen Lang, Kate Winslet
Directeur de la photographie : Russell Carpenter
Montage de Stephen E. Rivkin, David Brenner, Nicolas de Toth, John Refoua, Jason Gaudio, James Cameron
Musique de Simon Franglen
Société de production : Lightstorm Entertainment
Distribution : 20th Century Studios (États-Unis), The Walt Disney Company France (France)
Dates de sortie : 1er décembre 2025 (Dolby Theatre), 17 décembre 2025 (France), 19 décembre 2025 (États-Unis)
Durée : 197 minutes
Vu le 4 décembre 2025 à la Seine Musicale
Note de Mulder: