Titre original: | Y a pas de réseau |
Réalisateur: | Edouard Pluvieux |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 80 minutes |
Date: | 06 août 2025 |
Note: |
Dans un été cinématographique marqué par les blockbusters américains très attendus et les franchises qui se répètent à l’infini, le réalisateur Édouard Pluvieux propose une bouffée d’air frais avec Y a pas de réseau, une comédie familiale en pleine nature qui prend le contre-pied du spectaculaire pour miser sur la simplicité, l’humour et un soupçon de nostalgie enfantine. L’intrigue du film tient en quelques lignes : une famille citadine décide de passer un week-end dans un gîte perdu au cœur de la forêt, histoire de se reconnecter à l’essentiel. Mais très vite, le séjour tourne au chaos quand deux malfrats, campés par Gérard Jugnot et Maxime Gasteuil, sabotent l’antenne relais locale, coupant tout lien avec le monde extérieur. C’est alors que les deux enfants du couple, Jonas et Gabi, prennent les choses en main pour défendre leur territoire et déjouer les plans des deux énergumènes. Ce point de départ, qui pourrait sembler anecdotique, cache en réalité une mécanique bien huilée, héritée des grands classiques du cinéma jeunesse des années 80 et 90, où l’inventivité des plus jeunes renverse les rapports de force et redonne à l’aventure ses lettres de noblesse.
Le film puise ouvertement dans l’imaginaire collectif façonné par des œuvres comme Maman, j’ai raté l’avion, Les Goonies, avec une touche résolument française qui lui confère une tonalité à la fois burlesque et chaleureuse. Le duo d’enfants, interprété par Théo Bertrand et Lily-Marlene Nau, incarne une jeunesse dégourdie, inventive, et souvent plus mature que les adultes qui les entourent. Le contraste entre leur énergie débordante et l’absurdité des situations générées par les adultes crée un ressort comique efficace, notamment grâce à une série de pièges improvisés dans la forêt qui oscillent entre le bricolage malin et le gag visuel assumé. Gérard Jugnot, dans un rôle qui semble écrit sur mesure pour lui, incarne un méchant à la fois ridicule et attendrissant, tandis que Maxime Gasteuil joue la carte du sidekick idiot avec un plaisir évident. On ressent à l’écran que le réalisateur a une réelle affection pour ces personnages secondaires aux contours exagérés, mais jamais déshumanisés, qui rappellent les méchants de cartoon : inoffensifs dans leur dangerosité, comiques dans leur maladresse. Les nombreux clins au film Maman, j’ai raté l’avion rappellera à de nombreux spectateurs d’excellents souvenirs.
Ce qui surprend dans le film Y a pas de réseau, c’est la manière dont le film assume son statut de divertissement familial sans pour autant céder à la facilité. Si l’humour vise clairement un jeune public, avec quelques blagues scatologiques et des grimaces appuyées, l’ensemble est sauvé par un rythme enlevé et une mise en scène fluide, qui ne cherche pas à surjouer l’action mais à la rendre lisible, dynamique et toujours portée par une logique interne. La nature devient ici un véritable personnage, un terrain de jeu mais aussi un refuge, magnifié par une photographie sobre qui capte la lumière d’été filtrée par les arbres et qui donne aux scènes de jour une chaleur enveloppante. Ce cadre permet aussi au film de distiller un sous-texte sur notre dépendance au numérique. Le titre n’est pas qu’un gimmick : privé de réseau, chaque membre de la famille se retrouve forcé à interagir, à se recentrer sur le présent, et les enfants en viennent même à utiliser cette absence de technologie comme un avantage tactique dans leur guerre de territoire. Ce commentaire, jamais lourd ni moralisateur, s’infiltre naturellement dans le récit et donne à réfléchir, surtout pour les spectateurs adultes accompagnant leurs enfants.
Cependant, tout n’est pas parfait dans ce conte champêtre. Certains choix de jeu, notamment du côté des seconds rôles adultes, flirtent avec la caricature excessive, au point de faire basculer certaines scènes dans une théâtralité gênante notamment avec les scènes du comédien Bernard Farcy qui rappelleront à beaucoup de spectateurs son rôle de Gérard Gibert dans la saga cinématographique Taxi. Le film semble parfois hésiter entre l’humour de situation et le comique de répétition, ce qui entraîne quelques longueurs dans son dernier acte, où les retournements s’enchaînent sans toujours parvenir à maintenir le même niveau d’originalité. De même, la réflexion écologique esquissée à travers la présence symbolique de l’ours des Pyrénées ou la destruction des antennes relais reste en surface, un décor thématique plus qu’un véritable propos. On aurait aimé que ce versant plus engagé soit davantage creusé, quitte à sacrifier quelques scènes de poursuite redondantes. Néanmoins, ces défauts restent mineurs au regard de l’ensemble, car le film ne prétend jamais être plus qu’il n’est : une aventure drôle, vivante, et calibrée pour un visionnage familial joyeux.
Y a pas de réseau réussit là où beaucoup d’autres productions du genre échouent : il parle aux enfants sans les prendre pour des imbéciles, et amuse les adultes sans tomber dans la nostalgie lourdingue ou la moquerie condescendante. Avec une économie de moyens bien utilisée, un casting solide et une réelle envie de raconter une histoire simple mais bien construite, le réalisateur Édouard Pluvieux signe une comédie qui se regarde avec le sourire aux lèvres, portée par un duo d’enfants qu’on espère revoir très vite. Sans révolutionner le genre, ce film rappelle qu’il est encore possible de faire rire et rêver en famille sans super-héros, sans effets spéciaux tapageurs et sans cynisme. Et parfois, c’est tout ce qu’on demande. Une bonne surprise estivale, à savourer déconnecté du reste du monde, ou presque dès le 6 août 2025 dans tous les bons cinémas.
Y a pas de reseau
Réalisé par Edouard Pluvieux
Produit par Benjamin Demay, Mathieu Ageron, Maxime Delauney, Romain Rousseau
Écrit par Edouard Pluvieux, Olivier Ducray
Avec Gérard Jugnot, Maxime Gasteuil, Julien Pestel, Manon Azem, Roxane Barazzuol, Roman Angel, Bernard Farcy, Zabou Breitman
Musique d'Alexis Rault
Photographie : Julien Hirsch
Montage : Maël Lenoir
Sociétés de production : Las Palmeras, Nolita Cinéma, coproductions (M6 Films, TF1 Studio, Pathé, Logical Content Ventures, Elephant Story, Elephant Adventures)
Distribué par Pathé Films (France)
Date de sortie : 6 août 2025 (France)
Durée : 80 minutes
Vu le 08 juin 2025 au Gaumont Disney Village, Salle 10 place A18
Note de Mulder: