Titre original: | How to Train Your Dragon |
Réalisateur: | Dean DeBlois |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 125 minutes |
Date: | 11 juin 2025 |
Note: |
Dans une industrie de plus en plus saturée de remakes live-action sans inspiration, souvent contents de surfer sur la vague du succès des films d'animation sans offrir quoi que ce soit de vraiment nouveau, Dragons (How to Train Your Dragon) apparaît non seulement comme une rare exception, mais aussi comme un triomphe retentissant. Réalisé, écrit et coproduit par Dean DeBlois, le visionnaire qui a donné vie à la trilogie animée originale, cette adaptation époustouflante témoigne de ce qu'il est possible de réaliser lorsque la nostalgie rencontre une ambition créative sincère. Plutôt que de livrer une pâle imitation, Dean DeBlois a forgé un film plus riche sur le plan émotionnel, techniquement éblouissant et narrativement expansif. Il ne s'agit pas seulement d'une réimagination, mais d'une renaissance d'une saga bien-aimée, réalisée sous une forme vivante, tactile et profondément humaine.
Au cœur du film se trouve la performance discrètement puissante de Mason Thames dans le rôle d'Harold Horrib Haddock III, un garçon pris dans l'ombre écrasante de son héritage et des traditions violentes de sa culture viking. Ce que Mason Thames accomplit ici est tout simplement extraordinaire ; il ne se contente pas d'imiter le Harold de l'animation, il l'incarne avec une vulnérabilité vécue qui donne à chaque doute, à chaque petite victoire, à chaque moment de rébellion silencieux un poids émotionnel authentique. Inspiré par le personnage depuis son enfance, après avoir vu la bande-annonce de Dragons 2 (How to Train Your Dragon 2) à l'âge de sept ans, Mason Thames apporte à ce rôle une profondeur de compréhension qui transcende la simple performance. Son Harold n'est pas une caricature de maladresse ou de charme décalé. C'est plutôt un jeune homme qui étouffe silencieusement sous les attentes de son père, un chef de guerre qui exige force, violence et loyauté indéfectible à la tradition. Et pourtant, lorsque Harold découvre et finit par se lier d'amitié avec Krokmou, un Dragon de la Nuit blessé, le personnage passe de la passivité à la détermination. En choisissant la compassion plutôt que la conformité, le parcours de Harold devient une parabole sur l'empathie dans un monde accro à la guerre.
Cette charge émotionnelle est renforcée par la présence étonnante de Gerard Butler, qui reprend non seulement la voix, mais aussi l'apparence physique de Stoïk la Brute, le chef imposant de Berk et le père sévère et endeuillé d'Harold. Après avoir doublé Stoïk dans les films d'animation, Gerard Butler incarne le personnage dans la version live avec une autorité redoutable, livrant une performance empreinte de tristesse, de fierté et d'une profonde déception. C'est un homme brisé par le deuil – la mort de sa femme, l'éloignement croissant de son fils – et si son armure pèse 34 kilos, c'est son armure émotionnelle qui semble encore plus lourde. Les scènes entre Gerard Butler et Mason Thames sont parmi les plus poignantes du film, capturant l'incapacité douloureuse de deux hommes à communiquer, à se voir vraiment, jusqu'à ce qu'il soit presque trop tard. L'authenticité apportée par Gerard Butler ne réside pas seulement dans son physique, mais aussi dans sa retenue, ses silences, ses regards, son chagrin, que nul animation ne pourrait jamais rendre pleinement.
Puis il y a Nico Parker dans le rôle d'Astrid Hofferson, dont la performance est à la fois forte et gracieuse. Connue pour son travail acclamé dans The Last of Us, Nico Parker donne vie à Astrid avec une intensité tranquille qui couve jusqu'à s'embraser. D'abord sceptique face aux méthodes peu orthodoxes et à l'intelligence émotionnelle d'Harold, Astrid évolue pour devenir une alliée de confiance, puis un subtil intérêt amoureux, de manière crédible et méritée. Dean DeBlois aurait été frappé par la compréhension immédiate de Nico Parker de la palette émotionnelle d'Astrid, sa capacité à être forte sans arrogance, vulnérable sans fragilité. Et en effet, à l'écran, elle devient le miroir moral et émotionnel d'Harold, reflétant non seulement ses peurs, mais aussi sa force. L'alchimie entre Nico Parker et Mason Thames est électrique sans jamais être forcée, ce qui confère à l'histoire une dimension supplémentaire de complexité humaine qui palpite juste sous le spectacle grandiose.
Le spectacle n'est toutefois jamais loin du cœur du film. Visuellement, Dragons (How to Train Your Dragon) est tout simplement une symphonie d'art. Bill Pope, le directeur de la photographie nominé aux BAFTA et connu pour Matrix et Le Livre de la jungle, apporte un sens inégalé de l'échelle et de l'intimité. Les vols des dragons, filmés en IMAX avec des cardans avancés et des rigs animatroniques, ne sont pas seulement impressionnants visuellement, ils sont expérientiels. Lorsque Harold et Krokmou s'envolent pour la première fois, c'est comme si le public était lui-même attaché au dos du dragon. L'air s'engouffre, le monde bascule, et vous le ressentez dans votre poitrine, dans vos tripes, dans vos rêves d'enfant. Et contrairement à de nombreux films riches en images de synthèse où la splendeur visuelle semble déconnectée de l'émotion, ici, la technologie est au service de l'histoire. Vous ne regardez pas un garçon voler sur un dragon, vous volez avec lui. Vous tombez avec lui. Vous vous élevez avec lui.
Le souci du réalisme ne s'arrête pas aux effets visuels. Dominic Watkins, le chef décorateur du film, transforme les Titanic Studios de Belfast en un monde viking fait de saleté, de feu, de bois et d'os. Inspiré de l'architecture viking historique et des paysages mythiques des îles Féroé et d'Islande, Berk n'est pas un terrain de jeu fantastique, mais un monde qui respire. Chaque structure est fonctionnelle. Chaque tapisserie est teinte à la main. Chaque épée gravée de runes et chaque forge tachée de suie raconte une histoire. Le Livre des dragons, fabriqué à la main en cuir et en laiton, ressemble à une relique sacrée, et même les dragons eux-mêmes ont été animés à l'aide de marionnettes avant de recevoir leurs retouches numériques finales. Ce mélange de physique et de numérique confère au film une authenticité rare, qui ancre son univers fantastique dans le domaine du crédible.
La distribution est tout aussi riche en personnages. Nick Frost, dans le rôle de Gueulfor, le forgeron bourru au cœur d'or, apporte chaleur et humour, équilibrant ainsi les moments émotionnels plus lourds du film. Varek Ingerman, interprété par Julian Dennison, est un excentrique charmant, obsédé par les dragons et totalement indifférent aux normes vikings. Gabriel Howell, dans le rôle de l'arrogant Rustik Jorgenson, apporte à la fois une bravade comique et une profondeur inattendue à un personnage qui aurait facilement pu sombrer dans la caricature. Ruth Codd, dans le rôle de la féroce et brillante Phlegma, est une révélation, non seulement pour sa performance physique, mais aussi pour ce que sa présence représente : une guerrière amputée jouée par une actrice amputée, apportant une représentation authentique à un genre qui trop souvent marginalise le handicap.
Sur le plan musical, le retour de John Powell est un véritable cadeau. Sa bande originale s'appuie sur les thèmes emblématiques de la trilogie animée tout en s'aventurant dans un territoire plus audacieux et plus épique. Lorsque les dragons prennent leur envol, la musique ne se contente pas d'accompagner les images, elle les complète. Peu de compositeurs comprennent aussi bien les émotions en mouvement que John Powell, et ici, sa musique nous rappelle la magie qui a attiré le public dans cet univers il y a quinze ans. Elle est grandiose, poignante, héroïque et inoubliable.
Et c'est peut-être là la plus grande réussite de Dragons (How to Train Your Dragon) : sa capacité à rester inoubliable. Le film a été présenté en première mondiale à CinemaCon où nous avons pu le, découvrir la première fois, et où il a reçu une ovation debout, et sortira dans le monde entier dans quelques jours. Mais il a déjà tout d'un classique, non pas parce qu'il joue la carte de la sécurité, mais parce qu'il ose voler plus haut. Dean DeBlois n'a pas seulement rendu hommage à l'âme de sa création originale, il l'a élargie, ancrée et enflammée d'une nouvelle vie. Il a créé un film qui comble le fossé entre les générations, entre les médias et entre le fantastique et la réalité. Il nous rappelle que le cinéma, à son meilleur, a toujours le pouvoir d'enchanter, d'élever et de nous faire croire aux dragons, aux rêves et à nous-mêmes.
Dragons (How to Train Your Dragon)
Écrit et réalisé par Dean DeBlois
D'après Dragons de Cressida Cowell
Produit par Marc Platt, Dean DeBlois, Adam Siegel
Avec Mason Thames, Nico Parker, Gerard Butler, Nick Frost, Julian Dennison, Gabriel Howell, Bronwyn James, Harry Trevaldwyn, Ruth Codd, Peter Serafinowicz, Murray McArthur
Directeur de la photographie : Bill Pope
Montage : Wyatt Smith
Musique : John Powell
Sociétés de production : DreamWorks Animation, Marc Platt Productions
Distribué par Universal Pictures
Dates de sortie : 2 avril 2025 (CinemaCon), 11 juin 2025 (France), 13 juin 2025 (États-Unis)
Durée : 125 minutes
Vu le 2 avril 2025 au Caesars Palace, The Colosseum Theater (Cinemacon World Premiere)
revu le 08 juin 2025 au Gaumont Disney Village, Salle 1 place L18
Note de Mulder: