Lilo & Stitch

Lilo & Stitch
Titre original:Lilo & Stitch
Réalisateur:Dean Fleischer Camp
Sortie:Cinéma
Durée:108 minutes
Date:21 mai 2025
Note:
L’histoire touchante et drôle d’une petite fille hawaïenne solitaire et d’un extra-terrestre fugitif qui l’aide à renouer le lien avec sa famille.

Critique de Mulder

Plus de deux décennies après que le film original Lilo & Stitch ait atterri en catastrophe dans l'univers Disney avec une planche de surf, une valise remplie de chagrin et l'une des mascottes les plus improbables de l'histoire de la Walt Disney Company e remake en prise réelle tant attendu arrive enfin, avec son lot de personnages décolorés par le soleil, d'effets spéciaux et d'attentes plus lourdes que ne le laisse supposer sa durée modeste de 108 minutes. Réalisé par Dean Fleischer Camp, dont le film indépendant Marcel the Shell with Shoes On a été salué pour sa tendresse dans le traitement de l'intimité et de la perte, cette nouvelle version montre clairement dès le début qu'il s'agit d'un travail d'affection sincère plutôt que d'une reproduction algorithmique. Mais l'affection, comme nous l'enseigne ce film, n'est qu'une partie de l'équation. Pour vraiment réveiller le charme et la profondeur de l'original, il faudrait faire appel au même esprit rebelle, à la même étrangeté sincère et à la même volonté de s'attarder sur la complexité émotionnelle. Au lieu de cela, le film trébuche, souvent avec douceur, parfois maladroitement, à travers son intrigue bien rodée, sans jamais vraiment découvrir pourquoi il devait exister au-delà d'une nostalgie réconfortante et de la continuité de la marque.

La trame de l'histoire reste largement inchangée, peut-être trop respectueusement préservée pour permettre le genre de réinvention créative qui aurait pu justifier cette adaptation comme étant plus qu'un simple écho brillant. Stitch, toujours doublé par l'infatigable Chris Sanders (en version originale), reste une joyeuse force de destruction née des expériences illégales du Dr Jumba Jookiba (Zach Galifianakis), un scientifique fou en exil. Après son évasion interstellaire, Stitch atterrit dans la beauté tranquille de Kauaʻi, où il est adopté – par erreur, comme un chien – par Lilo (Maia Kealoha), une fillette de six ans qui vit sous la tutelle stricte de sa sœur aînée, Nani (Sydney Agudong). Le deuil pèse lourdement sur leur foyer depuis la perte de leurs parents, et leur fragile structure familiale est étroitement surveillée par les services sociaux. Le chaos que Stitch apporte est, comme on pouvait s'y attendre, déstabilisant. Mais comme dans le film original, cette version ne traite pas du chaos, mais plutôt de la guérison qui s'ensuit, celle qui ne peut venir que d'une famille choisie, d'une résilience obstinée et d'un amour offert librement, sans condition.

Ce qui distingue ce film et lui confère finalement sa crédibilité émotionnelle, c'est la façon dont il déplace son centre de gravité de Lilo vers Nani. Dans la version animée, Nani était souvent un personnage secondaire, une adolescente stressée qui avait du mal à garder la tête hors de l'eau. Ici, elle se voit accorder une pleine liberté narrative et se transforme en co-protagoniste dont les sacrifices personnels (refuser d'aller à l'université, jongler entre plusieurs emplois et endurer un système bureaucratique qui remet constamment en question ses capacités) sont non seulement reconnus, mais aussi autorisés à s'épanouir dans un arc narratif captivant. Sydney Agudong, s'avère être un solide pilier émotionnel, en particulier dans les scènes plus calmes où les rêves de jeunesse de Nani se heurtent à la réalité implacable de l'âge adulte qui lui est imposée. Son épuisement semble réel et ses tentatives pour être une mère compétente sont souvent teintées d'une futilité déchirante. Ce film mérite à tout le moins d'être salué pour avoir mis en avant l'un des personnages les plus discrets et les plus poignants de Disney et lui avoir donné le temps d'écran et l'espace émotionnel qu'elle mérite depuis longtemps.

Maia Kealoha, qui incarne Lilo avec des yeux écarquillés d'émerveillement et une dose convaincante de singularité enfantine, parvient à préserver une grande partie de ce qui rendait le personnage original si attachant. Elle est sans filtre, parfois instable, souvent hilarante et profondément vulnérable, une combinaison qui pourrait facilement tomber dans le sentimentalisme entre de mauvaises mains, mais qui ici semble largement authentique. On ne peut toutefois s'empêcher de remarquer qu'en donnant la priorité à l'évolution de Nani, le film laisse Lilo légèrement sous-développée dans des moments où sa complexité aurait pu ajouter plus de nuances émotionnelles. Sa relation avec Stitch, bien que touchante par moments, est moins centrale cette fois-ci et manque de l'énergie indisciplinée qui rendait leur dynamique originale si subversive et joyeuse. Stitch lui-même, rendu avec un design CGI légèrement plastique mais expressif, conserve suffisamment de son charme anarchique, même s'il semble plus contenu ici, ses angles ayant été adoucis pour mieux s'intégrer dans le monde du live-action.

La mise en scène de Dean Fleischer Camp, bien que profondément sincère, est marquée par un curieux conflit tonal. Sa sensibilité indie apporte une intimité bienvenue à certaines scènes, mais elle se heurte souvent aux attentes esthétiques plus larges et plus raffinées de Disney. Le résultat est un film qui oscille entre un drame tendre et une narration visuelle plate, sans jamais vraiment s'engager dans l'un ou l'autre. Le décor hawaïen, qui en 2002 était rendu avec une luxuriance aquarellée et un sens aigu de l'atmosphère et des lieux, est ici décevant de stérilité. Malgré le tournage sur place, la photographie de Nigel Bluck évoque rarement la grandeur ou la géographie émotionnelle des îles, et l'éclairage réduit souvent la palette naturelle vibrante à des images de carte postale génériques. Ce n'est pas que le film ait l'air bon marché, il manque simplement la poésie visuelle qui aurait pu l'élever au rang d'œuvre mémorable.

Les personnages secondaires du film, en particulier le duo extraterrestre formé par Pleakley (Billy Magnussen) et Jumba (Zach Galifianakis), ont été réinventés avec des résultats mitigés. Si l'idée de leur déguisement, qui leur permet d'apparaître plus longtemps à l'écran, est compréhensible d'un point de vue production, elle enlève une grande partie de l'absurdité délicieuse qui les avait rendus si populaires auprès des fans. Billy Magnussen apporte une touche d'humour à l'enthousiasme névrotique de Pleakley, mais Zach Galifianakis joue Jumba de manière étonnamment sobre, vidant le personnage de sa menace flamboyante et laissant un vide notable dans le rythme comique du film. De même, Cobra Bubbles, interprété par Courtney B. Vance, troque le côté mystérieux et exubérant de l'original contre une autorité bureaucratique plus terre-à-terre, un changement intentionnel mais pas forcément efficace. L'une des additions les plus réussies est Tūtū, interprétée par Amy Hill, une voisine pleine de sagesse dont les brèves apparitions ajoutent de la chaleur et une dimension culturelle, rappelant avec douceur l'importance de la sagesse intergénérationnelle pour surmonter les épreuves.

Techniquement, le film manque de profondeur et est sans réelle inspiration originale. Le montage semble souvent précipité, en particulier dans les moments qui devraient respirer, comme la séquence emblématique de surf ou le tournant émotionnel de Stitch dans la cage du refuge pour animaux. La bande originale de Dan Romer, bien que fonctionnelle sur le plan émotionnel, manque de la spécificité culturelle et de la texture unique de l'œuvre originale d'Alan Silvestri, même si les morceaux choisis, en particulier les classiques d'Elvis, apportent encore une touche nostalgique. Une version réarrangée de Hawaiian Roller Coaster Ride, interprétée avec brio et affection, est l'un des moments forts du film, mais on ne peut s'empêcher de penser que les moments les plus émouvants du film sont souvent portés par la musique et les souvenirs hérités, et non par l'originalité de la nouvelle production.

Ce remake en prise de vues réelles de Lilo & Stitch est un hommage sincère plutôt qu'une véritable réinvention. Il réussit là où tant de remakes Disney récents ont échoué récemment, en comprenant véritablement l'ADN émotionnel de l'œuvre originale. Il ne tente pas de moderniser cyniquement l'histoire avec des gadgets timides ou de courir après des effets spectaculaires vides de sens. Au contraire, il adoucit le rythme, actualise le contexte et met l'accent sur le thème de la survie émotionnelle : la famille n'est pas une structure statique, mais une force fluide, désordonnée, parfois douloureuse, mais toujours résiliente. Le mantra du film, ohana signifie famille, et famille signifie que personne n'est laissé pour compte ou oublié, touche toujours autant, touchant cette corde sensible où se rencontrent la solitude de l'enfance et les responsabilités de l'âge adulte.

Cependant la sincérité seule ne peut masquer les lacunes plus générales du film. Comme beaucoup des récentes productions en prise de vues réelles de Disney, Lilo & Stitch donne finalement l'impression d'avoir été réalisé par obligation plutôt que par une intention créative audacieuse. Il est émouvant et souvent charmant, mais rarement surprenant. Pour les fans de l'original, c'est une visite douce-amère chez de vieux amis qui parlent désormais avec des voix légèrement différentes et portent des vêtements un peu moins colorés. Pour les nouveaux venus, cela peut apparaître comme un film familial, avec beaucoup de cœur mais peu de choses vraiment mémorables. Et pour ceux qui sont lassés par la vague des remakes, ce ne sera probablement qu'un élément supplémentaire dans la lutte permanente de Disney pour recréer la magie d'antan.

Pourtant, s'il y a une raison pour laquelle ce film mérite d'être vu, c'est son affection sincère pour ses personnages et ces moments, brefs mais intenses, où il ose ralentir, pleurer, rire et aimer. Dans ces moments-là, Lilo & Stitch ne se contente pas de se souvenir du passé. Il lui rend hommage. Cela seul suffit à en faire plus qu'un simple exercice commercial. Cela en fait, même si elle est imparfaite, une histoire qui mérite encore d'être racontée.

Lilo & Stitch
Réalisé par Dean Fleischer Camp
Scénario de Chris Kekaniokalani Bright, Mike Van Waes
D'après Lilo & Stitch (2002) de Chris Sanders, Dean DeBlois
Produit par Jonathan Eirich, Dan Lin
Avec Sydney Elizebeth Agudong, Billy Magnussen, Hannah Waddingham, Chris Sanders, Courtney B. Vance, Zach Galifianakis, Maia Kealoha
Directeur de la photographie : Nigel Bluck
Montage : Adam Gerstel, Phillip J. Bartell
Musique : Dan Romer
Sociétés de production : Walt Disney Pictures, Rideback
Distribué par Walt Disney Studios Motion Pictures
Dates de sortie : 17 mai 2025 (El Capitan Theatre), 21 mai 2025 (France), 23 mai 2025 (États-Unis)
Durée : 108 minutes

Note de Mulder: