Death Of A Unicorn

Death Of A Unicorn
Titre original:Death Of A Unicorn
Réalisateur:Alex Scharfman
Sortie:Vod
Durée:107 minutes
Date:Non communiquée
Note:
Un père et sa fille renversent accidentellement une licorne et la tuent alors qu'ils se rendent dans un lieu de villégiature où le patron milliardaire du père souhaite exploiter les propriétés curatives miraculeuses de la créature.

Critique de Mulder

À une époque où le cinéma hybride s'installe souvent dans des rythmes prévisibles, Death of a Unicorn d'Alex Scharfman apparaît comme une bouffée d'air frais excentrique et palpitante, mêlant satire sociale acérée et éléments d'horreur pour créer une parabole moderne captivante. Soutenu par un très bon casting, notamment Jenna Ortega, ce film est une exploration sans complexe et délicieusement absurde de la cupidité et de l'orgueil de l'humanité, habilement dissimulée sous un emballage fantastique et horrifique. Si le concept central du film – des licornes meurtrières qui sèment la terreur dans la propriété d'un milliardaire sans scrupules – pourrait facilement sombrer dans le kitsch, la réalisateur et scénariste Alex Scharfman réussit à ancrer son audacieuse prémisse dans une puissante combinaison d'humour acéré, de drame familial poignant et de sensations fortes.

Au cœur de Death of a Unicorn se trouve Elliot Kintner, interprété avec sincérité par Paul Rudd, un avocat spécialisé dans le droit pharmaceutique qui cherche désespérément à assurer son avenir financier en se rapprochant de son patron milliardaire mourant, Odell Leopold, incarné par le charismatique Richard E. Grant. Pourtant, malgré la présence charmante habituelle de Paul Rudd, c'est Jenna Ortega qui transcende l’écran, avec son interprétation révélatrice de Ridley, la fille d'Elliot, une étudiante en deuil. Jenna Ortega, qui est en train de devenir l'une des jeunes actrices les plus fascinantes de sa génération, donne de la profondeur à Ridley, transformant ce qui aurait pu être une adolescente maussade et clichée en un personnage complexe et émouvant. De ses connaissances en histoire de l'art à ses souvenirs émouvants des tapisseries représentant des licornes au Cloisters, Jenna Ortega offre une performance remarquablement nuancée, insufflant au film une sincérité bienvenue au milieu de son absurdité souvent joyeuse.

Le personnage de Jenna Ortega sert de boussole morale au film. Son scepticisme intuitif contraste fortement avec l'avarice effrénée des Leopold, dont la première réaction à la découverte d'une licorne blessée n'est pas l'émerveillement ou la compassion, mais l'exploitation à des fins lucratives. On ne peut s'empêcher de faire le parallèle avec les controverses pharmaceutiques de la vie réelle, en particulier en se rappelant la tristement célèbre famille Sackler. Les Leopold – interprétés avec une arrogance délicieuse par Richard E. Grant, la toujours gracieuse Téa Leoni dans le rôle de Belinda, son épouse superficiellement philanthrope, et Will Poulter, qui vole la vedette dans le rôle de Shepard, leur fils désastreusement privilégié – offrent un commentaire acerbe sur le capitalisme effréné, parfaitement résumé dans la séquence hystérique et indulgente où Will Poulter sniffe de la poudre de corne de licorne dans une démonstration imprudente de son privilège. La performance énergique de Will Poulter met en évidence l'absurdité grotesque de la classe supérieure, faisant écho à la profondeur satirique qui rappelle Triangle of Sadness de Ruben Östlund ou même le célèbre Parasite de Bong Joon-ho.

Pourtant, malgré sa satire et son humour puissants, le film maintient une tension dynamique grâce à la claire révérence d’Alex Scharfman pour les classiques du cinéma tels que Jurassic Park de Spielberg et le répertoire d'horreur de John Carpenter. Si certains effets spéciaux, notamment dans le premier acte, semblent étonnamment inégaux – suscitant une comparaison malheureuse mais inévitable avec les effets pratiques intemporels de Jurassic Park –, les marionnettes tangibles utilisées dans les scènes clés ajoutent une réalité tactile à la vengeance sauvage des licornes. Alex Scharfman mélange habilement cette férocité et l'humour, créant des scènes qui équilibrent parfaitement l'horreur et la drôlerie, un exploit que beaucoup de réalisateurs chevronnés pourraient lui envier.

Le renversement ludique du mythe de la licorne dans ce film mérite une mention spéciale. Plutôt que des êtres doux et éthérés, Alex Scharfman dépeint ces créatures comme des bêtes monstrueuses issues de la tradition ancienne, majestueuses mais indéniablement mortelles. Alors que Ridley démêle avec diligence la trame historique de la mythologie des licornes, elle découvre des récits qui dépeignent ces créatures moins comme des merveilles innocentes que comme de féroces protecteurs de la pureté naturelle. Ici, le scénario utilise intelligemment des références historiques et artistiques, tirant parti des études de Ridley pour créer une intrigue secondaire captivante, afin d'approfondir l'engagement du public et de présenter les licornes comme des instruments à la fois littéraux et symboliques de la fureur de la nature contre l'exploitation humaine.

Malgré ces atouts considérables, Death of a Unicorn trébuche parfois. Certains fils émotionnels, en particulier ceux qui tournent autour du deuil et des liens familiaux tendus entre Elliot et Ridley, semblent sous-développés. Le désir d'une résonance émotionnelle est palpable, mais le film recourt parfois à un sentimentalisme superficiel qui diminue son impact potentiel. De plus, l'inégalité des images de synthèse dans les premiers actes risque d'aliéner les spectateurs habitués à un rendu visuel soigné, rappelant que même une narration innovante peut échouer en raison d'imperfections techniques.

Ces quelques défauts n'entachent toutefois guère le charme général du film. La présence remarquable de Jenna Ortega continue d'ancrer le récit, apportant une sincérité émotionnelle qui fait le pont entre les changements de ton du film. Ses dernières scènes avec Paul Rudd, même si elles manquent peut-être de la construction minutieuse qu'elles méritaient, offrent néanmoins des moments de réconciliation et de tendresse véritablement émouvants, témoignant de la complicité des acteurs et de leur engagement à rester authentiques au milieu de ce chaos fantastique.

Death of a Unicorn se distingue comme une expérience cinématographique unique et agréable, à mi-chemin entre le commentaire social et le film de monstres, et totalement originale. Il est rare de voir un film qui assume aussi ouvertement son absurdité tout en réussissant à offrir des sensations fortes et un commentaire incisif. La performance captivante de Jenna Ortega, riche en subtilités émotionnelles et en charme, élève encore davantage le film, confirmant son statut de talent le plus intrigant de sa génération. Malgré ses imperfections, le premier film d’Alex Scharfman est une réussite indéniable qui rappelle au public la capacité infinie du cinéma à surprendre et à ravir, méritant des applaudissements enthousiastes – et peut-être un respect prudent – pour son acceptation sans complexe d'un carnage alimenté par des licornes.

Death of a Unicorn
Écrit et réalisé par Alex Scharfman
Produit par Lucas Joaquin, Tyler Campellone, Drew Houpt, Lars Knudsen, Alex Scharfman, Tim Headington, Theresa Steele Page
Avec Paul Rudd, Jenna Ortega, Will Poulter, Téa Leoni, Richard E. Grant
Directeur de la photographie : Larry Fong
Montage : Ron Dulin
Musique : Dan Romer, Giosuè Greco
Sociétés de production : Secret Engine, Monoceros Media, Square Peg, The Royal Budapest Film Co, Ley Line Entertainment
Distribué par A24 (États-Unis)
Dates de sortie : 8 mars 2025 (SXSW), 28 mars 2025 (États-Unis)
Durée : 107 minutes

Vu le 29 avril 2025 (VOD)

Note de Mulder: