Titre original: | We Live In Time |
Réalisateur: | John Crowley |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 108 minutes |
Date: | 01 janvier 2025 |
Note: |
L’amour au présent (We Live In Time) est un film qui ne se contente pas de raconter une histoire d’amour classique, mais qui explore la profondeur des liens humains dans toute leur complexité. À travers la relation entre Almut Brühl et Tobias Durand, incarnés respectivement par Florence Pugh et Andrew Garfield, le réalisateur John Crowley et le scénariste Nick Payne offrent une expérience cinématographique qui transcende les conventions du genre romantique. Le film plonge dans des thèmes profonds comme la mortalité, l’héritage et la manière dont le temps façonne nos vies et nos souvenirs. Avec son approche audacieuse de la narration et ses performances captivantes, L’amour au présent (We Live In Time) se révèle être une œuvre émouvante et inoubliable.
L’une des caractéristiques les plus marquantes du film est sa structure narrative non linéaire. Contrairement à un récit chronologique traditionnel, l’histoire se déploie comme une mosaïque, chaque scène ajoutant une nouvelle pièce au puzzle émotionnel que constituent les vies d’Almut et Tobias. Cette technique, bien que déconcertante pour certains spectateurs, imite le fonctionnement de la mémoire humaine, où les moments marquants ne suivent pas nécessairement une logique temporelle mais s’enchaînent selon leur impact émotionnel. De leur rencontre accidentelle, où Almut renverse Tobias avec sa voiture, à leur quotidien empreint de tendresse, en passant par le bouleversement provoqué par la maladie d’Almut, le film invite les spectateurs à reconstituer eux-mêmes l’histoire tout en s’immergeant dans chaque instant poignant. Cette approche offre un contraste saisissant entre la fugacité de chaque moment et la profondeur des émotions qu’ils véhiculent.
Florence Pugh est éblouissante dans le rôle d’Almut Brühl, une cheffe étoilée dont la passion pour la cuisine et la vie est palpable à chaque scène. Almut est un personnage complexe, à la fois forte et vulnérable, qui refuse de se laisser définir uniquement par sa maladie ou ses relations. Pugh parvient à capturer ces nuances avec une sensibilité rare, montrant une femme déterminée à poursuivre ses rêves malgré l’adversité. Elle incarne également une mère et une épouse qui lutte pour laisser un héritage durable, non seulement à sa fille Ella, mais aussi au monde qu’elle quitte prématurément. Sa performance est un équilibre subtil entre moments de grâce et éclats de douleur, rendant son personnage profondément humain et attachant.
Face à elle, Andrew Garfield livre une interprétation tout aussi émouvante en Tobias Durand, un homme dont la sensibilité tranquille contraste avec l’énergie d’Almut. Tobias est un personnage empreint d’une compassion et d’une profondeur émotionnelle remarquables, mais il est aussi hanté par la peur de perdre celle qu’il aime. Garfield excelle dans les moments de silence, exprimant une gamme d’émotions par de simples regards ou gestes. Sa présence à l’écran complète parfaitement celle de Pugh, et leur alchimie est si puissante qu’elle semble presque tangible, capturant les spectateurs dans leur histoire d’amour.
Au-delà de la romance, le film explore des questions universelles sur le sens de la vie et de l’héritage. L’intrigue secondaire centrée sur la participation d’Almut à un prestigieux concours culinaire, malgré la détérioration de sa santé, apporte une profondeur supplémentaire au récit. Pour Almut, ce concours représente bien plus qu’une simple opportunité professionnelle : c’est un acte d’affirmation de soi, un moyen de montrer qu’elle est bien plus que sa maladie. Cette quête personnelle, bien que polarisante pour certains spectateurs, met en lumière le dilemme que beaucoup affrontent face à la mortalité : comment être à la fois pleinement présent pour ceux qu’on aime et fidèle à soi-même jusqu’au bout. Cette tension donne lieu à des moments d’une intensité dramatique saisissante, notamment dans les échanges entre Almut et Tobias, où leurs perspectives divergentes sur le présent et l’avenir créent des conflits profondément réalistes.
Visuellement, L’amour au présent (We Live In Time) est une œuvre d’une beauté remarquable. La direction de John Crowley est particulièrement efficace dans les scènes intimes, où il laisse les performances des acteurs occuper le devant de la scène sans distractions inutiles. Ces moments, comme une scène où Almut et Tobias partagent un dessert dans leur bain ou discutent dans leur jardin, sont empreints d’une sincérité et d’une tendresse qui résonnent longtemps après le générique de fin. La cinématographie de Stuart Bentley amplifie cette atmosphère avec des images à la fois chaleureuses et évocatrices, capturant la beauté de leur environnement et l’intensité de leurs émotions. La bande-son composée par Bryce Dessner est tout aussi mémorable, ses mélodies délicates renforçant l’impact émotionnel des scènes sans jamais le surcharger.
Cependant, le film n’est pas sans défauts. Le scénario de Nick Payne, bien que riche en émotions, frôle parfois le mélodrame, et la structure non linéaire peut sembler calculée à certains moments. De plus, l’intrigue secondaire autour du concours culinaire, bien qu’intéressante sur le plan thématique, pourrait être perçue comme une distraction par rapport à la relation centrale. Malgré ces imperfections, ces faiblesses sont largement compensées par la puissance des performances de Florence Pugh et Andrew Garfield, ainsi que par la profondeur émotionnelle du récit.
Au cœur de L’amour au présent (We Live In Time) se trouve une réflexion poignante sur la mémoire et l’héritage. Dans l’une des scènes les plus marquantes, Almut confie son désir de ne pas être réduite à sa maladie dans la mémoire de sa fille : « Je ne veux pas que ma relation avec Ella soit définie par mon déclin. » Cette déclaration résume à elle seule le message central du film : ce qui reste de nous, ce n’est pas seulement ce que nous avons accompli, mais aussi l’impact émotionnel que nous avons eu sur les autres. C’est une méditation sincère sur ce qui rend la vie significative, et un rappel que même dans les moments les plus sombres, il existe une beauté et une vérité à découvrir.
Dans un paysage cinématographique souvent dominé par les blockbusters cyniques ou les récits spectaculaires, L’amour au présent (We Live In Time) se démarque par sa sincérité désarmante et sa profondeur émotionnelle. C’est un film qui célèbre la beauté des relations humaines tout en confrontant les réalités difficiles de la perte et de la mortalité. Les performances de Florence Pugh et Andrew Garfield, alliées à la vision délicate de John Crowley, en font une œuvre rare et mémorable. À travers cette histoire, le film nous rappelle que le véritable trésor de la vie réside dans les moments que nous partageons avec ceux que nous aimons, et que le temps, bien qu’éphémère, peut être magnifiquement employé.
L’amour au présent (We Live In Time)
Réalisé par John Crowley
Écrit par Nick Payne
Produit par Adam Ackland, Leah Clarke, Guy Heeley
Avec Andrew Garfield, Florence Pugh
Directeur de la photographie : Stuart Bentley
Montage : Justine Wright
Musique : Bryce Dessner
Sociétés de production : Film4, SunnyMarch, Shoebox Films
Distribué par A24 (Etats-Unis), StudioCanal (France)
Dates de sortie : 6 septembre 2024 (TIFF), 18 octobre 2024 (États-Unis), 1er janvier 2025 (France).
Durée : 108 minutes
Vu le 26 novembre 2024 (VOD)
Note de Mulder: