Mother land

Mother land
Titre original:Never let go
Réalisateur:Alexandre Aja
Sortie:Cinéma
Durée:101 minutes
Date:25 septembre 2024
Note:
Depuis la fin du monde, June protège ses fils Samuel et Nolan, en les confinant dans une maison isolée. Ils chassent et cherchent de quoi survivre dans la forêt voisine, constamment reliés à leur maison par une corde que leur mère leur demande de ne surtout jamais lâcher. Car, si l’on en croit June, la vieille cabane est le seul endroit où la famille est à l’abri du Mal qui règne sur la Terre. Mais un jour, la corde est rompue, et ils n’ont d’autre choix que de s’engager dans une lutte terrifiante pour leur propre survie…

Critique de Mulder

Dans le dernier film d'Alexandre Aja, Mother Land (Never Let Go), Halle Berry livre une performance remarquable dans le rôle d'une mère qui tente désespérément de protéger ses deux fils, Percy Daggs IV (Nolan) et Anthony B. Jenkins (Samuel), d'un mal terrifiant et invisible qui rôde dans la nature. Le film mélange des éléments de survie post-apocalyptique et d'horreur psychologique, créant une atmosphère épaisse de tension et d'effroi. Ce film tente ainsi d'explorer les frontières fragiles entre la folie, la foi et le surnaturel, mais s'il est prometteur au départ, il finit par trébucher sous le poids de ses grandes ambitions.

Mother Land (Never Let Go) raconte l'histoire d'une famille liée par des liens à la fois littéraux et métaphoriques. Vivant isolée dans une cabane isolée et délabrée, le personnage de Halle Berry, connue seulement sous le nom de Momma, insiste pour que ses enfants ne s'éloignent jamais des cordes qui les attachent à leur maison. Ces cordes, croit-elle, sont la seule chose qui les protège d'une force maléfique qui a décimé le monde au-delà de leur porte. Cette mise en scène, empreinte d'effroi existentiel, interpelle immédiatement le spectateur, l'entraînant dans un monde où la sécurité est constamment menacée et où la frontière entre la réalité et l'illusion est très mince.

L'interprétation par Halle Berry d'une mère au bord de l'effondrement psychologique est l'élément le plus marquant du film. Elle oscille entre protection et paranoïa, incarnant une femme dont l'amour féroce pour ses enfants l'a poussée à adopter des mesures extrêmes, voire irrationnelles, pour assurer leur survie. La performance de Halle Berry est nuancée, transmettant à la fois la tendresse des soins maternels et la terreur d'une personne qui pense être la dernière défense contre un ennemi malveillant et invisible. Son personnage est profondément imparfait, mais Berry lui confère suffisamment d'humanité et de profondeur émotionnelle pour que le public lui reste sympathique, même si nous commençons à remettre en question sa prise sur la réalité.

Percy Daggs IV et Anthony B. Jenkins sont tout aussi convaincants dans le rôle de ses fils, Nolan et Samuel. Daggs, en particulier, livre une performance remarquable dans le rôle du plus sceptique des deux frères, ses doutes croissants sur les règles de sa mère étant à l'origine d'une grande partie de la tension du film. Jenkins Daggs IV, quant à lui, joue Samuel avec une vulnérabilité tranquille, incarnant un enfant déchiré entre la loyauté envers sa mère et la peur de l'inconnu. Ensemble, les acteurs créent une dynamique familiale crédible, avec des moments de tension, de peur et d'affection qui semblent authentiques et bien ancrés.

Le réalisateur Alexandre Aja, connu pour son travail dans le domaine de l'horreur avec des films comme Haute tension et Crawl, réalise un film visuellement saisissant. La photographie de Maxime Alexandre capture l'isolement claustrophobique de l'existence de la famille, en utilisant des plans larges de la forêt dense pour créer un sentiment à la fois d'effroi et de menace. La cabane elle-même, délabrée et usée, devient un personnage à part entière, à la fois sanctuaire et prison. La mise en scène d'Alexandre Aja dans les premières parties du film est tendue, équilibrant de manière experte le suspense et l'intrigue psychologique, alors que nous nous demandons si le danger est extérieur ou intérieur.

Mais c'est le scénario, écrit par KC Coughlin et Ryan Grassby, qui fait défaut au film. Le scénario met en place une prémisse fascinante, s'appuyant sur les thèmes de la peur, du contrôle et de la survie, mais il ne les exploite jamais pleinement. Il y a des allusions à des couches psychologiques et métaphoriques plus profondes - l'exploration de la maternité comme une forme de protection et d'emprisonnement, ou le traumatisme d'élever des enfants noirs dans un monde plein de dangers réels et imaginaires - mais ces idées ne sont pas pleinement développées. Au lieu de cela, le film s'appuie trop lourdement sur ses éléments surnaturels, laissant le drame psychologique plus convaincant sous-exploré.

Au fur et à mesure que Mother Land (Never Let Go) progresse, le récit devient de plus en plus fragmenté. La tension entre le scepticisme croissant de Nolan et la croyance inébranlable de sa mère dans le mal qui sévit à l'extérieur de la maison est bien construite, mais le troisième acte du film sape une grande partie de cette tension en optant pour une approche plus conventionnelle de l'horreur. Le rebondissement final, censé choquer et déstabiliser, ressemble davantage à un faux pas qui dilue la complexité psychologique établie précédemment. Ce qui aurait pu être une exploration profonde de la fragilité de l'esprit sous la contrainte devient une descente quelque peu prévisible dans les tropes du genre.

Cela dit, Mother Land (Never Let Go) n'est pas sans mérites. Les éléments techniques du film sont superbes. La 
partition de Robin Coudert est obsédante, un arrangement minimaliste qui renforce l'atmosphère sinistre du film sans écraser les images. La conception sonore est tout aussi efficace, utilisant le silence et des bruits subtils pour faire monter le suspense. Le rythme du film dans les deux premiers actes est délibéré, permettant des moments de tension tranquille qui sont plus troublants que les éventuels jump scares qui suivent.

La conception de la production par Jeremy Stanbridge ajoute à l'ambiance inquiétante du film. La cabane, avec son bois qui craque et ses intérieurs faiblement éclairés, ressemble à un organisme vivant, plein de secrets et de dangers. La forêt environnante est dense et inquiétante, évoquant la peur primitive de l'inconnu. Ce monde semble à la fois réel et cauchemardesque, et Aja l'utilise à bon escient pour créer le sentiment oppressant d'effroi qui imprègne la majeure partie du film.

Mother Land (Never Let Go) est un film qui promet plus qu'il ne tient. Il est à son meilleur lorsqu'il explore l'horreur psychologique de ses personnages - lorsque la véritable terreur n'est pas le mal à l'extérieur de la maison, mais la peur, le doute et le traumatisme à l'intérieur de celle-ci. Malheureusement, ces thèmes sont sacrifiés au profit d'éléments d'horreur plus traditionnels, et la conclusion du film semble précipitée et insatisfaisante. La réalisation d'Alexandre Aja et l'interprétation de Halle Berry rehaussent le niveau du film, mais elles ne compensent pas entièrement un scénario qui se perd. Malgré ses défauts, Mother Land (Never Let Go) reste un film intrigant dans le domaine de l'horreur psychologique. Il n'atteint peut-être pas les sommets des meilleures œuvres d'Alexandre Aja, mais c'est un film qui, dans ses moments les plus forts, offre un véritable suspense et un drame qui donne à réfléchir. Il nous rappelle la frontière ténue entre la protection et le contrôle, entre l'amour et la peur - une frontière qui, une fois franchie, peut avoir des conséquences terrifiantes.

Mother Land (Nevet Let Go)
Réalisé par Alexandre Aja
Écrit par Kevin Coughlin, Ryan Grassby
Produit par Shawn Levy, Dan Cohen, Alexandre Aja, Dan Levine
Avec Halle Berry, Percy Daggs IV, Anthony B. Jenkins, Matthew Kevin Anderson, Christin Park, Stephanie Lavigne
Directeur de la photographie : Maxime Alexandre
Montage : Elliot Greenberg
Musique : Robin « Rob » Coudert
Sociétés de production : 21 Laps Entertainment, HalleHolly, Media Capital Technologies
Distribué par Lionsgate (Etats-Unis), Metropolitan FilmExport (France)
Dates de sortie : 16 septembre 2024 (Regal Times Square), 20 septembre 2024 (États-Unis), 25 septembre 2024 (États-Unis),
Durée : 101 minutes

Vu le 30 septembre 2024 au Gaumont Disney Village, Salle 16 place A19

Note de Mulder: