Maxxxine

Maxxxine
Titre original:Maxxxine
Réalisateur:Ti West
Sortie:Cinéma
Durée:104 minutes
Date:31 juillet 2024
Note:
Los Angeles, dans les années 80. Star de films pour adultes et aspirante actrice, Maxine Minx décroche enfin le rôle de ses rêves. Mais alors qu’un mystérieux tueur traque les starlettes d’Hollywood, des indices sanglants menacent de dévoiler le sombre passé de Maxine.

Critique de Mulder

MaXXXine, réalisé par Ti West, est un voyage viscéral dans les rues éclairées au néon et alimentées par la cocaïne du Hollywood des années 1980, concluant la trilogie commencée avec X et poursuivie avec Pearl. Ce dernier chapitre se concentre sur Maxine Minx, une star du porno qui rêve de se faire une place dans l'industrie du cinéma grand public et qui a échappé aux horreurs du massacre du Texas dépeint dans X. Aujourd'hui, à Los Angeles, Maxine est déterminée à réaliser sa version du rêve américain, même si elle doit pour cela naviguer dans un monde aussi dangereux et impitoyable que celui dont elle s'est échappée.

Mia Goth reprend son rôle de Maxine avec une intensité magnétique qui porte le film. Son interprétation de Maxine est une étude de contrastes : elle est à la fois l'incarnation de la détermination et une femme hantée par son passé. Mia Goth saisit la vulnérabilité et l'impitoyabilité du personnage à parts égales, faisant de Maxine non seulement une survivante, mais aussi une force de la nature à part entière. Tout au long de MaXXXine, le mantra de Maxine, Je n'accepterai pas une vie que je ne mérite pas, résonne comme un cri de guerre, la conduisant à travers le paysage périlleux du Hollywood des années 1980, où la célébrité est à la fois un attrait et un piège mortel.

Le film s'ouvre sur l'audition de Maxine pour le rôle principal dans The Puritan II, un film d'horreur dirigé par la dure et énigmatique Elizabeth Bender, interprétée avec une précision glaçante par Elizabeth Debicki. Bender est un personnage qui incarne les contradictions d'Hollywood : elle est à la fois une visionnaire et le produit d'un système qui réduit les femmes à l'état d'objet et les rejette. L'interprétation de Bender par Elizabeth  Debicki est l'un des points forts du film, car elle navigue dans la misogynie de l'industrie avec un comportement froid et calculateur, tout en montrant un côté nourricier envers Maxine, voyant en elle le potentiel d'une véritable célébrité.

Alors que les rêves hollywoodiens de Maxine semblent à portée de main, le récit prend une tournure sombre. Une série de meurtres brutaux commence à éclaircir les rangs de ses amis et collègues, faisant écho aux accents violents du genre slasher auquel MaXXXine rend hommage et qu'il critique à la fois. L'atmosphère du film est chargée de tension, Maxine se trouvant prise entre les jeux mortels d'un mystérieux harceleur et la nature prédatrice d'Hollywood elle-même. La mise en scène de West est magistrale dans ces séquences, utilisant les lieux emblématiques de la ville - tels que le Walk of Fame, le décor du Bates Motel et les arrière-plans miteux d'Hollywood - pour créer un sentiment d'inquiétude qui imprègne l'ensemble du film.

Kevin Bacon livre une performance remarquable dans le rôle de John Labat, un détective privé véreux aux dents en or et à la voix traînante du Sud, qui poursuit Maxine sans relâche, fouillant dans son passé sanglant. Le Labat de Kevin Bacon est un retour en arrière aux détectives classiques des films noirs, mais avec une touche de modernité : il est autant un prédateur que ceux sur lesquels il enquête, et ses interactions avec Maxine ajoutent une couche supplémentaire de menace à l'histoire. La présence de Labat dans le film rappelle constamment que le passé de Maxine n'est jamais bien loin et qu'Hollywood est un endroit où les secrets sont à la fois monnaie et malédiction.

Les acteurs secondaires enrichissent encore la tapisserie grinçante du film. Giancarlo Esposito est convaincant dans le rôle de Teddy Night, l'agent et l'avocat de Maxine, qui allie l'hypocrisie à une loyauté protectrice. Sa performance donne un aperçu des machinations des bas-fonds d'Hollywood, où les affaires se concluent dans les coulisses et sur les plateaux de tournage, loin du glamour que projette l'industrie. Halsey et Lily Collins apportent un mélange d'humour et de tragédie à leurs rôles de compagnes d'actrice de Maxine, incarnant les dualités de l'ambition et de l'exploitation qui définissent leurs vies. Bobby Cannavale et Michelle Monaghan incarnent quant à eux les inspecteurs Torres et Williams de la police de Los Angeles, dont l'enquête sur les meurtres les mène à Maxine. Leurs personnages sont bien construits, offrant un contrepoint au chaos qui entoure Maxine, mais leur scepticisme et leur détermination révèlent la corruption profondément ancrée dans le système qu'ils représentent.

L'un des aspects les plus frappants de MaXXXine est son style visuel et auditif. Ti West et son directeur de la photographie Eliot Rockett ont créé un film qui ne se déroule pas seulement dans les années 1980, mais qui donne l'impression d'avoir été réalisé à cette époque. Les textures granuleuses, les néons vibrants et la bande-son riche en synthétiseurs, avec des morceaux de groupes comme Frankie Goes to Hollywood et ZZ Top, contribuent tous à l'esthétique immersive du film. Le travail de la caméra de Eliot Rockett est particulièrement remarquable dans les nombreuses séquences de poursuite du film, où la fuite de Maxine pour échapper à ses poursuivants dans les rues sombres et les backlots d'Hollywood évoque un sentiment d'effroi et de désorientation, à l'instar des films de Brian De Palma et de Dario Argento, dont West s'inspire manifestement.

Cependant, MaXXXine est plus qu'un simple hommage stylistique à l'horreur des années 1980. Le scénario de Ti West plonge profondément dans les questions culturelles et sociétales de l'époque, en particulier le sexisme rampant et l'exploitation dans l'industrie du divertissement. Le commentaire du film sur la dynamique du pouvoir à Hollywood est incisif et sans complaisance. Dans une scène mémorable, après avoir réussi son audition, Maxine est invitée à se déshabiller par les producteurs masculins - un moment qui est à la fois une critique de l'objectivation des femmes à Hollywood et un reflet de la compréhension par Maxine des règles qu'elle doit respecter pour réussir. Cette scène est emblématique des thèmes plus généraux du film, où la recherche de la célébrité est inextricablement liée aux compromis, à la manipulation et à la perte de l'autonomie personnelle.

Au fur et à mesure que le nombre de victimes augmente, MaXXXine s'intensifie, culminant dans un troisième acte à la fois sanglant et opératique. Ici, Ti West met le paquet, mêlant l'horreur à la satire d'une manière à la fois palpitante et dérangeante. Le point culminant du film, qui a pour toile de fond une fête chaotique à Hollywood Hills, est une explosion frénétique de violence et de révélations, où Maxine affronte non seulement le tueur, mais aussi les parties les plus sombres d'elle-même. La conclusion de MaXXXine est à la fois choquante et inévitable, bouclant la boucle de la trilogie tout en laissant place à une réflexion sur la nature de l'ambition et le prix de la survie.

Dans ses derniers instants, MaXXXine s'impose comme une conclusion appropriée à la trilogie de Ti West. Le film est une célébration du cinéma de genre, mais il le transcende également en offrant une exploration profonde et nuancée de ses personnages et de ses thèmes. Maxine Minx, interprétée par Mia Goth, est un personnage qui restera sans doute dans les mémoires comme l'une des figures les plus complexes et les plus fascinantes du cinéma d'horreur - une anti-héroïne qui est à la fois victime de sa situation et survivante impitoyable.

MaXXXine n'est pas seulement un film pour les fans d'horreur, mais pour tous ceux qui s'intéressent aux croisements du cinéma, de la culture et de l'identité. C'est un film qui interpelle, qui divertit et qui, en fin de compte, laisse une impression durable. Ti West et Mia Goth ont conçu une trilogie qui traite autant de l'histoire et de l'avenir de l'horreur que du parcours personnel de ses personnages. Avec MaXXXine, ils livrent une déclaration puissante sur l'attrait durable de la célébrité et sur les limites que l'on est prêt à franchir pour l'atteindre, même si le prix à payer est énorme. Un chef d’œuvre cinématographique comme on aimerait en voir plus souvent au cinéma.

MaXXXine
Écrit et réalisé par Ti West
Produit par Jacob Jaffke, Ti West, Kevin Turen, Harrison Kreiss, Mia Goth
Avec Mia Goth, Elizabeth Debicki, Moses Sumney, Michelle Monaghan, Bobby Cannavale, Halsey, Lily Collins, Giancarlo Esposito, Kevin Bacon
Cinématographie : Eliot Rockett
Montage : Ti West
Musique : Tyler Bates
Sociétés de production : Motel Mojave, Access Entertainment
Distribué par A24 (Etats-Unis), Condor Films (France)
Dates de sortie : 24 juin 2024 (TCL Chinese Theatre), 5 juillet 2024 (États-Unis), 31 juillet 2024 (France).
Durée : 104 minutes

Vu le 10 août 2024 au Gaumont Disney Village, Salle 4 place A19

Note de Mulder: