Titre original: | Abigail |
Réalisateur: | Matt Bettinelli-Olpin, Tyler Gillett |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 109 minutes |
Date: | 29 mai 2024 |
Note: |
Abigail, la dernière œuvre des réalisateurs Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett, connus pour leur travail sur Ready or Not » et les récentes suites de Scream, est un film qui fusionne audacieusement les genres du polar et de l'horreur en un spectacle chaotique et sanguinolent. Ce film est autant un voyage dans l'absurde et le grotesque qu'une exploration de l'humour noir et de la dynamique des personnages, ce qui en fait une œuvre à part dans le cinéma d'horreur contemporain.
Le récit commence par une mise en scène qui pourrait facilement appartenir à un roman d'Agatha Christie ou à un film de Quentin Tarantino. Un groupe de criminels disparates est recruté pour un enlèvement apparemment simple. Leur cible est une ballerine de 12 ans nommée Abigail, qu'ils doivent retenir contre une rançon en échange d'une forte somme d'argent. Les criminels, qui utilisent des noms de code inspirés du Rat Pack, forment une équipe hétéroclite avec des personnalités et des antécédents distincts. Ils comprennent Joey (Melissa Barrera), l'infirmière avisée, Frank (Dan Stevens), l'ancien flic cynique, Sammy (Kathryn Newton), la pirate informatique pleine d'entrain, Peter (Kevin Durand), l'adorable gros bras, Dean (Angus Cloud), le conducteur de fuite défoncé, et Rickles (William Catlett), le tireur d'élite stoïque. Leur supérieur, Lambert (Giancarlo Esposito), orchestre l'opération, offrant un vernis de professionnalisme qui s'effrite rapidement.
Alisha Weir brille dans le rôle d'Abigail, initialement présentée comme une enfant douce et innocente. Cependant, au fur et à mesure que l'histoire progresse, il devient évident qu'Abigail est loin d'être ordinaire. C'est une vampire vieille de plusieurs siècles qui possède un mélange mortel d'innocence et de malice. Cette révélation, bien qu'évoquée dans le marketing du film, n'enlève rien au choc et à l'horreur qu'éprouvent les personnages lorsqu'ils découvrent la véritable nature de leur captive.
Le premier acte du film établit méticuleusement la dynamique du groupe et les histoires individuelles, créant une base de tension et d'anticipation. Joey émerge comme l'antihéroïne, ses instincts maternels et son intelligence de la rue faisant d'elle le noyau émotionnel du film. L'interprétation de Joey par Barrera est à la fois nuancée et convaincante, conférant au film un sentiment de réalisme au milieu du chaos surnaturel qui s'ensuit.
Au fil de l'intrigue, le manoir - brillamment conçu par Susie Cullen - se transforme en un personnage à part entière. Ce décor sinistre et labyrinthique est rempli de passages cachés et de surprises macabres, créant une atmosphère claustrophobe qui renforce les éléments d'horreur du film. Les réalisateurs utilisent ce décor à merveille, créant des séquences à la fois visuellement époustouflantes et intensément suspensives.
L'ensemble du casting est l'une des plus grandes forces du film, chaque acteur apportant de la profondeur et du charisme à son rôle. Dan Stevens se distingue dans le rôle de Frank, délivrant ses répliques avec un charme menaçant qui rend son personnage à la fois détestable et captivant. Le personnage de Sammy, interprété par Kathryn Newton, fournit une grande partie du soulagement comique du film, son personnage doué pour la technologie naviguant dans l'horreur avec esprit et résilience. L'interprétation de Peter par Kevin Durand ajoute une touche attachante de simplicité et de loyauté, faisant de son personnage l'un des plus sympathiques.
La performance d'Alisha Weir dans le rôle d'Abigail est tout simplement remarquable. Elle passe sans effort de l'image d'une enfant effrayée à celle d'une prédatrice vicieuse, sa double nature ajoutant une couche de complexité au personnage. La capacité de Weir à transmettre à la fois l'innocence et la malveillance fait d'Abigail l'un des personnages les plus mémorables du cinéma d'horreur récent.
Le rythme du film est délibérément mesuré dans le premier acte, ce qui permet une lente montée de la tension et du développement des personnages. Si cette approche peut sembler léthargique pour certains, elle s'avère payante une fois que les éléments horrifiques passent à la vitesse supérieure. Le scénario, écrit par Stephen Shields et Guy Busick, équilibre les moments axés sur les personnages et les séquences d'horreur intenses, même s'il s'appuie parfois sur des dialogues lourds d'explications.
L'apogée d'Abigail est un chef-d'œuvre de gore et d'effets pratiques, mettant en évidence l'engagement de Bettinelli-Olpin et Gillett en faveur d'une horreur viscérale et tangible. Les réalisateurs n'y vont pas par quatre chemins, livrant une série de meurtres créatifs et effroyables qui sont à la fois choquants et empreints d'humour noir. Cette préférence pour les effets pratiques par rapport aux images de synthèse renforce l'impact du film, en rendant l'horreur plus immédiate et plus réelle.
Abigail se livre également à un méta-commentaire sur l'histoire des vampires, en jouant avec les tropes classiques et en les subvertissant. Le film reconnaît ses prédécesseurs, de Dracula's Daughter aux succès modernes comme « M3GAN », tout en se taillant une place unique dans le genre. Cette conscience de soi ajoute une couche de profondeur au récit, invitant le public à s'engager dans le film à de multiples niveaux.
Outre l'horreur et l'humour, Abigail aborde les thèmes de la rédemption et de la parentalité. Le parcours de Joey n'est pas seulement une lutte pour la survie, mais aussi une quête de rédemption, car elle est confrontée à ses erreurs passées et cherche à protéger Abigail. Ce courant émotionnel sous-jacent ajoute de l'émotion au film, rendant le combat de Joey plus compréhensible et son personnage plus sympathique.
Malgré ses nombreux points forts, Abigail n'est pas exempt de défauts. Les problèmes de rythme du premier acte peuvent donner l'impression que la construction est lente, et le film a parfois du mal à équilibrer ses nombreux fils narratifs. La dépendance du scénario à l'égard de l'exposition peut parfois sembler lourde, ce qui nuit aux interactions organiques entre les personnages.
Néanmoins, Abigail réussit à offrir une expérience palpitante et sanglante qui satisfera les fans d'horreur et de comédie noire. Ses performances solides, sa réalisation inventive et ses effets macabres en font un ajout mémorable au genre. Même si le film ne révolutionne pas le cinéma de vampires, il offre une vision fraîche et amusante de tropes familiers, ce qui en fait un film à voir absolument pour les amateurs d'horreur.
Abigail est un film sauvage et divertissant qui combine des éléments d'horreur, de comédie et de polar dans un ensemble cohérent et captivant. Son casting solide, sa réalisation inventive et son attachement aux effets pratiques en font un film à part dans le cinéma d'horreur contemporain. Bien qu'il ne soit pas parfait, ce film offre une expérience unique et agréable qui laissera certainement une impression durable.
Abigail
Réalisé par Matt Bettinelli-Olpin, Tyler Gillett
Écrit par Stephen Shields, Guy Busick
Produit par William Sherak, James Vanderbilt, Paul Neinstein, Tripp Vinson, Chad Villella
Avec Melissa Barrera, Dan Stevens, Kathryn Newton, Will Catlett, Kevin Durand, Angus Cloud, Alisha Weir, Giancarlo Esposito
Directeur de la photographie : Aaron Morton
Montage : Michael Shawver
Musique : Brian Tyler
Sociétés de production : Project X Entertainment, Vinson Films, Radio Silence Productions
Distribué par Universal Pictures (Etats-Unis), United Pictures International France (France)
Dates de sortie : 7 avril 2024 (Overlook Film Festival), 19 avril 2024 (États-Unis), 29 mai 2024 (France).
Durée : 109 minutes
Vu le 10 mai 2024 (VOD)
Note de Mulder: