Titre original: | Pigen med nalen |
Réalisateur: | Magnus von Horn |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 115 minutes |
Date: | Non communiquée |
Note: |
La Jeune femme à l’aiguille, réalisé par Magnus von Horn, est un film obsédant et magistral qui plonge dans la sombre réalité de Copenhague après la Première Guerre mondiale. Ce drame d'horreur gothique danois, tourné en noir et blanc par le directeur de la photographie Michał Dymek, plonge le public dans un monde de désespoir et de détresse, en racontant l'histoire d'une jeune femme, Karoline, interprétée par Vic Carmen Sonne, dont la vie s'enfonce dans la noirceur et la souffrance. Le film, qui se déroule à Copenhague en 1917, s'ouvre sur Karoline qui risque d'être expulsée de son minuscule appartement. Son mari, Peter, interprété par Besir Zeciri, est présumé mort à la guerre, la laissant se débrouiller seule dans une société qui offre peu de soutien aux femmes dans sa situation. Travaillant comme couturière dans une usine de vêtements, Karoline a du mal à joindre les deux bouts. Sa vie prend un tournant lorsqu'elle entame une liaison avec Jørgen, le propriétaire de l'usine, interprété par Joachim Fjelstrup, qui lui promet un avenir meilleur.
Mais cet espoir est vite brisé par le retour inattendu de Peter, défiguré par la guerre, et par l'abandon de Jørgen sous la pression de sa famille. Désespérée et seule, Karoline tente de se faire avorter dans un bain public, où elle rencontre Dagmar, interprétée par Trine Dyrholm, propriétaire d'un magasin de bonbons à l'activité sinistre. Dagmar propose de prendre l'enfant non désiré de Karoline et de lui trouver un foyer, une promesse qui entraîne Karoline dans un réseau de tromperies et d'horreurs. Au fur et à mesure que Karoline s'enfonce dans le monde de Dagmar, elle découvre la véritable nature de son activité de "courtier en bébés", ce qui conduit à une série d'événements choquants et déchirants.
La réalisation de Magnus von Horn est méticuleuse, équilibrant le récit sombre du film avec des moments de tendresse inattendus. Le scénario, coécrit avec Line Langebek, tisse une histoire complexe de survie et d'ambiguïté morale, mettant le public au défi de compatir au sort de Karoline. Le style visuel du film, fortement influencé par l'expressionnisme allemand, crée une atmosphère de morosité implacable, renforcée par la cinématographie de Michał Dymek, qui capture le contraste saisissant entre l'ombre et la lumière. Chaque image est soigneusement composée, reflétant le trouble intérieur des personnages et l'environnement oppressant qu'ils habitent. Cette attention méticuleuse aux détails s'étend à la conception de la production du film par Jagna Dobesz, qui recrée de manière authentique les conditions de vie sordides et le sombre paysage urbain de la Copenhague de l'après-guerre. L'utilisation de lieux réels en Pologne et en Suède ajoute à l'authenticité du film, ancrant l'histoire dans une réalité tangible qui rend l'horreur en cours encore plus percutante.
Vic Carmen Sonne livre une performance puissante dans le rôle de Karoline, incarnant la résilience et la vulnérabilité de son personnage. Son interprétation est à la fois obsédante et convaincante, entraînant le public dans sa tourmente émotionnelle. La capacité de Mme Sonne à transmettre toute une gamme d'émotions avec subtilité et nuance permet à Karoline de rester un personnage sympathique et complexe, même lorsqu'elle prend des décisions moralement ambiguës. Trine Dyrholm est tout aussi impressionnante dans le rôle de Dagmar, apportant à son rôle un calme glacial qui rend son personnage à la fois sympathique et terrifiant. La performance de Dyrholm capture la dualité de la nature de Dagmar, la présentant comme une figure maternelle avec un côté sombre et malveillant. Les acteurs secondaires, dont Joachim Fjelstrup et Besir Zeciri, ajoutent de la profondeur au film, créant une riche tapisserie de personnages luttant contre leurs circonstances. L'interprétation de Jørgen par Fjelstrup met en évidence les désirs contradictoires et la lâcheté ultime du personnage, tandis que celle de Peter par Zeciri évoque à la fois la pitié et l'horreur.
La musique du film, composée par Frederikke Hoffmeier, est un élément marquant, ajoutant à l'atmosphère oppressante et inquiétante. La musique, souvent discordante, souligne la tension et l'effroi qui imprègnent l'histoire. La partition de Hoffmeier renforce l'impact émotionnel du film, faisant ressentir au spectateur le poids du désespoir de Karoline et l'imminence de la mort. Combiné au montage précis d'Agnieszka Glinska, le film maintient un rythme régulier, se construisant jusqu'à l'apogée avec une intensité mesurée. Le montage d'Agnieszka Glinska assure la cohésion et l'intérêt de la narration, en tissant harmonieusement les différents fils de l'intrigue et les arcs des personnages.
La Jeune femme à l’aiguille est une exploration sombre et évocatrice de la souffrance et de la résilience humaines. C'est un film qui ne craint pas les dures réalités de son contexte, dépeignant les conséquences brutales de la négligence de la société et les mesures désespérées prises par ceux qui n'ont pas d'autre choix. Bien que sa noirceur puisse limiter son audience, le talent artistique et la profondeur émotionnelle du film en font une expérience fascinante et inoubliable. La capacité de Magnus von Horn à mêler le contexte historique à l'horreur psychologique donne un film qui est à la fois une œuvre d'époque et un commentaire intemporel sur la nature humaine. Le récit aborde les thèmes de la survie, du compromis moral et de l'impact des structures sociétales sur les vies individuelles, ce qui en fait une œuvre qui donne à réfléchir et qui résonne sur le plan émotionnel.
La réalisation de Von Horn et les prouesses techniques du film sont complétées par les performances exceptionnelles de ses acteurs. Les interprétations de Vic Carmen Sonne et de Trine Dyrholm sont le point d'ancrage du film, donnant un visage humain aux événements déchirants de l'histoire. Les acteurs secondaires, notamment Joachim Fjelstrup et Besir Zeciri, contribuent à la riche dynamique des personnages du film, créant ainsi un portrait à multiples facettes d'une société en plein bouleversement. L'exploration des rôles des hommes et des femmes, de la dynamique du pouvoir et de l'impact de la guerre ajoute de la profondeur à son récit, ce qui en fait une expérience cinématographique profonde et marquante.
La Jeune femme à l’aiguille témoigne de la capacité du cinéma à aborder des sujets difficiles avec grâce et une honnêteté sans faille. C'est un film qui pousse son public à réfléchir aux dures réalités du passé et à leur pertinence pour les questions contemporaines. Magnus von Horn a conçu un film qui est à la fois visuellement époustouflant et émotionnellement fort, laissant un impact durable sur ses spectateurs. La Jeune femme à l’aiguille est une œuvre importante dans la filmographie de Magnus von Horn et une entrée remarquée dans le cinéma d'horreur gothique contemporain.
La Jeune femme à l'aiguille (Pigen med nålen)
Réalisé par Magnus von Horn
Écrit par Magnus von Horn, Line Langebek
Produit par Malene Blenkov, Mariusz Włodarski
Avec Vic Carmen Sonne, Trine Dyrholm, Besir Zeciri, Joachim Fjelstrup, Tessa Hoder, Avo Knox Martin
Directeur de la photographie : Michał Dymek
Montage : Agnieszka Glinska
Musique : Frederikke Hoffmeier
Sociétés de production : Nordisk Film Denmark, Lava Films, Nordisk Film Sweden, Film i Väst, EC1 Łódź, Lower Silesia Film Centre.
Distribué par Nordisk Film
Date de sortie : 15 mai 2024 (Cannes)
Durée du film : 115 minutes
Vu le 25 mai 2024 au Gaumont Opéra Premier, Salle 1
Note de Mulder: