
Titre original: | Primary Colors |
Réalisateur: | Mike Nichols |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 137 minutes |
Date: | 13 mai 1998 |
Note: | |
Le jeune Henry Burton se porte avec l'idée de rejoindre la campagne présidentielle du gouverneur Jack Stanton. Immédiatement fasciné par le candidat et la nouvelle foi en la politique qu'il semble personnifier, Henry devient un des fers de lance de la course à la Maison Blanche, précédée par celle à l'investiture du parti démocrate. Il doit cependant se rendre compte, à force d'intrigues et de détails scabreux révélés sur la vie privée de son poulain, que l'innocence n'existe pas plus dans le domaine politique qu'ailleurs.
Critique de Tootpadu
Ecrire l'Histoire, telle est l'ambition de certains personnages de cette satire politique intéressante, mais inégale. A l'image de ce voeux pieux qui se voit très rapidement piétiné, la portée du film qui voudrait dresser un portrait avec le moins de concessions possibles du monde corrompu de la politique contemporaine, se trouve trop souvent diminuée par une structure laborieuse et un point de départ quelque peu faiblard. Le choix de laisser se dérouler tout le récit à partir du point de vue de ... devient en effet l'élément majeur de l'échec relatif de l'entreprise. Adrian Lester qui interprète ce rôle clef a certes du talent et des attributs physiques presque abusivement mis en valeur, par contre, il ne dispose pas de quoi tenir tête avec son jeu passif et bien élevé aux manigances qui se passent tout autour de lui. Ce personnage-guide qui aurait dû être le point d'ancrage de l'intérêt des spectateurs devient sous ses traits une source de fadeur inépuisable.
Pas assez de cette prémisse décevante, la structure-même du film se prête trop souvent à la répétition lassante, à force des seuls enjeux augmentés alors que le dispositif reste très semblable. On a en effet l'impression d'assister à une suite quasiment ininterrompue d'attaques contre la vie privée du candidat. Pour un film de presque deux heures et demie sur un sujet rarement traité au cinéma en raison de son trop fort potentiel théorique, cette trame s'avère mince au point de lui porter préjudice. Ainsi, les quelques observations perspicaces se perdent malheureusement dans la préoccupation principale d'enchaîner des scandales de plus en plus effroyables pour l'opinion publique bien pensante.
Malgré ces deux défauts loin d'être négligeables, le film connaît ses heures de gloire passagères. Tout d'abord par son existence même, qui s'intègre mieux dans le contexte de l'époque de sa production, il y a à peine cinq ans, mais qui paraît déjà très loin. Un pur produit de l'ère Clinton, ce regard sur les frasques extra-conjugales d'un candidat sous les traits duquel on reconnaît sans mal le futur président, s'inscrit sans effort dans le courant finalement très court de films sur la présidence, qu'ils soient comiques (Président d'un jour), d'action (Air Force One) ou, comme celui-ci, d'une tendance plus satirique (Des hommes d'influence). En vue de notre temps présent, qui inspire les cinéastes davantage à pousser des cris d'alarme face à de nouvelles barbaries (qu'elles soient américaines ou autre, mais n'entrons pas dans ce débat ici ...), on en arriverait presque à regretter ce temps révolu d'une innocence toute relative. Avec ses prises de position au fond très idéalistes – là encore le propos manque cruellement de mordant – Primary Colors se dresse en quelque sorte comme un témoin nostalgique de son époque, aussi pourrie soit-elle.
Il serait injuste envers Mike Nichols de ne pas rendre compte de la maîtrise de sa mise en scène, qui donne une impression d'un ensemble fort et homogène à un scénario qui, sur le papier, ne l'était peut-être pas. Mais c'est probablement là le paradoxe principal de ce film que l'on rêve aimer plus, que de ne pas su transformer entièrement le potentiel qui se trouvait à la fois dans certaines parties de l'histoire (il arrive en effet assez rarement de trouver des interrogations morales ouvertes au cinéma), dans l'excellence de la distribution (surtout Kathy Bates qui va jusqu'à tirer par moments trop le film vers elle) et de l'équipe technique.
En gros, un ratage curieux et touchant dans un genre de film qui n'a hélas plus du tout la côte de nos jours, grâce à l'incapacité même plus larvée des hommes qui nous gouvernent.
Revu le 27 avril 2004, en DVD, en VO
Revu le 17 juillet 2008, en DVD, en VO
Note de Tootpadu: