Snowden

Le nouveau film du réalisateur Oliver Stone permet de mieux comprendre l’importance d’Edward Snowden dans notre société actuelle et surtout l’omniprésence des moyens de communication. Sur un scénario qu’il a co-écrit avec Kiera Fitzgerald, le réalisateur, ancien photographe de guerre ; le film s’attèle à nous présenter l’envers du décor des services de renseignements américains et de leur cyber-surveillance mondiale. Oliver Stone nous livre avec son nouveau film non seulement un nouveau biopic passionnant mais surtout un état réaliste et froid dans lequel nos habitudes de consommation, nos conversations peuvent être à tout moment écoutées et retenues à notre charge. Les scénaristes ont trouvé suffisamment de matière dans les livres The Snowden Files: The Inside Story of the World’s Most Wanted Man, du journaliste Luke Harding et Time of the Octopus de Anatoly Kucherena pour nous livrer un thriller politique fort et instructif.

Il aura fallu quatre ans pour découvrir le nouveau thriller choc d’Oliver Stone. Sa filmographie tourne continuellement autour du patriotisme américain et recelant de nombreux films indispensables à toute bonne culture cinématographique (Salvador (1986), Platoon (1986), JFK (1991), Tueurs nés (1994), L’enfer du dimanche (1999), Alexandre (2004)..). Certes ses derniers films ne nous avaient pas totalement convaincu comme cette suite inutile à Wall Street, Wall Street ; l’argent ne dort jamais (2010) ou Savages (2012) mais il faut reconnaitre qu’il reste l’un des grands réalisateurs actuels. Un passionné de cinéma qui conçoit ses films comme un véritable journaliste en étant précis, évitant tout effet inutile et surtout sachant parfaitement diffuser les informations. Une nouvelle fois, il témoigne du fait que pour réaliser un bon film il faut non seulement un scénario porteur mais surtout des comédiens convaincants et totalement investis pour donner aux personnages la force nécessaire. On retrouve ainsi dans Snowden un casting composé d’excellents comédiens tel Joseph Gordon-Levitt (dans le rôle titre d’Edwar Snowden) mais aussi Shailene Woodley (Lindsay Mills) et dans les nombreux seconds rôles Melissa Leo (Laura Poitras), Zachary Quinto (Glenn Greenwald), Rhys Ifans (Corbin O’Brian), Tom Wilkinson (Ewen MacAskill), Timothy Olyphant (Matt Kovar), Nicolas Cage (Hank Forrester) et Scott Eastwood (Trevor James). Cette grande richesse de seconds rôles donne à Snowden des fondations solides.

Certes Snowden aurait pu gagner en étant plus clinquant et en proposant un rythme plus soutenu mais le réalisateur a préféré revenir à une mise en scène apurée et nous livrer simplement des faits expliquant comment un patriote américain, un surdoué informaticien ancien employé du gouvernement américain a décidé de divulguer des informations top secrètes et ainsi devoir quitter le territoire américain pour se réfugier en Russie. Derrière cette histoire, se cache aussi la relation passionnante entre un homme persécuté et son amie Lindsay Mills (Shailene Woodley parfaite) montrant que ce dernier pour la protéger des agissements des programmes de surveillance de masse américains a été prêt à risquer sa vie et son futur. En révélant le système de surveillance de la NSA dans ses pages grâce aux documents divulgués par Snowden a remporté en avril 2017 le prix Pultizer tandis que celui-ci continue à devoir vivre en reclus en Russie pour ne pas être emprisonné aux Etats-Unis.

Le cas Snowden donne non seulement lieu ici à l’un des meilleurs films d’Oliver Stone mais aussi a été à la source d’un excellent documentaire Citizenfour (2014) permettant de mieux comprendre la prise de position de Snowden. Certes le film donne plutôt raison à Snowden et condamne par la même la position des Etats-Unis prêt à tout pour avoir un contrôle mondial. Derrière le film comment ne pas voir la vision d’un réalisateur encore capable de prendre des risques et surtout de traiter de sujets polémiques avec un talent indéniable. Si Snowden mérite d’être découvert et défendu c’est surtout pour son réalisateur préférant aborder des sujets originaux et sensibles que de se mouler dans des films manquant cruellement d’ambition et formatés par l’usine hollywoodienne pour livrer des films le plus souvent aussi efficaces que dénoués d’âme..

Vu le 10 octobre 2016 au Gaumont Disney Village, Salle 1, place F15 en VO

Note de Mulder: