Titre original: | Arrête ton cinéma |
Réalisateur: | Diane Kurys |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 90 minutes |
Date: | 13 janvier 2016 |
Note: |
C’est dans l’enthousiasme que Sybille démarre l’écriture de son premier film. Actrice reconnue, elle va passer pour la première fois de l’autre côté de la caméra. Tout semble lui sourire. Ses productrices Brigitte et Ingrid sont deux personnages loufoques mais attachants et Sybille se jette avec elles dans l’aventure, mettant de côté sa vie familiale. Mais, du choix improbable des actrices, aux réécritures successives du scénario, en passant par les refus des financiers, le rêve merveilleux va se transformer en cauchemar. Incorrigible optimiste, Sybille réalisera trop tard que ses productrices fantasques et totalement déjantées vont l’entraîner dans leur folie…
Le milieu du cinéma pourrait être vu comme un monde impitoyable dans lequel la concurrence est rude et dans lequel les comédiens doivent non seulement trouver leur place mais également savoir construire une véritable carrière tout en cherchant la reconnaissance du public et des professionnels. De nombreux films comme The player (1992), Panique à Hollywood (2008), Entourage (2015) ont parfaitement saisi le côté caricatural du monde du cinéma. De la même manière, le nouveau film de Diane Kurys (La Baule-les-Pins (1990), Pour une femme (2013)) bénéficie d’une totale liberté de ton et peut donc livrer une peinture au vitriol guère reluisante du milieu de la production et surtout du métier actuel d’acteur. Arrête ton cinéma est également l’adaptation du roman C’est le métier qui rentre écrit par Sylvie Testud et qui lui permet de régler quelques comptes avec le milieu du cinéma et surtout de donner un témoignage croustillant sur la difficulté d’une comédienne de sortir de l’image donnée au public. Réaliser un premier film pour un comédien revient à parcourir un véritable champ de mines sur lequel les difficultés surgissent de partout. Ainsi la comédienne aidée par la réalisatrice co-signe le scénario de ce film et adapte son roman tout en gardant l’esprit. L’alchimie entre ces deux artistes se ressent totalement à l’image et nous permet de passer un bon moment de cinéma.
Le film nous présente ainsi Sybille une comédienne appréciée qui tente depuis longtemps de passer derrière la caméra et de se servir de son passé pour écrire un film sur la relation entre deux sœurs et leurs parents. Lorsqu’elle trouve enfin des producteurs pour venir à bout de son projet, elle va devoir non seulement trouver un juste équilibre entre sa vie de famille mais aussi ses deux productrices exigeantes, acariâtres qui vont lui rendre la vie dure. Une nouvelle fois la réalisatrice réussit à donner vie à des personnages intéressants et réalistes. Elle bénéficie d’un casting intéressant notamment dans les seconds rôles féminins de Claire Keim, Hélène de Fougerolles, Virginie Hocq Josiane Balasko et Zabou Breitman. Pourtant c’est surtout le personnage de Jack tenu par François-Xavier Demaison en agent qui retient toute notre attention. Il interprète un personnage original au parler vrai et qui donne au film une véritable plus-value.
Le film est également entrecoupé de scènes de rêves de l’héroïne Sybille nous rappelant les grandes comédies françaises telles que nous pouvions en voir dans les années 80. De la même manière le scénario prend une certaine distance avec le roman original et procède à quelques ajustements nécessaires. Dans le roman le duo des deux productrices était celui d’un frère et d’une sœur. La cocaïne n’était pas présente dans le livre et a pour but de grossir les traits de cette productrice à la limite de la démence. Les nombreuses scènes humoristiques nous interpellent par leur manière de ne pas chercher volontairement à être drôles mais plus à coller à une réalité. Un tel sujet n’aurait pas eu une telle liberté s’il avait dû être monté de manière traditionnelle avec l’appui de plusieurs chaînes de télévision. Une seule chaîne du câble a donc pris le risque de supporter Arrête ton cinéma. Un tel film montre une nouvelle fois que le cinéma français trouve sa propre liberté artistique en ne cherchant pas forcément à plaire à tous et surtout que sans de bons comédiens il est impossible de venir à bout d’un projet d’une causticité rare.
Vu le 4 janvier 2016 201 au Royal Monceau
Note de Mulder: