Titre original: | Mandela Un long chemin vers la liberté |
Réalisateur: | Justin Chadwick |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 147 minutes |
Date: | 18 décembre 2013 |
Note: |
Au début des années 1940, Nelson Mandela est un jeune avocat idéaliste, qui croit pouvoir changer le système inéquitable de l’apartheid grâce à l’éducation et une vie respectable. Les activistes du Congrès National Africain ne tardent pas à recruter cet homme brillant pour leur cause. Leur action pacifique n’aboutit à rien, si ce n’est une réponse de plus en plus brutale de la part des dirigeants blancs. Avec l’aide de sa deuxième femme Winnie, Mandela devient alors un clandestin qui commet des actes de sabotage contre les institutions du pays. Arrêté en 1962, il devra purger une peine de prison à perpétuité. Même derrière les barreaux, il restera pourtant l’inspiration de la lutte qui abolira l’apartheid trente ans plus tard.
Nelson Mandela est plus qu’un homme d’exception. Alors qu’il a entamé depuis longtemps l’épilogue d’une vie bien remplie à la fin de laquelle se trouvera, d’ici quelques jours ou quelques mois, une mort paisible, il est désormais le seul géant vivant dans le panthéon collectif de l’humanité. Au fur et à mesure que sa biographie mouvementée a rejoint la légende, Mandela est devenu un idole, un exemple à suivre qui paraît pourtant si parfait qu’il est forcément plus facile de l’aduler que de l’imiter, voire un rayon de soleil unique qui illumine l’obscurité désespérante de la politique internationale. En somme, Mandela est un homme plus grand que nature, qui invite davantage à l’hyperbole qu’à l’analyse impartiale d’un parcours certes impressionnant, mais pas non plus exempt de doutes et de moments de faiblesse. Le cinéma ne s’est jamais vraiment montré à la hauteur de l’envergure exponentielle de cette icône de l’Histoire sud-africaine. Un décalage entre l’excellence de l’homme et celle de sa représentation filmique qui n’est pas prêt à s’estomper avec cette production honnête, mais guère inspirée.
Les plus de 90 ans de la vie de Nelson Mandela sont si riches en événements marquants et changements de cap qu’on pourrait remplir au moins trois films avec. Et pourquoi pas, après tout, puisque les sagas fantastiques pour midinettes, à l’issue tout aussi connue d’avance, exigent de nos jours la prérogative de s’éterniser pendant au moins trois épisodes savamment espacés pour atteindre un rendement commercial maximal ? Une saga Mandela ne fera sans doute pas se déplacer les foules, mais elle permettrait au moins de comprendre plus intimement les motivations d’un homme aux multiples casquettes, qui valent mieux que d’être simplement placardées sur l’affiche du film. Mandela Un long chemin vers la liberté respecte au moins consciencieusement l’équilibre entre les trois étapes majeures de la vie de son protagoniste, allouant respectivement une heure aux volets Révolutionnaire et Prisonnier, ainsi que la moitié au Président.
Ce rythme équitable de la narration ne suffit hélas pas pour donner réellement chair à un homme trop bon pour être vrai. Le ton du film ne quitte jamais les eaux aussi troubles qu’ennuyeuses de l’hagiographie dans lesquelles il s’est fourvoyé d’emblée, en prenant l’autobiographie de Mandela comme point de départ. L’approche de la mise en scène de Justin Chadwick reste donc fermement du côté de la célébration poussiéreuse, au lieu d’interroger le mythe avec un vocabulaire filmique moins superficiel que les ralentis et l’esthétique roman-photo qui prévalent pendant la durée considérable du film. Les interprétations de Idris Elba et de Naomie Harris sont du même acabit : encore crédibles lors des débuts de la lutte pour plus d’égalité, quand la jeunesse fougueuse et séduisante des comédiens coïncide avec celle de leurs personnages, elles deviennent une caricature lourdement grimée au fur et à mesure que Nelson et Winnie, les deux faces de la médaille de la résistance contre l’apartheid, devraient gagner en épaisseur.
Enfin, ce n’est pas un manque de volonté ou d’implication qui fait aussi mollement s’échouer ce film sans doute bien intentionné. Car peut-être vaudrait-il mieux de laisser les saints des temps modernes tranquilles sur leur piédestal, d’où il serait un sacrilège de les faire descendre et au niveau élevé duquel l’air de béatitude est si lénifiante que la marge de manœuvre dramatique ne permet rien d’autre que de colporter, comme dans le cas présent, tous les clichés du genre particulièrement cadenassé de la biographie filmique.
Vu le 25 novembre 2013, à la Salle Pathé Lamennais, en VO
Note de Tootpadu:
A Nelson Mandela (1918-2013)
We can't fall any further
If we can't feel ordinary love
We cannot reach any higher
Ordinary Love – U2
Le film Mandela : Un long chemin vers la liberté de Justin Chadwick (Deux sœurs pour un roi) et scénarisé par William Nicholson (Firelignt, Gladiator, Elizabeth l’age d’or) est l’adaptation autobiographique du livre publié en 1994 de Nelson Mandela et retracant 70 ans de sa vie. Ce livre a été écrit pendant son incarcération. De sa enfance au sein du peuple Thembu, en passant par sa carrière d’avocat et ses premiers attentats et sa longue période d’incarcération et de la période qui la suivit, ce film retrace le portrait d’un grand homme, l’un des plus importants de notre siècle qui s’est battu contre l’apartheid pour redonner au peuple sud-africain les mêmes droits que les autres habitants de race blanche .
Le film Mandela : Un long chemin vers la liberté n’est certes pas le premier film mettant en avant Nelson Mandela. Trois autres films avaient déjà été centrés sur une partie de sa vie que cela soit Au nom de la liberté (Phillip Noyce, 2007), Goodbye Bafana (Billie August, 2007) et surtout Invictus (Clint Eastwood, 2010). Seul Morgan Freeman dans le film de Clint Eastwood avait pu magnifier et rendre toute sa splendeur à cet homme. L’acteur Idris Elba avait donc un challenge important en arrivant à faire oublier cette interprétation et s’imposer comme sa meilleure interprétation. De séries anglaises ou américaines du début des années 2000 à des films marquants tels 28 semaines plus tard à Thor et Pacific Rim, Idris Elba a pu s’imposer comme acteur convaincant dans des rôles forts et importants. Il donne l’immensité de son talent dans ce rôle de leader. Il fait passer par sa présence une combinaison d’empathie, de dignité, et de respect nécessaire à ce personnage. Il rend ainsi parfaitement concret ce portrait complexe d’un homme qui s’est battu pour la liberté des siens.
Concrètement aux autres films ne traitant que d’une partie de la vie de Nelson Mandela, ce film ne fait aucune concession en montrant aussi bien les qualités très nombreuses et les infidélités envers sa première femme que ses attentats pour revendiquer les droits de son peuple. Il en ressort quelques longueurs et des choix drastiques (à aucun moment son prix Nobel de la paix obtenu en 1993) et surtout l’impression que le scénariste a été confronté à des choix difficiles pour savoir quels moments du livre il fallait garder ou supprimer. Nous avons ainsi l’impression par moment de chaos dans la forme du récit et que le scénariste n’arrive pas totalement à maîtriser le récit sur une période aussi longue. Comme toutes les autobiographies, ce film comprend donc son lot de moments forts (la réaction de Mandela face à la mort de la mère et de son fils), et de moments moins convaincants (sa relation avec son épouse en sortant de prison).
Reste que ce film est une réussite grâce à la somme des talents réunie dans ce film et pourrait presque être un modèle pour de futurs biopics. Autant le film Lincoln de Steven Spielberg était trop long et guère rythmé. Réussir à condenser 767 pages très remplies en un film de deux heures vingt-six est un pari audacieux .
Vu le 28 novembre 2013, à la Salle Pathé Lamennais, en VO
Note de Mulder: