Jimmy P. Psychothérapie d'un indien des plaines

Jimmy P. Psychothérapie d'un indien des plaines
Titre original:Jimmy P. Psychothérapie d'un indien des plaines
Réalisateur:Arnaud Desplechin
Sortie:Cinéma
Durée:117 minutes
Date:11 septembre 2013
Note:

En 1948, l’Indien Jimmy Picard souffre toujours des séquelles de la guerre, alors qu’il a été démobilisé trois ans plus tôt. Sa sœur, sur la ferme de laquelle il vit depuis qu’il a perdu son travail à cause de ses troubles psychiques, l’envoie dans la clinique de Topeka, spécialisée dans le traitement des vétérans. Les médecins n’y trouvent à première vue rien d’anormal chez Jimmy. Puisqu’il s’agit d’un de leurs rares patients indiens, ils consultent toutefois l’anthropologue d’origine française Georges Devereux, spécialiste des cultures américaines. Celui-ci est fasciné par l’histoire de Jimmy qu’il étudie au rythme d’une séance par jour, à la fois pour prouver qu’il n’est pas schizophrène et pour établir sa propre renommée scientifique aux Etats-Unis.

Critique de Tootpadu

La psychologie et le cinéma font rarement bon ménage. Entre les affres de l’esprit et la force d’expression filmique, il existe depuis toujours une discordance, qui se rappelle à nous à chaque nouvelle tentative malheureuse. Le décalage entre l’abstraction de la pensée et des rêves, d’autant plus vaste lorsqu’il s’agit de troubles psychologiques, et le pragmatisme des moyens cinématographiques, malgré tout limités à l’image, au son, au montage et à toutes sortes d’associations entre eux, résulte presque toujours par une illustration très banale du ressenti intime des personnages. Arnaud Desplechin a beau être l’un des réalisateurs français les plus atypiques, lui aussi échoue plus ou moins à arracher le regard sur la psychologie de l’emprise freudienne, encore plus inévitable ici à cause de la proximité temporelle de l’action avec la période d’activité du père de la psychanalyse moderne.

Les effets de mise en abîme de l’esprit du protagoniste se réduisent à quelques séquences oniriques guère originales, qui colportent les vieilles conceptions de l’interprétation des rêves. Or, ce n’est pas vraiment ce que Jimmy P. Psychothérapie d’un indien des plaines montre qui nous laisse de marbre, mais que ce point de départ supposé d’une exploration plus large des rapports entre le personnage principal et – au choix – son thérapeute, l’administration militaire ou bien ses propres démons, ne mène en fin de compte nulle part. Les enjeux dramatiques du film sont en effet minimes, ce qui lui confère une aura qui vacille entre l’apaisement et l’ennui. Alors que le sort de Jimmy ne nous importe finalement guère plus que celui de Georges Devereux, notre intérêt se porte, par défaut, sur les méthodes du traitement médical, à ce moment-là au stade de balbutiements d’une prise en charge de patients réticents aux diagnostics expéditifs et barbares des siècles précédents.

Hélas, le soin apporté à la description du milieu hospitalier n’est qu’un piètre réconfort, face au cœur malade du film : une guérison comme par miracle grâce à quelques poncifs œdipiens. Le calme de la narration, en quelque sorte la touche personnelle du réalisateur qui excellait jusque là dans des épopées intimistes, s’avère ainsi être un remède complètement inadapté pour arracher le récit de la torpeur dans laquelle et la nonchalance des interprétations, et l’élégance désuète du scénario le plongent irrémédiablement.

 

Vu le 14 octobre 2013, au Louxor, Salle 3, en VO

Note de Tootpadu: