Leones

Leones
Titre original:Leones
Réalisateur:Jazmin Lopez
Sortie:Cinéma
Durée:83 minutes
Date:07 août 2013
Note:

Cinq adolescents se promènent dans la forêt. Ils se sont perdus, en route pour une maison reculée. Alors qu’ils tournent en rond et que les jeux de séduction et de mots aboutissent ou échouent, leur passé est dévoilé au fil des enregistrements sonores, effectués par l’un d’entre eux. C’est un événement brutal qui les a mis dans cet état, un choc violent qui les enferme dans une déambulation sans fin.

Critique de Tootpadu

Il faut avoir sacrément confiance en ses capacités cinématographiques pour oser faire son premier film sur les pérégrinations d’un groupe d’amis désincarnés à travers un décor naturel. La jeune réalisatrice Jazmin Lopez relève admirablement ce défi, à travers ce film aussi beau que contemplatif. Mieux vaut en effet se soumettre au rythme lent et vague de ce film argentin pour en apprécier toutes les qualités envoûtantes. Il ne s’y passe pas grand-chose et les traits des personnages restent plutôt approximatifs. Mais c’est justement en s’éloignant le plus possible des conventions du cinéma de genre avec ses recettes éculées pour provoquer la peur ou le malaise que la narration peut légitimement aspirer à un degré de cinéma éthéré que peu de films atteignent, et encore moins des débuts aussi finement ciselés que celui-ci.
A première vue, Leones pourrait aisément être compris comme une simple variation, habile quoique guère originale, sur le motif visuel si cher à Gus Van Sant pendant les trois films qu’il a réalisés entre 2003 et 2005. Les têtes vues de dos, qui traversent stoïquement le décor vers une destination plus ou moins déterminée, elles figurent parmi les icônes plastiques les plus mémorables en termes de cinéma de ce jeune millénaire. Ce qui n’était chez Van Sant que le symbole passager de l’horreur de l’anonymat à l’état pur devient cependant dans le cas présent le motif principal d’un vocabulaire filmique fascinant. La caméra agit comme une entité à part dans cette forêt enchantée. Elle explore le paysage quasiment vierge au même titre qu’elle suit le groupe de personnages, sans égard particulier pour l’un ou l’autre d’entre eux.
Même s’il n’y avait rien à comprendre à cette histoire très vague sur un accident de voiture et ses conséquences surnaturelles, son ton vaporeux à lui seul justifierait qu’on s’intéresse à ce film exigeant et dépaysant. Tandis que la figure de style qui ouvre et clôt le film – un écran blanc qui change plusieurs fois de couleur – appartient à ces prétentions artistiques qui peuvent plomber un projet ambitieux tout entier, le reste du film produit un effet de détachement et d’ennui bénéfique qui n’est jamais plus saisissant que pendant la séquence sublime du champ de fleurs.

Vu le 3 juin 2013, à la Salle Pathé Lincoln, en VO

Note de Tootpadu: