Ecume des jours (L')

Ecume des jours (L')
Titre original:Ecume des jours (L')
Réalisateur:Michel Gondry
Sortie:Cinéma
Durée:131 minutes
Date:24 avril 2013
Note:
Colin est un jeune homme indépendant, assez fortuné pour ne pas devoir travailler et inventeur de drôle de machines à ses heures perdues. Quand il apprend que son meilleur ami Chick, un ingénieur pauvre qui adore l’écrivain Jean-Sol Partre, est tombé amoureux de la cousine de son cuisinier Nicolas, Colin est pris de jalousie et veut lui aussi trouver une copine. Lors de la fête d’anniversaire du chien d’une amie, il fait la connaissance de Chloé, qui s’appelle comme son morceaux préféré de Duke Ellington. Leur union idyllique n’est pas faite pour durer, puisque peu de temps après le mariage, Chloé tombe gravement malade.

Critique de Tootpadu

Boris Vian à la sauce Amélie Poulain. Les premières minutes de cette adaptation d’une œuvre majeure de la littérature française du siècle dernier nous laissent craindre que Michel Gondry soit devenu un nouveau Jean-Pierre Jeunet. L’exubérance des décors, la richesse des couleurs, l’emploi sans retenue de l’accéléré – dont l’excès n’est pas moins à proscrire que celui de son grand frère, le ralenti – : absolument tout donne à penser d’entrée de jeu que nous assisterons à deux heures d’un spectacle à l’espièglerie écœurante. Cette première impression s’avère bien sûr trompeuse, puisque le revirement vers un ton plus lugubre de l’histoire et le talent créatif du réalisateur jamais pris en défaut nous réservent au contraire une fantaisie surréaliste et étrange.
Il persiste néanmoins quelque chose de baroque, de démesuré dans L’Ecume des jours. En effet, le film dessine par son itinéraire stylistique une courbe improbable, qui va donc de Jeunet jusqu’à l’imaginaire d’une noirceur expansive de la grande époque de Tim Burton, en passant par des bribes de l’univers de Terry Gilliam. Difficile de n’y voir qu’un brouillon, enivrant certes, de formes et d’idées bizarres. Dans toute sa folie abondante, le récit sait toutefois garder intact un des piliers du roman, à savoir la description détaillée d’un monde parallèle cauchemardesque. Celui-ci aurait facilement pu être le nôtre, si l’évolution de notre civilisation avait opéré des choix différents aux bifurcations importantes. A moins que nous y vivions déjà, dans cette claustrophobie kafkaïenne, faite de sports cyniques et de conditions de travail inhumaines, qui alterne avec une utopie futuriste où l’homme serait définitivement au service de la machine.
Pour rendre cette vision d’un avenir qui déchante moins abstraite, le choix de Michel Gondry s’avère en fin de compte crucial, grâce à sa capacité de garder les pieds sur terre d’un délire visuel fait de bric-à-brac, au lieu d’avoir recours aux effets spéciaux virtuels de la dernière génération. Tout comme la participation d’une distribution de renom, où l’on trouve des comédiens connus jusque dans les rôles les plus anecdotiques, attirera sans doute un public plus nombreux vers cette histoire d’amour extravagante, qui par son fatalisme et sa liberté de ton est en fait l’antithèse complète du sirupeux Fabuleux destin d’Amélie Poulain.

Vu le 5 avril 2013, au Club Marbeuf

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

Michel Gondry est à ne plus douter un grand réalisateur français qui a su se créer son propre univers. En seulement huit films (dont un en coréalisateur, Tokyo) et sans compter les documentaires et publicités cultes pour une célèbre marque de café, il a su imposer sa patte de virtuose. Autant certains de ses films sont de grands films (The we and the I / The Green hornet / Soyez sympa, rembobinez / Eternal Sunshine of the Spotless Mind), autant d’autres laissent pantois et perplexes (la science des rêves et Tokyo). L’écume des jours qui divise notre rédaction fait partie de cette seconde catégorie.

L’histoire surréaliste et poétique de ce film repose sur un jeune homme idéaliste et inventif, Colin (Romain Duris), qui rencontre Chloé (Audrey Tautou), une jeune femme. Leur mariage idyllique tourne à l’amertume quand Chloé tombe malade d’un nénuphar qui grandit dans son poumon. Le livre que beaucoup jugeaient inadaptable à l’écran s’apparente à un délire psychédélique d’un réalisateur en roue libre. Certes, il y a dans le film beaucoup, voire même trop d’inventivité ce qui rend le film guère lisible. A ce jour, L’écume des jours semble être le film le plus personnel de l’œuvre de Michel Gondry mais est également son film qui m’a le plus déçu car je n’ai pu réussi à rentrer dans cet univers onirique, mélancolique et extravaguant. La forme de ce film est certes très réussie car recèle beaucoup d’inventivité mais le fond est trop indigeste pour que l’on puisse réellement s’attacher à celui-ci. Autant cette forme aurait pu donner d’excellents clips musicaux, autant à le digérer en une seule fois pousse à l’indigestion. Son film est ainsi une écume de ce qu’aurait pu être son film s’il n’avait pas été un bloc d’idées certes excellentes mais trop conséquentes pour gâcher le plaisir .

Tel un élève surdoué, Michel Gondry assimile goulument le livre de Boris Vian l’écume des jours pour en faire un moyen pratique de laisser libre cours à une imagination sans limite, non bridée et non sélective. Dans cette vision d’auteur conteur, le casting ne semble être qu’un ingrédient qui n’est pas passé à la moulinette et se retrouve en pleine liberté. Cela est d’autant plus triste telle la fin du film de retrouver d’excellents comédiens (Romain Duris, Audrey Tautou, Omar Sy, Gad Elmaleh, Charlotte Le Bon…).

Vu le 03 mai 2013 au Gaumont Disney Village, Salle 12

Note de Mulder: